CHAPITRE 1.

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Minneapolis, 2023.

L'alarme sur le téléphone de Noah le réveilla ce matin-là à sept heures tapantes. Lorsqu'il ouvrit les yeux et s'extirpa de la couette sous laquelle il s'était agréablement blotti au cours de la nuit, ses narines détectèrent aussitôt l'odeur caractéristique du petit-déjeuner de champion que lui préparait son père les matins de matches. Vêtu d'un short et d'un vieux maillot de hockey, il descendit les escaliers en baillant aux corneilles. Lorsqu'il arriva dans la cuisine, les cheveux en pétard et les yeux à moitié collés, il ne fut pas surpris de voir tous les délicieux mets qui l'attendaient sur la table.

— Bonjour fiston.

— Salut 'pa.

    Noah sourit à son père et récupéra deux œufs au plat dans la poêle sur le gaz. Lorsqu'il s'installa enfin à table face à son paternel, ce dernier replia le journal qu'il était en train de lire et lui demanda sur un air sérieux :

— Tu te sens prêt ?

— Oui, papa. T'inquiète, ça va le faire.

    Le père de famille hocha la tête d'un air entendu : il avait confiance en son fils. S'il lui disait qu'il était prêt, alors il n'avait aucune raison de s'en faire. Sa femme fit irruption dans la cuisine, parfaitement coiffée et vêtue d'un maillot aux couleurs de l'équipe de son fils.

— On est en demi-finale !, s'exclama-t-elle avec joie. Tu te sens bien mon poussin ?

    Noah lui répondit la même chose qu'à son père, exaspéré : voilà ce qui arrivait lorsqu'on jouait au hockey, en étant fils de hockeyeurs. En effet, Adam Banks avait été l'un des meilleurs attaquants de sa génération tandis que Julie Banks – de son nom de jeune fille Gaffney – elle, resterait encore longtemps dans les annales pour ses qualités de goal. Tout comme lui, et même s'ils avaient vieilli, ses parents vivaient, dormaient, pensaient et mangeaient hockey. Et si aujourd'hui Noah adorait ce sport, il ne pouvait s'empêcher de se dire que cela aurait pu en être autrement s'il était né de parents différents.

    Tout en dégustant ses œufs et son bacon grillé, Noah ne put s'empêcher de divaguer. Il pensa à la patinoire, à la glace, au match qu'il jouerait bientôt. Bien entendu il avait déjà joué des finales auparavant, mais il s'imagina ce qu'il pourrait bien ressentir en se qualifiant pour une autre ; s'il gagnait aujourd'hui, il jouerait sa première finale en catégorie juniors dans moins de deux semaines. Cela lui gonfla le cœur d'excitation.

    En guise de préparation, Noah passa sa matinée dans le garage, juché sur une paire de rollers, à manier sa crosse face à une petite cage de loisirs. Musique rock à fond dans ses AirPods, c'était là son rituel d'avant-match ; il revoyait ses esquives, s'imaginait la glace et les tactiques. Il ne tenait jamais compte de son père – et aussi coach – qui passait derrière lui de temps à autres afin d'observer ses moindres faits et gestes. Lorsqu'il avait une crosse en main, le monde autour de lui semblait disparaitre : il n'y avait que le sol – la glace – et le palet sur cette dernière. Le temps d'un match, d'un entraînement, d'un jeu, il oubliait tout.

    Ce fut aux alentours des midis, soit trois heures avant le match, qu'il sentit son téléphone portable vibrer dans la poche de son short. Il posa délicatement ses couverts dans son assiette, sa fourchette plantée dans le monticule de pâtes qu'il s'était servi, et s'empara de son iPhone. Un sourire étira le coin de ses lèvres et ses joues se mirent à rougir lorsqu'il lut le message.

SMS, DE : Isaac.
12:20 PMOn vient d'arriver à Lake Delton. J'ai mal au bide. On devrait être de retour vers 10h. On se retrouve là-bas ? Tu me manques, j'ai envie de te voir.
ps : bon match, je suis sûr que tu seras génial.

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