☞ 14- Champignons et polygamie

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Je suis actuellement tranquillement dans ce bon tas de ferraille qui sert de voiture à l'internat, une Warrior comme on les appelle, surtout après avoir survécu aux vomis de tous les gosses qui sont montés dedans, ainsi que le mien car ça arrive même aux meilleurs. Dave est au volant et m'emmène en direction de cette fameuse randonnée qui en plus de ça se trouve en pleine forêt. Déjà que marcher c'est pas mon fort mais en plus je dois faire du parcours en évitant les racines et les branches, sachant que je peux perdre une cheville ou un œil à tout instant. Dépité avant même d'avoir commencé, je pose comme toujours ma tête contre la vitre en ayant bien au préalable effacé toute trace de sébum, une fois mais pas deux merci. 

J'observe le paysage tandis que mes pensées sont tournées non pas sur Samantha, j'ai définitivement tiré un trait sur cette histoire, mais encore et toujours sur Gabriel. Je suis énervé, lessivé, fatigué et encore pleins d'autres mots qui terminent en é mais mon manque de vocabulaire va se contenter de ces trois-là. Plus sérieusement et oui ça peut arriver, je suis surtout énervé face aux sentiments que j'éprouve. C'est vrai, pourquoi il a fallu que ce soit un mec totalement inintéressant qui m'attire ? Ouais, juste de l'attirance, et rien d'autre. Et même cette putain de phrase, mon esprit n'arrive pas à s'en convaincre. Il ne veut pas contrôler mon cœur en la présence du rose, me rendre insensible à son sourire, à ses beaux yeux émeraude. Pourquoi doit-il battre pour autre chose que me maintenir en vie ?Je sais très bien qu'il faudrait simplement que j'assume ce que je ressens, que je laisse mon esprit dériver vers le rosé et les sensations qu'il me procure...mais bon, ça je ne suis pas sûr d'y arriver. 

Alors que je regarde toujours le paysage d'un regard blasé, je sens les yeux de Dave qui m'observent. Il ne doit pas être habitué à me voir si calme, moi qui habituellement met le son à fond pour chanter comme une casserole en m'imaginant à mon propre concert. 

« - Quelque chose ne va pas Aitor ? 

- Non non, tout va bien. »

Il continue à me regarder mais ne dit rien, et je vois dans son regard qu'il a compris que quelque chose n'allait pas. On continue de rouler encore une quinzaine de minutes et j'aperçois l'entrée de la forêt indiquée par un énorme panneau en dessous duquel nous passons. Dave se gare et se tourne vers moi. 

« - Tu sais, je vois bien qu'en ce moment tu ne vas pas très bien, alors si tu as besoin de parler viens me voir, d'accord ?

- Ouais, merci Dave. »

Je sors de la voiture pas vraiment motivé mais bon, ce sera toujours mieux que de broyer du noir dans ma chambre. Mon sac sur le dos, je me dirige vers la cabane qui indique le départ de la randonnée. J'aperçois les autres qui attendent devant, dès que Adé m'aperçoit celui-ci agite ses bras devant moi ce qui réussit à m'arracher un sourire. Lorsque je suis assez près du groupe, mes yeux rencontrent automatiquement le regard de Gabriel, qui me sourit avant de retourner à sa conversation avec Riccardo. Nos regards se sont croisés seulement le temps de quelques secondes mais cela a suffit à mon cœur pour rater un battement...Je suis faible. 

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Ca fait maintenant trente minutes que notre joyeuse colonie se balade sur les sentiers telle les grosses limaces que nous sommes. Ca fait 30 minutes que le guide qui était censé nous accompagner nous a semés depuis bieeeeen longtemps. Rip Jean-Pierre, on se retrouve à la ligne d'arrivée. Et ça fait aussi trente minutes que Gabriel n'a pas lâché Riccardo. Enfin, que Riccardo n'a pas lâché Gabriel. Parce clairement, vu comment le caniche est penché vers le rose, on sent qui a envie de discuter entre les deux. Mais le problème, c'est le sourire que Gabriel lui rend. Ce n'est pas un sourire éclatant ou lumineux (ça vaut mieux pour le caniche), mais plutôt un sourire plein d'affection, comme s'il était attendri à la vue du chiot face à lui. Et mon cul c'est du poulet ? Il n'y a rien d'attendrissant à la vue que j'ai devant moi, sérieusement.

«Taquine-moi» | RanmasaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant