8 - Jared

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« Vous n'êtes pas jolie, vous êtes pire.»

– Victor Hugo.


On ne peut jamais prévoir ce qui va survenir.

Je vais vous faire une confidence : ce n'est pas parce que vous avez planifié votre vie sur le bout des doigts que tout se passera comme convenu.

La vérité c'est que l'existence peut chavirer, à chaque instant.

Il suffit d'une rencontre, d'un mot, d'une seconde.

Et plus rien n'est comme avant.

Zola tremblait si fort que j'avais peur qu'elle s'effondre, d'un moment à l'autre. Dans l'espoir de la calmer, je m'accroupissais face à la chaise où elle était assise et attrapais ses mains alors qu'elle sursautait.

– C'est moi qu'ils veulent. C'est ma faute, murmura-t-elle, dévastée.

– C'est leur faute, Zola. Tu m'entends ? Pas la tienne.

Elle hocha la tête négativement, de gauche à droite.

– Peu importe si c'est un piège, faîtes ce qu'ils ont prévu ! Rendez-moi à ma famille et votre amie aura la vie sauve.

Je laissai échapper un soupir. Cette fille était incorrigible, sa gentillesse était presque inhumaine.

– Oui, bien entendu... Ils nous tendent un piège, allons sauter droit dedans ! répliquai-je ironiquement.

– Ce n'est pas vous qui sautez dedans, me contra-t-elle, C'est moi, et consciemment. Ce qui compte, c'est le résultat, et le résultat ce que Mercy vous reviendra.

– Zola, on se connait à peine, mais je suis convaincu que tu es l'opposée de ta famille, alors je refuse de te renvoyer auprès d'eux. Sans vouloir t'offenser, ce sont vraiment des gens horribles. De toute façon, maintenant, on a une autre solution.

A vrai dire, une idée s'était installée dans ma tête, dès l'instant où j'avais compris que Zola détestait autant sa famille que nous, voir plus.

– Laquelle ?

– Si tu acceptes de nous aider, on pourra aller récupérer Mercy nous-même. L'idée d'une descente en force avait déjà été envisagée, mais sans informations, sans savoir où elle se trouvait, c'était trop dangereux. Mais maintenant, tu es là, tu as vécu des années avec eux, tu es probablement celle qui les connais le mieux. Si tu nous guides, on pourra sauver notre amie, et ce sans mettre ta vie en danger.

– Je ferais tout ce que je peux pour vous aider, souffla-t-elle, Je vous dirais tout ce que je sais, bien-sûr. Cependant, je ne promets pas que mes informations soient encore valables, ça va faire un an que je suis partie. Beaucoup de choses peuvent changer en un an.

J'acquiesçai même si elle ne pouvait pas le voir.

– Ne t'inquiète pas, tout ce que tu pourras nous dire sera utile.

Elle hochai la tête.

– Mais pas maintenant, repris-je alors qu'elle commençait à me déballer un flot d'informations, Tu es épuisée, je le suis aussi, d'ailleurs. Il est trois heures trente du matin, alors on va dormir quelques heures pour avoir les idées claires et on regardera avec les gars demain pour monter un plan solide. Je pense que, actuellement, on est juste bon à rien.

– Jared, est-ce que ça veut dire que je ne vais pas devoir retourner là-bas ?

Sa voix était empreinte d'un tel soulagement que son ton me bouleversa. Elle m'avait semblé si déterminée, si courageuse quand elle avait déclarée, sans hésitation, être prête à se sacrifier pour Mercy, mais à présent, la fille devant moi semblait terriblement fragile.

– Non, ils ne te retrouveront pas. Je te le promets, lui assurai-je.

Sans crier gare, elle arrachai ses mains des miennes et se jetai maladroitement dans mes bras. Stupéfait, je répondis, tout de même, à son étreinte jusqu'à ce qu'elle s'écarte rapidement.

– Pardon, je... renifla-t-elle en essuyant les larmes qui inondaient ses joues.

Je rigolai doucement.

– Ne t'excuse pas pour un câlin, je devrais survivre. Je ne dirais,d'ailleurs pas non à un petit bisous aussi pour me remercier, suggérai-je sur le ton de la taquinerie pour alléger un peu l'atmosphère.

Elle esquiva un sourire en me frappant l'épaule, alors que je m'esclaffai davantage.

Je me relevai finalement, pour aller chercher des couvertures dans l'armoire et les poser sur le lit.

– La maison est plus que pleine, exposai-je, soulevant ce problème auquel je n'avais pas pensé.

– Combien de personne y habitent ?

– A l'origine, on était treize, mais maintenant, on est une vingtaine, alors la place commence à manquer. Pas tous les Sinners y vivent, seulement ceux qui n'ont nulle part où aller, mais je dois admettre que l'on est un peu serré. Les gars on dû commencer à partager leur chambre. Il y a même des amis qui dorment sur les canapés, actuellement.

– Si tu me donnes une couvertures, je dors par terre sans problème, proposa Zola alors que je levai les yeux aux ciel.

– On a plus de place par terre non plus, la baignoire ça te va ? demandai-je, ironique, face à son absurde idée, Non, ce que je voulais te proposer, c'est de partager mon lit -en tout bien, tout honneur- sinon je peux aller réveiller un des gars pour qu'il te laisse la place.

– Tu ne vas aller réveiller personne, partager ton lit me va très bien. Tout ce dont je rêve, c'est dormir, là tout de suite.

Je me dirigeai vers l'armoire pour prendre un T-Shirt et le lui poser dans les mains.

– Comme pyjama, expliquai-je, La porte d'en face, ce sont des toilettes, tu veux que je t'y conduise ?

– Non ça devrait aller, merci, déclara-t-elle en se levant et en se guidant à l'aide de ses mains.

Au moment où elle quitta la pièce, j'enlevai mes habits et enfilai un short avant de me coucher dans mon lit, sur le dos, les mains glissées sous la tête pour fixer le plafond. Mes yeux se fermèrent d'eux-même, je n'avais pas dormi depuis plus de quarante-huit heures et j'étais éreinté.

Cette situation était dingue. J'allais partager mon lit avec la fille que j'avais voulu enlevée, quelques temps plus tôt, même si, à présent, la situation était bien différente.

Zola Black était passée d'ennemie à alliée, en quelques heures à peine.

Le bruit de la porte qui claque me ramena à la réalité. Je tournai la tête pour la voir, affublée de mon T-shirt noir beaucoup trop grand pour elle qui retombait presque jusqu'à ses genoux.

Merde, qu'est-ce qu'elle était belle !

Heureusement qu'elle n'avait pas pu voir le regard que je venais de poser sur elle à l'instant. Elle aurait probablement refusée de partagé le lit, sinon.

Elle s'allongea pendant que j'éteignais la lumière.

– Bonne nuit, dis-je en tournant la tête vers elle.

– Bonne nuit, répondit-elle en se tenant relativement éloignée de moi.

Trop près du bord.

– Euh, Zola, si tu continues, tu vas tomber du lit, l'avertis-je.

– Mais non, je contrôle la situation, me contredit-elle.

Moins d'une minute plus tard, un bruit sourd éclata dans la pièce, alors que j'explosai de rire. Zola venait de tomber du lit.

– La situation est toujours sous contrôle?  lui demandai-je, hilare.

– Oui, oui, je teste le sol, répliqua-t-elle, sarcastique en remontant sur le lit.

Je fermai les yeux, le sourire aux lèvres, alors que je sentais sa chaleur, près de moi.

– Jared, je suis contente que vous m'ayez trouvée avant ma famille, souffla-t-elle, soudainement, d'une toute petite voix.

Je ne pouvais qu'adhérer à sa remarque.

– Moi aussi Zola, je suis content de t'avoir trouvée avant.

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