Chapitre 6 : Les larmes de la lune

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Le bal se déroulera sous la pleine lune, quand Ophélia s'en aperçu, elle redoubla d'effort et de méditation. Sa barrière n'était pas complètement achevée, mais elle entourait déjà la totalité de son cœur. Quand vînt la pleine lune précédent le bal. Elle put enfin de contempler le ciel avec des yeux humain. C'était la première fois que cela arrivait. La barrière empêchait l'énergie spirituelle de s'infiltrer dans son corps et ainsi elle gardait forme humaine. L'effet de la pleine lune augmentait la quantité d'énergie : sa poitrine lui faisait mal, mais c'était supportable puisqu'elle était heureuse. Elle avait hâte de renforcer la barrière pour diminuer son lien avec la lune. Au moins, elle n'avait plus à s'inquiéter d'être découverte.

Le jour attendu arriva. Quand Victor vînt la chercher et qu'elle leva les yeux vers lui, il lui sembla être le plus bel être existant sur cette Terre. Lui, rien qu'à la voir dans sa robe verte, les cheveux relevés dans un chignon désordonné, il rougit.

Ophélia arriva à la fête à son bras. Ce n'est qu'en faisant face à l'immense assemblée qu'elle se souvînt de la raison de leur présence et fût submergée par le stresse de sa tâche. Victor la senti se tendre et posa sa main sur la sienne comme pour lui dire "ne t'inquiète pas, je m'en occupe".

La soirée se passa sans encombre. Ils dansèrent ensemble. Ophélia senti la nuit tomber et surtout, elle sentit la lune monter haut dans le ciel : la force croissante de son énergie lui compressait la poitrine. Lorsque minuit sonna, Ophélia jeta un regard vers la porte. Comme prévu Victor entraîna un membre de la famille royale dehors, dans l'espoir de pouvoir lui glisser le sceau dans la poche à l'abri des regards.

Le temps passait, et Victor ne revenait pas. Immédiatement, elle guetta l'occasion de le rejoindre pour l'aider.

- Excusez-moi, je ne me sens pas très bien. Je vais prendre l'air un instant.

Mais il y eût un homme dont elle n'arrivait pas à se débarrasser même en répétant inlassablement être fiancée. D'un coup, les gens s'agglutinèrent autour des fenêtres. Elle senti que quelque chose n'allait pas et se précipita dehors. Il y avait peu de gens, mais tous regardaient dans la même direction. Sous la pleine lune, il y avait une personne allongée par terre entourée de trois personnes. Sans perdre une seconde, elle se précipita vers eux. Victor était sur le sol, mort. Ophélia ne pouvait croire ce que ses yeux lui rapportaient. Les mains devant la bouche, la respiration coupée, elle leva des yeux remplis de larmes vers celui qui se trouvait debout devant elle, une épée ensanglantée dans la main. Transpercé par ce regard plein de détresse, l'homme expliqua :

- Cet homme est un traître à la couronne. Il avait en sa procession les armes de ma famille.

Alors, elle comprit que ses yeux ne l'avaient pas trompé. Ophélia fit quelque pas, la respiration saccadée, avant de tomber à genoux devant l'homme qu'elle aimait. Un cri de douleur retentit dans l'obscurité, accompagné de larmes. Elle avait mal et pleurait sans retenue. Elle avait une boule dans la gorge ; et son cœur, son cœur, c'était comme s'il allait exploser. Mais c'est la barrière qui explosa dans un hurlement. Sous les yeux de tous, l'esprit de la lune pleurait la mort d'un être cher en lui tenant la main. Ils étaient ébahis par une beauté qu'il n'aurait jamais pu imaginer. Ses cheveux et sa robe semblait frémir au moindre souffle d'air et les fines fleurs de ses cheveux, sa robe et sa peau brillait d'un éclat qu'on n'avait jamais vu qu'à elle. Ophélia ne remarquait même pas leurs regards. Elle se sentait seule au monde, continuant de pleurer.

Son pouvoir était revenu. La jeune fille essayait désespérément de le soigner pour lui faire ouvrir les yeux, mais son âme n'était déjà plus de ce monde. On dit que plus une âme est pure, plus elle monte vite vers Dieu. Ophélia ne pouvait, dans son état voire les choses de cette façon, loin d'être en état de réfléchir. Plus elle prenait conscience qu'elle ne pourrait le faire revenir, plus son âme criait de douleur.

Elle avait commencé doucement : les plaies de Victor se refermaient, mais c'était déjà bien trop tard : il était mort. Ophélia perdait tout raison. Des vagues d'énergie spirituelle s'échappaient de son corps, de plus en plus fortes : son âme recherchait inlassablement celui qu'elle aimait. L'énergie abondante qu'elle avait longtemps retenue s'échappait, et elle n'avait plus la force de la stopper. Autour d'elle, la vie se répandait, des lys blancs éclosant partout autour d'elle. Les plantes sont des êtres vivants dépourvu d'âmes, ils poussaient sans fin, sur une distance de plus en plus grande.

Ophélia s'est calmée. Elle ne crie plus, mais le simple fait de contempler ces lys la rend mélancolique. Malheureusement, ce n'est pas parce qu'elle a retrouvé la raison qu'elle ne souffre plus. C'est comme si son cœur se noyait. Elle étouffe. Elle regarde rapidement autour d'elle. Tout est immaculé. Au-dessus des lys, des papillons de la même couleur volent partout. L'âme d'un papillon est d'une simplicité déconcertante, c'est pourquoi ils ont pu naître d'une puissante vague de vie. Dieu est le seul maître des âmes. Pourquoi leur a - il permis à eux de vivre ? Pourquoi ne lui rend-il pas Victor ?

Un papillon se pose sur son doigt. Elle de porte à ses yeux. Comme les âmes simples sont pures ! Elle cherche désespérément à enfouir son chagrin, mais elle ne pourra jamais oublier. Pendant qu'elle contemple Victor une dernière fois, un homme se glisse derrière elle.

- Que me voulez-vous ?

- Vous l'aimiez tant que ça ?

Ophélia ne pris même pas la peine de répondre.

- Venez avec moi. Devenez ma femme.

Là encore, elle restait muette. Il fallut du temps pour que le silence soit brisé. Levant les yeux vers l'astre, elle senti de nouveau sa poitrine étouffer sous le poids des émotions. Pleurant en silence, elle demanda d'une voix saccadée :

- Je peux vous demander une faveur ?

- Dites.

- S'il vous plaît, implora-t-elle. Prenez ma vie.

Dans le silence de la nuit, on entendit une épée sortir de son fourreau. De loin, on pouvait apercevoir un homme debout derrière une femme à genoux, transpercée d'une lame. L'homme retira son arme avec ménagement. Elle toussa du sang. Sentant la mort venir, elle enveloppa la main de Victor dans les siennes et murmura avec un mince sourire :

- Victor, je n'ai jamais été aussi heureuse qu'après t'avoir rencontré. Tu m'as montré le monde. Grâce à toi, j'ai accompli la promesse que j'ai faite à Dieu, mais à cause de ça je dois continuer à vivre sans toi.

Devant l'ironie du sort, son sourire s'élargit. Puis elle reprit son air sérieux et calme.

- Je n'ai jamais aimé comme je t'ai aimé.

Ses forces l'abandonnaient.

- Un jour, je te retrouverai dans l'au-delà, dit-elle en s'allongeant à côté de lui.

Elle succomba.

L'homme contempla cette femme, belle malgré la mort, puis il leva les yeux au ciel, regardant la lune :

- Alors tu l'aimais à ce point-là.

Qui aurait cru qu'un esprit puisse tomber amoureux d'un homme à ce point. Ophélia, spécialement, était connue pour n'avoir jamais fait de pacte avec aucun humain par fierté. L'homme avait remarqué qu'elle avait tenté d'abandonner la vie éternelle pour être pleinement humaine. Auparavant, aucun esprit n'avait jamais fait ce souhait, il était même incroyable que ce soit possible. L'homme repensa à Ophélia, sous forme mortelle et pourtant sous la lune pleine. Quelle femme étrange !

C'était la fin d'un bal qui avait pris une tournure inattendue.

Dans un champ de lys, deux êtres passionnés reposent main dans la main. La neige tombait délicatement, dans le silence le plus complet. Ce n'était pas la saison.

Beaucoup de gens s'abandonnent à croire que c'est la lune elle-même qui pleurait un être cher.   

La jeune fille sous la luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant