Chapitre 14: Débrider la plaie

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Elle était là.

LA question.

Elle ne pouvait pas être évitée.

Alexeï ne le regardait pas, ses yeux étaient rivés aux chalets en face, au loin. Il ne s'offusqua pas de ce calme assourdissant, sa patience pouvant monter dans les extrêmes lorsqu'il s'agissait d'un sujet sérieux ou sensible pour quelqu'un. Il entendit un léger soupir, pas un soupir exaspéré ou agacé, non, c'était plutôt un soupir de soulagement.

« J'ai eu la frousse. »

La voix de Krystan était plus rauque qu'à l'accoutumée, ses mots se résumaient presque un murmure, comme s'il avait choisi avec soin ses mots et osait à peine les prononcer à haute voix. Comme s'il en avait honte.

C'était le cas. Il avait honte, Alexeï le comprit en tournant son visage vers celui qui fixait la neige des pistes, les doigts crispés sur la rambarde de bois de la terrasse.

« Je ne pouvais pas me cacher derrière l'alcool que j'avais bu, ni derrière la surprise, ni te reprocher quoique soit. Je ne pouvais pas regretter de me réveiller avec toi. Je ne pouvais pas non plus rester de marbre, faire comme si de rien n'était. Je n'avais aucune excuse et la panique a commencé à m'envahir. Je n'en suis pas fier. Pas du tout... Je suis désolé. J'ai été un vrai blaireau sur ce coup. »

Krystan n'arrivait même pas à savoir comment il pouvait en parler aussi facilement, il s'était lancé, dès qu'il avait avoué avoir eu peur, tout le reste s'était échappé. Les mots franchissaient ses lèvres avec aisance, comme s'ils avaient patienté pendant des années, pour sauter sur cette occasion, pour enfin se faire entendre. C'était d'ailleurs la réalité.

Le jeune homme aux mèches ébènes posa sa tête dans ses bras, se pencha sur la rambarde. Ce geste ne signifiait pas qu'il cherchait à se dédouaner d'une quelconque responsabilité ou à éviter le sujet, Alexeï l'avait compris. Il le connaissait.

« J'ai franchement été estomaqué, je ne savais pas comment réagir et j'étais terrifié. »

Le blond haussa un sourcil, il était curieux de savoir ce qui avait tant effrayé Krystan alors qu'il en fallait beaucoup pour lui faire peur. Krystan était un fonceur, il n'avait pas peur de briser quelques règles, de prendre des risques alors cette confiance n'en était que plus étrange pour Alexeï. Il doutait, hésitait, il avait peut-être bien une idée du pourquoi, de ce qui avait apeuré son interlocuteur. Il devait entre certain, il ne maîtrisa pas l'intonation de sa voix, elle fut rude, dure et froide et scotcha Krystan sur place.

« Pourquoi ? »

Ce changement de ton, ce mot qui s'apparentait à une claque avait poussé Krystan à relever la tête : ses orbes noirs dévisageaient l'étudiant à ses côtés.

Des centaines de contradictions et d'émotions.

C'était ce que les yeux d'Alexeï voyaient dans les prunelles sombres de son interlocuteur. Ce regard était indescriptible. Il y avait trop de choses, trop de sentiments et pourtant ce chaos ne permettait pas d'en tirer des conclusions.

« Ta réaction. C'est ta réaction qui me faisait flipper Alexeï. »

Son instinct ne l'avait pas trompé, le concerné se mordilla la lèvre inférieure, essayant d'ignorer le regard qui venait de dériver sur ses lèvres, attiré par ce petit geste.

« Et donc tu as pensé que te tirer sans un mot après que nous ayons couché ensemble était une bonne idée. Tout comme c'était une bonne idée de ne pas venir lorsque nous sommes partis quelques heures plus tard. Tout comme c'était une bonne idée d'ignorer mes appels et mes messages. »

It was only Christmas NightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant