Chapitre 24: Juliette

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L'homme s'avance plus profondément dans l'entrepôt désaffecté, tenant fermement la petite main de l'enfant. 

Juliette vient de terminer le dernier biscuit au chocolat du paquet. Les grondements dans son estomac se sont taris. Sa faim apaisée, elle prend conscience de l'endroit qui l'entoure. Il y fait humide, froid et, en plus, sa pue terriblement. Elle n'a peut-être que dix ans mais elle n'est pas stupide. Elle sait que rien de bon n'arrivera en ces lieux. 

L'homme sent un imperceptible mouvement de recul venant de la petite, il raffermit sa prise. 

- Je me demandais quand tu comprendrais, lui dit-il, toute bienveillance envolée. Tu en as mis du temps. Les gens comme ta maman et toi sont des plaies pour la société. 

La petite commence à sangloter, c'est plus fort qu'elle. Elle tente de ravaler ses larmes mais elle n'y arrive pas. 

- Quel est ton avenir ? Quand tu y réfléchis bien. Tu deviendras aussi droguée et alcoolique que ta mère, rien que pour oublier ce que tu as traversé et parce que tu ne connaîtras rien d'autre. 

Juliette n'écoute plus le monologue de l'homme. Elle cherche un échappatoire mais tout ce qui l'entoure ne lui inspire rien. Que peut-elle faire face à un adulte ?  

Ils arrivent dans le fond de l'entrepôt. L'homme dirige la petite fille derrière une montagne de vieilles palettes moisies. 

- Nous y sommes, ma petite Juliette, dit-il tout en sortant une arme à feu. Tu peux me remercier, je ne suis pas un psychopathe qui va te torturer avant de t'achever. Je t'offre une mort simple et rapide, presque sans douleur. Ne suis-je pas clément ? 

L'homme fait pivoter Juliette sur elle-même. Elle a vue sur un grand mur sombre et humide. Doit-elle fermer les yeux ? Faire une dernière prière ? Espérer que le méchant monsieur change d'avis ? 

Soudainement, un grand fracas résonne dans tout le bâtiment. N'osant pas se retourner, elle s'abaisse en se bouchant les oreilles de ses petites mains. Malgré tout, elle entend des bruits sourds tout autour d'elle comme une bagarre. 

Après un temps indéfini, elle sent que quelqu'un la secoue. Levant timidement les yeux tout en gardant les mains sur ses oreilles, elle fait face à une magnifique dame tout en noir. Celle-ci s'abaisse à sa hauteur et délicatement abaisse les mains de la petite fille. 

- Bonjour toi. 

La dame lui caresse gentiment la joue. Juliette se rend compte que c'est l'énorme pile de palettes, maintenant effondrée, qui était à l'origine du boucan. 

- Je pense que tu n'as plus rien à craindre, ma petite, reprend la dame en se redressant. Sortons d'ici. 

Joignant le geste à la parole, elle prend la petite fille par la main et, ensemble, se dirigent vers la sortie de l'entrepôt. Juliette se laisse faire, elle se sent soulagée. Elle renifle et essuie la morve qui a coulé de son nez avec la manche de son pyjama. 

En passant à côté du capharnaüm en bois, elle aperçoit les jambes du méchant homme entre les planches brisées. Elles ne bougent pas, Juliette en déduis que l'homme a dû être écrasé par les palettes. 

- Je m'appelle Kéresse, se présente la dame en noir. Mon petit doigt m'informe que toi, c'est Juliette. 

La petite fille hoche la tête, elle se sent intimidée par Kéresse. Elles débouchent sur le parking isolé. Kéresse regarde à droite et à gauche, elle semble chercher quelque chose. 

Tout est possible quand on est mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant