Le bonheur sera toujours là demain

221 13 39
                                        

Un an avant le début de MAUX DITS...

Je hais la Saint-Valentin.

Entre les amoureux qui se roulent des pelles et les pigeons qui roucoulent à tout-va, ce jour maudit ne sert qu'à me rappeler ce que j'ai perdu... et que je ne pourrai jamais réellement retrouver.

Le sentiment d'aimer et d'être aimée en retour, la sensation d'être à ma place parmi les miens, l'impression que le bonheur sera toujours là demain.

Quel intérêt y a-t-il à célébrer l'amour, d'ailleurs, à part causer de la peine à ceux qui l'ont fui, trompé, trahi... ou qui n'ont jamais pu en profiter ?

Ça, c'est la question que j'ai posé à Connor il y a une demi-heure, quand il m'a supplié de passer la soirée avec lui.

Si ma flemme a failli l'emporter, c'est finalement ma peur de l'ennui qui m'a décidée.

Quitte à broyer du noir toute la journée, autant permettre à mon ami d'égayer mon quotidien, avec ses blagues de geek que je ne réussis jamais à saisir.

Depuis son appel, je l'attends patiemment sur le pas de la porte, heureuse malgré tout d'avoir trouvé une excuse pour fausser compagnie à Prya et Michael, mes parents adoptifs.

Ils sont censés partir au restaurant dans quinze minutes, mais comme d'hab, Micky n'est pas fichu d'être à l'heure... Prya essaie de faire bonne figure, mais de là où je me tiens, je la sens bouillir de l'intérieur.

Contrairement à moi, la Saint-Valentin a vraiment un sens, pour elle.

Mais comme l'année dernière, son sans-cœur de mari lui préfère son travail au dîner aux chandelles qu'elle a passé toute la semaine à organiser.

Pitoyable, n'est-ce pas ?

Raison de plus pour que je foute le camp d'ici, et vite.

— Kyoko !

Je me redresse, surprise.

Au bout du jardin, Connor m'adresse un signe de la main accompagné d'un immense sourire, ravi de me voir accepter son invitation.

Fuck.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'étrange sensation que notre virée ne se résumera pas à une simple soirée entre amis.

Et j'ai bien peur que tu aies raison...

Mon estomac se serre lorsque mon ami me tend un bouquet de primevères ramassées sur le trajet.

Aïe. Ça, plus le sourire qui ne quitte plus ses lèvres depuis que ses yeux de carpe frite se sont posés sur moi, ça signifie que je vais devoir le rembarrer.

— J'aime pas le jaune, déclaré-je sèchement en refusant son cadeau.

Sous-entendu : ce n'est pas un rencard.

Donc s'il pense profiter de la Saint-Valentin pour mener à bien son plan de séduction lourdement entamé il y a un mois, il se fourre le doigt dans l'œil.

— Ah.

Je crois que tu l'as vexé, Kyo...

Je crois surtout qu'il commence à avoir l'habitude, mais j'ignore combien de râteaux il compte se prendre avant de réaliser que son amitié m'est bien trop précieuse pour que je prenne le risque de la gâcher... encore moins pour une séance de baisers que je n'ai jamais désirés.

Son sourire fané, les fleurs jetées, il esquisse un pas en arrière, puis un autre, jusqu'à ce que je comprenne que si je le laisse s'engager dans l'allée sans tenter de le rattraper, il ne reviendra pas.

Stars-Valentin 2021Où les histoires vivent. Découvrez maintenant