Il n'avait pas été compliqué de conduire Del jusqu'à son petit appartement dans un immeuble piteux. Le mastodonte se laissait entraîner par son sauveur, les oreilles tendues vers lui, sans le quitter des yeux, ou alors simplement pour regarder sa toute petite main s'accrocher nerveusement à la sienne bien plus énorme. Ils n'étaient pas vraiment discrets, ce petit jeune homme au masque et ce mastodonte balafré maculé de sang. Mais ils ne se firent pas interpeller sur le chemin, et quand Azazel rentra dans son petit T1 insalubre, Del se sentit légèrement à l'étroit, baissant la tête pour pouvoir passer la porte, il se cogna au lustre et couina en s'accroupissant, les oreilles basses. Azazel était très ordonné, alors l'espace était pleinement exploité pour contenir toutes ses affaires et laisser un passage correct.
« vient... il faut te laver, tu es dégoûtant... » fit il
doucement, fermant les volets pour éviter que des paires d'yeux un peu trop curieuses ne viennent les importuner. Del n'avait pratiquement rien d'humain, laissant traîner son nez un peu partout, semblant intéressé par les odeurs nouvelles qui lui titillaient les narines. Quand Azazel sorti de la salle de bain après avoir fait remplir la baignoire, il retrouva son « invité » la tête dans son placard à vêtement, une queue touffue en prolongement de sa colonne vertébrale remuant doucement. l'appendice étant presque aussi long que le corps de son propriétaire, cette queue de fourrure grise prenait énormément de place et détruisait tout sur son passage. Voyant une pile de livre se faisant balayer, Azazel s'écria en les rattrapant de justesse.
« 16 assieds toi !! » paniqua t il.
C'est à moitié surpris qu'il vit Del obéir docilement, ramenant sa queue enroulée autour de lui. Azazel cria une seconde fois en voyant l'homme-bête mordiller un de ses sous-vêtements, à savoir une toute petite culotte jaune. Les oreilles cramoisies, il essaya de lui arracher de la bouche, mais le bruit de tissu qui se déchire lui indiqua que Del aimait bien sa culotte et surtout qu'il ne pourrait plus jamais la mettre. Tenant un petit bout de tissu pendant que l'autre remuait le bout de sa queue en souriant, Azazel abandonna, jetant les vestiges de son sous-vêtement à la poubelle.
« va dans la baignoire, dépêche toi et ne mets pas de l'eau partout ! » grogna t il
en fermant son placard à clef. Del, la queue entre les jambes se déplaça de sa démarche inhumaine vers la salle de bain, reniflant un peu tout au passage. Il se déshabilla doucement, laissant ses vêtements sur le sol avant de se glisser dans l'eau, ronronnant de contentement en sentant l'eau tiède le débarrasser de ce sang poisseux. La baignoire se teinta d'un rouge marronâtre en un rien de temps, et Del attendit Azazel. Quand celui-ci tarda, la bête se mit à couiner, comme un chien qui se sentirait seul. Le petit brun, qui était en train de compter son argent pour payer les billets d'avion, sursauta. Cet homme n'était donc qu'une bête ? Il parlait bien quand ça l'arrangeait ! Il savait se comporter comme un être humain, Azazel l'avait déjà vu faire ! Ce garçon, car s'en était encore un, était perdu entre un comportement animal, un manque profond d'éducation et sa volonté d'imiter ses paires. Le médecin soupira doucement et se remonta les manches pour aller laver son hôte.
« n'es-tu pas capable de te laver seul ? j'ai toutes mes affaires à mettre en valise moi. » le sermonna t il
d'un air agacé, surmontant cette boule d'angoisse dans son ventre qui apparaissait à chaque fois qu'il était confronté à Del dans son plus simple appareil. La bête se laissa frotter, shampouiner, rincer et sécher en silence. Quand il fut temps de s'habiller, et préféra rester nu et se balader dans l'appartement, prenant tout de même garde à tenir sa queue tranquille.
« tu peux faire disparaître ça s'il te plaît ? Tu es suffisamment volumineux et l'appart est suffisamment petit pour qu'on se passe de ton plumeau géant. » râla-t-il
en essayent de lui trouver des vêtements à sa taille. Il finit par dénicher un pull XXL qui lui servait de robe de nuit, et un jogging bien trop grand. Ça ferait l'affaire. Del s'habilla à contre cœur, faisant disparaitre sa queue, et s'assit sur le tout petit lit dans la pièce, en boule, regardant Azazel s'affairer à ranger et empaqueter ses biens. Quand tout fut prêt et l'appartement vidé, Del se rendit compte que le petit brun ne possédait pas grand-chose, puisque toute sa vie tenait dans deux grosses valises. Ils partirent alors que le soleil déclinait doucement, marchant vers le seul bus de la ville qui les amèneraient à l'aéroport. Del était infiniment stressé, collant Azazel comme un chiot inquiet, toujours son bout de culotte entre les dents, comme un doudou. Encore une fois le petit brun soupira du manque d'humanité dont faisait preuve son nouvel ami par obligation, mais fut compréhensif, et pendant qu'ils attendaient leur embarquement, il laissait Del se recroqueviller contre lui, et lui grattouillait le creux de la mâchoire pendant qu'il faisait une sieste. Azazel sursauta fortement quand il entendit une voix terriblement grave, tournant sa tête vers la source de cette voix. Il vit un gigantesque homme, plus grand encore que Del, bien plus volumineux, autant de muscles, que de la bedaine bien fournie qu'il arborait. Le visage caché par un journal qu'il tenait de ses grosses paluches métisses, le docteur ne voyait qu'un chapeau dépasser, et des cheveux longs blancs.
« Ces bêtes là m'ont toujours beaucoup amusé, et attendri... prenez en soins, c'est toujours utile, une Chimère... » avait il dit
avec un rire qui secouait ce ventre fier. Azazel, perplexe, voulu répondre, comment connaissait il l'espèce de Del ? Comment avait il dit ? Une Chimère ? Le haut parleur annonça son embarquement, lui faisant tourner la tête, et quand il voulu à nouveau pivoter vers cet inconnu, il avait disparu. Il ne restait que le journal, un numéro londonien, qui cachait en réalité un magasine playboy. Tout dérouté, Azazel secoua la tête et prit la main de Del, qui lui portait les valises lourdes, pour boitiller rapidement vers leur porte d'embarquement,pour monter dans l'avion qui signerait l'extinction de l'espèce Chimère sur le territoire Russe. Durant ce méli-mélo d'évènements, Azazel n'avait pas pensé à rappeler sa jolie blonde.
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Le balafré
FantastiqueL'histoire de la rencontre entre Azazel, et Del, en Sibérie, il y a presque 20 ans.