Chapitre 6: Chiens de faïence

74 8 9
                                    

Un simple sourire crispé.

Nullement sincère.

C'était tout ce qu'avait pu répondre Alexeï au bonsoir chaleureux du fantôme de son passé. Merci Seigneur il avait pu se dérider pour saluer les parents de Krystan !

Oui, ce n'était pas exagéré de remercier une quelconque divinité de lui avoir fait conserver une once de politesse. Et de l'avoir ramené à la réalité, les parents de Krystan l'avaient pris dans leurs bras, souriants, lâchant un « ce que tu as grandi ! » qui toucha particulièrement Alexeï. Il appréciait énormément ce couple qui l'avait toujours accueilli les bras ouverts, avec le sourire et qui avaient même été de très bons conseils lorsqu'il lui était arrivé de ne pas savoir comment rattraper une de ses bourdes. Tout comme ses propres parents, ceux de son ancien voisin étaient des anges, aux petits soins pour leur enfant, avec toujours plein de grands projets en tête et ne rechignant jamais à aider quiconque en avait besoin. Un trait de caractère qui avait été partagé par toute la famille Rossi, quelques années auparavant.

Etait-ce juste de parler ainsi au passé ?

Pour l'étudiant revenu d'Allemagne, c'était simplement une question de logique. Tout le monde s'était rassit, de nouveaux apéritifs avaient été déposés sur la table et les verres furent de nouveau remplis.

« Donc, tu étudies en Allemagne depuis cinq ans ? »

Alexeï avala difficilement sa gorgée de vin blanc, essayant de faire abstraction de tous les regards posés sur lui. Difficile d'ignorer tant d'attention. Surtout son attention.

A peine quelques secondes s'écoulèrent avant qu'il ne repose son verre avec délicatesse, un fin sourire aux lèvres, non feint cette fois-ci, à l'attention de Christelle. Avec les années, il était devenu bon acteur, si bien que même ceux qui le connaissaient le plus n'avaient eu aucun moyen d'interpréter sa réaction.

« Oui, j'ai emménagé à Berlin quelques mois après l'obtention de mon bac. Etant donné que j'ai toujours voulu vivre dans ce pays, je n'ai pas hésité avant de sauter sur l'occasion lorsque l'université m'a accepté.

- Ton diplôme sera-t-il reconnu ici aussi ?

- Oui, j'ai eu la chance de trouver le moyen de le faire valider ici aussi, en même temps. Si bien que si j'arrive à l'obtenir là-bas, il sera valable ici , à niveau égal.

- Ca, c'est vraiment intelligent ! Une de nos cousines était partie à l'étranger pour faire ses études mais la vie en Suède ne lui plaisait pas tant que ça, quand elle a voulu revenir, on lui a dit que son diplôme n'était pas valide.

- Qu'a-t-elle fait ensuite ? »

La curiosité d'Alexeï avait été piquée, il avait déjà rencontré plusieurs fois ce côté de famille de ses voisins, tout comme ses parents qui semblaient réfléchir. C'était aussi un moyen de manipuler l'attention pour qu'elle ne se focalise pas sur lui.

A l'extrémité de son champ de vision, il cru voir un léger sourire amusé se dessiner sur le visage de Krystan, jusque là plutôt silencieux. Alexeï se donna mentalement une claque pour ne plus laisser ses yeux dévier sur la silhouette qui, malgré la finesse de ses traits, était pourtant inratable.

« Il s'agit de Marie, non ?

- Oui, tu te souviens d'elle David ?

- Evidemment vu qu'elle avait un peu trop suivi nos chenapans dans leurs bêtises. »

Papa, ne peux-tu pas te taire, de temps en temps ?

S'il te plaît ?

Alexeï n'avait pas pu se maîtriser : il avait levé les yeux au ciel en se répétant ces questions pendant plusieurs dizaines de secondes alors que les regards des personnes présentes voyageaient -plus ou moins discrètement- entre lui et un Krystan qui avait laissé un immense sourire lui échapper.

It was only Christmas NightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant