Quand le jour s'est levé pour de bon, j'ai cru que c'était un matin comme les autres. J'avais oublié...
J'avais rêvé de Mike et je me suis réveillée en pensant à lui. Mais pas comme je l'avais vu la dernière fois, allongé sur la banquette arrière de la voiture de Nathalie.
Dans mon rêve, on chantait sur scène, devant un public de fans en délire.Vous vous rappelez le cours de guitare auquel je ne voulais pas aller ? Eh bien la pluie n'était pas la seule en cause... Ni le prof, d'ailleurs, qui est très sympa. J'avais juste voulu apprendre à jouer de la guitare en espérant impressionner Mike. Et aussi, bien sûr, parce que j'étais persuadée d'avoir un talent caché. Mais en réalité, j'étais nulle !
J'avais beau chanter comme une casserole, j'adorais ça. Je fredonnais tout le temps, dans ma chambre avec Asya, en espérant qu'à force de répéter, je deviendrais miraculeusement douée.
C'est beau les rêves ! Surtout quand ils se réalisent. Je suis bien placée pour le savoir : j'ai embrassé Mike Hullsen !Bref, pendant quelques instants, avant d'ouvrir les yeux, j'étais au paradis. Et je me suis réveillée en enfer.
En m'étirant, j'ai senti, à la place de mon matelas, le contact du plancher sous les jambes. Les coussins avaient glissé. Je ne sais pas comment Sacha se débrouille pour construire ses petits nids de hamster. J'avais passé la nuit la pire de ma vie. Avant même de me lever, j'avais mal partout. Il ne m'a pas fallu longtemps pour retrouver la mémoire.
Mike... Oh mon dieu, Mike !
J'ai effleuré mon menton. Pendant la nuit, il s'était couvert d'une croûte géante. Puis j'ai tâté mon nez. Il m'a paru normal, mais j'avais besoin d'un miroir pour m'en assurer. Si je n'étais pas trop horrible, je prendrais le train et j'irais à l'hôpital pour essayer de trouver Mike. Ou alors, je demanderais à Amir de m'y conduire. J'avais du fond de teint pour me refaire une beauté... Non : il était resté dans la grange de Félien avec mon portable... Mon portable que je devais ABSOLUMENT récupérer ! Récupérer mon téléphone, ça signifiait revoir mes amis, et ça, c'est génial ! Une fois que j'aurais remis la main sur mon fond de teint, je pourrais aller voir Mike.
Il faudrait quand même que je commence par prendre une douche. Non : d'abord jeter un coup d'œil sur Internet, la douche après. Choisir des fringues, me maquiller...Voilà le genre de pensées qui me tournaient dans la tête. Ça, plus le fait que j'avais soif et que j'étais tout près d'exploser. Je me suis résignée à faire pipi dans le seau, comme la veille du soir, puis j'ai vérifié l'ordinateur que j'avais laissé allumé. Il n'y avait toujours pas de réseau, mais j'ai vu l'heure. J'ai essayé de me rappeler a quel moment j'étais rentrée et j'ai calculé combien de temps je risquais de rester enfermée dans cette pièce. Ça m'a donné mal au crâne.
Je suis allée ouvrir les rideaux. Il pleuvait.
Devant la maison, ce matin, notre petit carré vert tondu de près était boueux, déchiqueté, comme si un sanglier s'était acharné dessus. Mme Fitch était allongée en plein milieu. Elle me tournait le dos, la boîte de médicaments était à côté d'elle.
Il pleuvait des cordes. Il pleuvait sur Mme Fitch, immobile, qui ne respirait plus.
J'ai d'abord pensé qu'elle avait succombé à une crise cardiaque ou qu'elle était morte d'hypothermie parce qu'elle était restée trop longtemps sous la pluie. Elle était âgée après tout.
C'était la première fois que je voyais un cadavre et j'espérais que ce serait la dernière. Quelle vision affreuse. J'ai eu beau tirer aussitôt les rideaux et fermer mille portes dans ma tête, pas moyen de lui faire barrage.
Au même moment, mon cerveau s'est mis a protester. :
« J'ai soif ! J'ai soif, j'ai faim, je pue et je refuse de faire caca dans un seau en plastique ! Je veux un petit déjeuner. Je veux une douche. Je veux mon portable. Je veux sortir d'ici ! »
Avant de crier, j'ai tourné la poignée de la porte, par réflexe. Elle s'est ouverte.
-Amir ? ai-je appelé doucement.
La maison était silencieuse. Louis devait dormir et je ne voulais pas le réveiller. Même le quartier était calme. On entendait quelques alarmes mais plus de sirènes, plus de klaxons, pas de cris. Des alarmes et la pluie.
J'ai tendu l'oreille.
-Amir ?
J'ai sorti la tête de la pièce. La porte du salon était ouverte. La télé était encore allumée mais le son était coupé. J'ai aperçu son reflet dans le verre des photos de famille, sur l'appui de fenêtre.
Peut être que Amir s'était assoupi devant l'écran.
-Amir ?!
J'ai fais quelques pas dans le couloir.
Je savais que je n'étais pas malade à cause de la pluie, mais je ne me sentais vraiment pas bien. Je mourrais de soif et j'avais une migraine terrible. J'avais faim et envie de vomir en même temps, et je souffrais de vertiges. Ce n'était pas bon signe, mais était ce grave ?
-Amir ? ai-je appelé à voix basse.
Arrivées au pied de l'escalier, je me suis arrêtée pour écouter. Toujours rien.
J'ai jeté un coup d'œil dans le salon. Il était désert, mais la télé a capté mon attention. Elle montrait des images muettes, qui allaient avec les paroles que j'avais entendues la veille du soir. A ma grande surprise, c'était des images d'amateurs. Elles m'ont fait penser au film qu'on avait fait ensemble, Asya, Ron, Nina et moi pour le cours de communication. Un flash d'infos bidon sur une invasion de zombie. En principe, Félien aurait dû s'occuper de le monter mais Ron à absolument voulu s'en charger. Les costumes, le maquillage, le cadre (la forêt à côté de chez Félien) tout était génial. Mais le montage était à chier !
Pour info : on a eu B. Félien et Fiona, qui ont fait équipe avec d'autres, ont décroché un A pour une fausse pub de lessive. Félien était le producteur mais c'est Fiona qui s'est tapé tout le boulot. Elle a incarné à elle seule la femme au foyer glamour et le scientifique binoclard... Quand j'y repense, c'est vraiment injuste. Notre idée était mille fois plus originale ! Ron a prétendu qu'ils se fichaient de l'originalité et le prof nous l'a confirmé. N'empêche on se demande ce qui est le plus important : survivre à une catastrophe ou vendre de la lessive ? Je maintiens qu'on mérite un A nous aussi !
VOUS LISEZ
The Rain
AdventureUne pluie mortelle s'abat sur la Terre : les moldus sont menacés de disparition. Anna, 15 ans, par à la recherche de son père mais reçois une lettre. Je m'appelle Anna Wilson, et voici mon histoire. Si vous la lisez, vous avez énormément de chance d...