La poussière s'éleva au moment où le drap blanc glissait du meuble en bois d'acajou. Elle s'éparpilla en un nuage de particules qui virevoltèrent lentement entre les faibles rayons de soleil. Pansy recouvrit ses narines avec sa main gantée, pressentant l'éternuement sous ses yeux brûlants. Mais non, rien. Après une minute d'immobilité, la jeune femme reprit son entreprise. Des chandeliers en argent reprirent vie après des années d'oubli. Les tableaux se réveillèrent doucement, les rideaux s'écartèrent pour laisser la lumière vive du jour emplir la pièce.
De temps en temps, un sortilège murmuré brisait le silence solennel qui régnait en maître. Mais le manoir restait plongé dans un deuil qui ne semblait jamais vouloir partir. Après plus de deux heures de chantier, le salon avait retrouvé un peu d'éclat, même si ses murs restaient ternes et froids. Comme ils l’ont toujours été, pensa Pansy amèrement. Elle ne s'attarda pas sur ce détail. En revenant ici, elle s'était promis de ne pas repenser au passé, de rester lucide, objective. Elle s'y tiendrait. Comme elle avait toujours su le faire.
Elle monta les grands escaliers en pierre sculptée. Ses talons claquèrent sur la roche froide et cogna les murs pour s'en aller loin derrière elle. Pansy s'engagea dans un couloir, puis encore un autre, ignorant les voix des tableaux qui se plaignaient derrière les draps blancs. Sa mince figure s'immobilisa devant une porte, d'apparence ordinaire, mais qui portait tout son sens aux yeux de la jeune femme. Le cuir de son gant grinça autour de la poignée. Elle hésitait, se pinçait la lèvre et tentait de trier ses milles doutes qui ressurgissaient dans sa tête. Oui, elle pouvait le faire. Elle n'allait pas reprendre le manoir sans ouvrir sa chambre. N'était-elle pas revenue dans ce but ? Refaire un saut dans le passé, souffrir une dernière fois et oublier, tout recommencer. La vie de Pansy était ainsi ; un va-et-vient incessant entre la gaieté et la douleur, la vie et l'enfer. Pansy elle-même était ce va-et-vient, un chaos intérieur que son existence n'avait fait que nourrir, grandir jusqu'à ce qu'elle finisse par exploser. Elle secoua vivement la tête, chassant ainsi toutes ses pensées. Puis elle tourna la poignée.
Tout était exactement comme avant. Tout était resté à sa place, au même endroit. Comme s'il ne s'était rien passé depuis le moment où elle avait claqué la porte de sa maison jusqu'à aujourd'hui. Le temps s'était immobilisé dans cette pièce trop grande, trop vide, sans âme. Le lit à baldaquin se tenait toujours là, au milieu, recouvert de draps vieux de dix ans. Il y avait encore, posé sur son fauteuil de velours vert, son écharpe verte et argent de Poudlard. Des affaires éparpillées ici et là, émanant un sentiment de regret et d'oubli, vestige d'une adolescence douloureuse et chaotique. Pansy s'avança au milieu de ce désordre, le visage impénétrable mais le cœur serré. La poussière avait eu raison de ce lieu, comme partout dans cette demeure. Personne ne s'était embêté à protéger le tout de tissu, non. On avait délaissé cette pièce comme on l'avait délaissée elle. Cela ne l'étonnait guère, après tout. Le cas contraire l'aurait surprise.
Le parquet grinça sous son poids. Il semblait vouloir se fendre à tout moment tellement il était usé. Pansy passa un doigt sur le meuble en bois de chêne, laissant derrière une trace plus sombre, dépourvue de couche grise. Devant son regard inexpressif étaient posés des cadres aux photos jaunies par le temps. Sur une d'entre elles, Daphné, Camille, Millicent et elle-même souriaient sur un banc de l'école. C'était un temps où elle était heureuse. Cette année où la vie lui avait fait goûter au bonheur juste avant de le lui arracher de nouveau et entraîner sa chute. Et en observant cette photo, ce bonheur lui manquait. Mais son visage demeura froid et stoïque. Comme insensible à toute forme de pensée, comme résistant à la vague d'émotions qui tentait en vain de percer ses hautes murailles. Elle avait tenu dix ans. Ce n'était pas le moment de s'effondrer. Non, pas encore. Bientôt mais pas encore.
Elle arracha son regard de la photo et se dirigea vers la bibliothèque. Elle n'avait même pas lu la moitié des livres rangés ici, et pourtant, elle était une excellente lectrice. La bibliothèque occupait le pan de mur entier, dans toute sa longueur et sa largeur. Pansy adorait l'observer, se croire un siècle antérieur où les femmes se vêtissaient de grandes robes en dentelle. Elle avait toujours aimé l'histoire, mais bien sûr, personne ne le savait. Personne sauf une, cette personne que Pansy avait voué tous ses efforts pour l'oublier. Pour rien, au final. La douleur ne s'oubliait jamais, et cette personne était le couteau qui s'enfonçait dans le coeur et ne se retirait jamais.
Elle parcourut du regard les titres qui se présentaient sur chaque reliure de cuir. 'Dans les champs du bonheur' de Lola Benkins, 'Une étincelle de vie' de Reyre Ackson et quelques livres moldus comme 'Les Hauts de Hurlevent' et 'Anna Karenine'. Emily Brontë, Tolstoï, Jane Austen... Les romans moldus étaient malheureusement les meilleurs. Elle les avait pris dans une maison abandonnée du quartier non magique de Londres et leur avait jeté un sort de désillusion pour les cacher, un sort qui s'était dissipé avec le temps. Non pas qu'elle admirait les moldus, mais elle lisait leurs œuvres de manière objective, les jugeant pour leurs mérites et non pour leur nature. Le reste du monde non magique la désintéressait du plus haut point. Mais cela, ses parents n'auraient pas compris, aussi s'était-elle efforcée de maintenir ces chef d'œuvres dans l'ombre.
En inspectant sa bibliothèque, elle tomba sur un titre qui lui glaça le sang. Trop de souvenirs ressurgirent de l'oubli, c'était trop, beaucoup trop. Elle détourna les yeux mais les reporta aussitôt, comme irrésistiblement attirée par les lettres dorées inscrites sur de la reliure rigide.
Les Fleurs du Mal.
Baudelaire.
Pansy posa une main sur ses lèvres pour ravaler ses larmes. Il fallait qu'elle tienne le coup. Il le fallait. Mais comme si le monde entier cherchait à la faire souffrir, elle découvrit juste à côté un petit carnet aux pages décollées, replié sur lui-même et jauni par les années passées. D'une main tremblante, elle le retira de l'étagère et défit les lacets qui le scellait. Son esprit lui hurlait d'arrêter, de reposer immédiatement ce carnet, repartir, tout laisser derrière elle et ne plus jamais revenir. Elle avait bien été capable de le faire une première fois, alors pourquoi pas une seconde ? Mais son esprit, en cet instant même, semblait être totalement déconnecté de son corps. En l'ouvrant, les pages craquelèrent et se décollèrent une à une, plus fragiles que des feuilles mortes. Dix ans passés ainsi, exposé aux caprices du temps, et voilà à quoi ressemblait un simple journal.
Une écriture cursive et droite ornait le parchemin. Quelque chose tomba du livre et se posa avec tendresse au sol. Surprise, Pansy s'accroupit pour ramasser l'objet. Ses yeux s'écarquillèrent. C'était une rose noire séchée, écrasée et plate, morte, craquelée. Les épines avaient déjà été coupées. Elle se releva et déglutit difficilement. Elle pouvait le faire. Se replonger une dernière fois dans le passé, se redécouvrir à travers un journal qu'elle avait tenu adolescente... Peut-être cela lui permettrait-il de revivre un court instant, se remettre dans la peau d'une jeune fille emplie d'espoir.
Ses yeux noirs se posèrent sur les premières lignes, et alors, son esprit entier se concentra sur ces mots à l'encre noire.
25 septembre 1995,
C'est la première fois que je décide de tenir un journal. J'ai pourtant tellement de choses à dire que je serais capable de le remplir en quelques heures seulement. Le cours d'histoire d'aujourd'hui a été si excitant, non pas par ce que Binns nous a expliqué, mais par ce que Drago et moi avons fait...
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𝓝𝓸𝓼 𝓯𝓵𝓮𝓾𝓻𝓼 𝓸𝓷𝓽 𝓯𝓪̂𝓷𝓮́ [Dransy] - 𝔒𝔲𝔯 𝔖𝔢𝔯𝔦𝔢𝔰 ✔
FanficPansy Parkinson avait toujours craqué sur Drago Malefoy, et elle ne le cachait pas. Poser des lèvres sur les siennes était son plus grand désir, se voir aimée en retour faisait parti d'une illusion idyllique dans laquelle elle aimait se plonger. Ma...