Menthe à l'eau

Chapitre 8 : «C'était impossible.»

Narratrice : Adèle.

Nous regardons dans la même direction, nous scrutons le plafond. Nos respirations encore heurtées à l’unisson et le feu de nos corps me font t’aimer un peu plus fort. Entrelacée entre ses bras, j’arrive enfin à me dire que ça y est on l’a fait. Mon ventre est dévoré par des papillons tellement voraces qu’ils pourraient être vautours.

« Je t’aime. 

Une petite résonnance : je n’ai pour réponse que l’écho de ces mots de trop. Un halo s’est discrètement déposé sur son torse au travers du volet mal fermé, que j’essaie d’estomper à la pose de mon poignet.

   -Tu as bien aimé ? demande Kurt.

   -Evidemment que j’ai bien aimé.

Du doigt, j’entortille ses cheveux blonds.

   -Je t’aime aussi, dit-il un peu trop tard.

Il dépose une caresse poltronne à mon buste, comme s’il craignait le contact de nos peaux.

    - Au fait, je n’avais pas eu l’occasion de te le demander mais… tu te plais avec Basile, Sam et cetera ?

   - Oh, oui ! Franchement je les trouve vraiment super. Et puis je suis toujours avec toi au moins, c’est le principal non ?

   - Oui bien sûr… mais tu ne regrettes pas trop Anna ?

Ma question semble l’étonner. Je n’avais auparavant jamais parlé d’elle.

   -Bien sûr que si. Mais pourquoi t’en parles ? Je suis le plus grand des connards. Putain mais je m’entendais tellement bien avec elle, je ne me comprends  même pas. Comment j’ai pu la laisser, après tout ce qu’elle m’a confié sur son passé ?

  -Mais Kurt enfin calme toi. Tu es bien mieux avec nous non ?

  - Non. Je ne sais pas.

   -De toute façon c’est simple, c’est elle ou moi. »

Il se rhabille rapidement et s’en va, sans même un au revoir.

Je suis tellement bête. Qu’est-ce qu’il y a de plus stupide que d’imposer un dilemme à la personne qu’on aime ? Je ne connais Kurt que depuis si peu de temps… comment ai-je pu avoir l’audace d’anticiper ses choix, persuadée qu’il me choisirait ? Non, c’était impossible. D’autre part, comment pourrait-il préférer une pauvre pommée à une toute une troupe d’amis ? Je ne comprends pas comment Kurt peut l’apprécier. Elle n’est pas méchante c’est vrai, d’ailleurs elle est la seule à m’avoir offert un cadeau le soir de mon anniversaire... Mais elle est sur un autre monde, une petite planète aux entrées réduites.

Je saisis mon portable, posé sur ma table de chevet et appelle Blanche.

« Hello ! Alors comment ça s’est passé avec Kurt ?

   -Super.

   -Ah bah tant mieux je suis contente pour toi.

   -Mais j’ai un problème.

   -Ah bon ? Explique-moi.

   -J’ai parlé d’Anna à Kurt… et il était tellement énervé qu’il s’est barré… il regrette de s’être éloigné d’elle.

   -Ah bon…

   -Je ne veux pas  que cette pute gothique malade mentale n’approche de lui.