Les roues du véhicule crissent dans la neige, si blanche au milieu de la cité noire. Il n'y a plus personne dehors, les rues sont vides et le monde est silencieux. Tout est mort ici.
L'aérbus nous lâche à la sortie de la ville, alors que les immeubles commencent à se faire petits derrière nous. On marche jusqu'à trouver un parking pratiquement vide. Il n'y reste plus que trois voitures, dont seulement une pleine. Madeleine s'empresse de l'ouvrir, trafiquant les câbles sous nos regards surpris. A peine avons-nous quitté la ville que nous nous trouvons déjà tout à l'ouest du pays. Les phares éclairent la route presque invisible sous la poudre glacée, l'hiver est là.
On tombe en panne à moins d'un kilomètre de la zone blanche. On abandonne la voiture dans la neige, et on se met en marche. Quand on quitte définitivement la Chine, le tapis blanc a fondu autour de nous. Le jour s'est levé, entraînant avec lui une hausse de la température. L'horizon commence peu à peu à changer et à mesure que nous nous approchons des frontières, l'herbe gelée cède la place aux pierres grises. Les roches se succèdent dans le paysage, mètre après mètre, un pied devant l'autre. A la fin de la journée, le désert s'étale devant nos yeux, le soleil nous accablant de sa chaleur. Si l'hiver adoucit nos tourments durant la journée, la nuit cependant, est infernale. L'air se refroidit brusquement dès que le soleil disparaît à l'horizon, et il faut au moins trois couvertures pour ne pas mourir de froid. Quelques fois, quand on se réveille, on se sent même plus nos membres.
Au matin du cinquième jour, on voit apparaître entre les pierres le début de notre pire cauchemar : le sable. Brillant d'un doré sans éclat, il serpente et s'élève en dunes éphémères. Mais la pire mesquinerie du désert, c'est sans aucun doute le vent. Alors que l'on se couche le soir, entourés de ces confortables remparts de poussière, il profite de notre sommeil pour souffler sur les grandes dunes qui, mensongères, se déforment. Au matin, le paysage a changé et il faudrait un génie ou bien une boussole pour retrouver d'où l'on vient.
Au dixième jour, je perds le compte, je me demande si je reverrai jamais celle que j'aime le plus au monde. Nous avons trouvé quelques rares étendues d'eau, mais la nourriture commence à manquer cruellement. Les talents de Marco nous ont été bien utiles quand il a fallu attraper des lapins dans leur terrier, mais les animaux sont trop rares pour être une source d'approvisionnement stable. Comme si ça n'était pas suffisant, tous les soirs, les cris d'un millier de bêtes sauvages retentissent sur le sable, comme une promesse de mort.
Hier soir, au moment où nous allions nous coucher, un bruit terrible a retenti près de nous. Un grognement sourd provenant de derrière une dune, vibrait dans le silence de la nuit. Et puis tout à coup, jaillissant du sable, un monstre de poils et de crocs avait surgi à moins de dix mètres de nous. Alors qu'il s'apprêtait à bondir, une explosion l'avait projeté dans les airs. Une mine laissée là des années auparavant avait refait surface sous ses pattes.
Je ne sais comment nous avions accompli jusque-là le miracle de ne pas nous faire tuer par ces bombes, mais ce soir-là nous ne nous sommes pas réjouis une seule seconde. Assis autour du feu, nous avons mangé les restes de l'animal dans le silence habituel. C'est Madeleine qui l'a rompu.
« - Est-ce qu'on va vraiment y arriver ? Sans vivres, avec peu d'eau et des mines sur lesquelles on peut marcher à tout moment ?
- Je ne retournerai pas en Chine Madeleine. Même si je devais en mourir, je traverserai ce désert. je n'hésite pas un instant, j'ai toujours su.
- Revenir me semble aussi dangereux que continuer maintenant... Il faut prier. affirme Elika.
- J'irai ou vous irez, finit Marco, et Michaël approuve d'un signe de tête.
Madeleine soupire avant de sourire doucement.
- Alors c'est le moment de se dire qu'on s'aime non ? Quoiqu'il arrive... »
Et les miracles arrivent.
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Voilà le chapitre 9 ! Je sais que je publie un peu tard mais je suis sur le point de mettre en ligne une autre histoire (dans un genre totalement différent). La semaine prochaine il se peut qu'il n'y ait pas de chapitre si je me décide à la mettre (ce qui n'est pas gagné...)
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Gravity Games
ParanormalQuand les lumières s'éteignent, quand les yeux se ferment, il est toujours plus difficile d'imaginer l'avenir. Que faire, alors, quand les lendemains se brouillent soudainement ? Moi, j'ai fait comme j'ai pu, rêvant pour l'éternité à ces lendemains...