17. KOGURYO

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JEON WOONG :

J'ai l'impression de m'enfoncer de plus en plus dans un gouffre. Je ne pourrais plus remonter à la surface. Je suis anéanti pour ce sentiment étrange qui me dérange, le pressentiment. Exactement comme quand Ae-hwa a été retenue prisonnière. Ce mauvais présage qui me fait courber l'échine est très dévastateur. Mon moral est très bas. Je viens de voir périr des compagnons de guerre sous mes yeux, sans rien pouvoir y faire. C'est la dure loi de la guerre, les plus forts s'en sortent, pas forcément les plus courageux. Je suis déçu de l'issue de ce premier affrontement. Il est clair que nous ne parviendrons pas à tenir longtemps ainsi. Nous devrons envisager une nouvelle stratégie.

Les renforts arrivés depuis une heure écoutent les consignes de mon second. Ce sont tous de jeunes hommes comme moi, dans la fleur de l'âge, j'ai des remords de les envoyer au front, sachant que beaucoup d'entre eux, ne reverront jamais leurs enfants, femmes, parents......

Je n'ai pas décidé cela, nous le subissons pour notre liberté. Ce prix est cependant très cher payé. Je n'accepte pas les pertes humaines, même si j'ai connaissance qu'elles existent dans tous les conflits. Il y a toujours des personnes pas directement concernées qui doivent en payer le prix. La dynastie des Tang a mis un point d'honneur à vouloir posséder les trois royaumes. Leur impudence pourrait leur nuire dans la mesure où ils se croient plus forts et plus entraînés que nous. Ils n'ont pas tort, mais, on va les défier en premier.

Nous enfilons les habits noirs que porte la milice chinoise. Notre objectif est d'atteindre le général Li Shiji. Si nous capturons le chef, il sera plus facile d'agir et de frapper par la suite. Vingt de mes hommes sont ainsi déguisés. Daehwi a souhaité m'accompagner dans cette intrusion parmi les chinois. Je n'ai pas eu le courage de lui refuser. C'est à nouveau ensemble que nous allons mener ce combat, un des plus difficiles que nous ayons eu à endurer.

Comme je le pensais notre arrivée ne surprend personne, de la garde du général aux habitants. Cette milice est connue et craint. Personne n'ose la déranger. Ce qui nous permet de progresser sans peine dans la rue principale de Wandu. Les femmes font le marché, accompagnées de leurs suivantes. Les portes s'ouvrent devant nous. Mais, j'ai un mouvement de recul. Pourquoi j'ai l'impression que nous circulons volontairement sans rencontrer de problèmes ? Je me demande si ce ne serait pas un guet-apens ?

J'ai à peine fini ma réflexion que nous sommes cernés par les hommes du général. Je les observe un par un, ils sont assoiffés de combats. Ils n'attendent qu'un ordre de leur supérieur pour nous attaquer comme des sauvages. A ce que je comprends, il avait planifié notre attaque surprise. Je serre les poings, ils voulaient nous piéger. J'ai été naïf sur ce point. Mon ennemi est bien plus intelligent que je le pensais. C'est maintenant que je comprends la raison de sa retraite, parce qu'il aurait pu nous attaquer à la frontière. Mon esprit est tourmenté par mes propres sentiments que je néglige mon rôle de protecteur de Silla. Je me le reproche.

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DAEHWI :

On nous a tendu un piège. Nous sommes cernés par beaucoup plus d'hommes que nous. Je jette un regard sur Jeon Woong, il semble réfléchir à une solution. Je sais ce qu'il doit faire, et franchement j'espère qu'il y renoncera. Il ne peut pas se rendre, ils vont le torturer.

« - Je suis la personne que vous voulez capturer ! Laissez les autres partir ! » Il propose.

Je ferme les yeux. Il devrait se taire, il est hors de question que je le laisse seul à la portée de ces truands.

« - Ce n'est pas moi qui prend cette décision ! Je vais demander à mon commandant. » Nous informe le garde ennemi.

Il s'absente quelques minutes pendant lesquelles nous restons sous la surveillance de la véritable milice. Le général chinois ne refusera pas ce sacrifice, ainsi il détient le général de notre armée. Non ! Nous serions très affaiblis sans compter la baisse de moral des hommes. Le haut gradé de la dynastie Tang sort de ses quartiers et avancent vers nous. Il a encore ce sourire sournois sur les lèvres.

« - Le général de Silla qui se rend ! » Il s'exclame triomphant sous les rires de ses partisans.

« - Non, ce n'est pas lui qui se rend, mais moi, je suis le cousin du roi de Silla ! » J'interviens.

Il pose ses yeux sur moi. Son sourire s'élargit.

« - Je vois que le nouveau roi de Silla a envoyé du beau monde pour nous combattre ! » Il ironise.

A nouveau, les hommes rient. Ils semblent s'amuser de nos difficultés. Puis, il réagit :

« - Tout bien considéré, je prendrais le général ! » Il tranche.

Je suis ennuyé par ce choix. Le regard menaçant que me lance Jeon Woong pour que je me taise finit par me convaincre de ne rien rajouter.

« - Enfermez le général dans le cachot ! Quant aux autres, retourner d'où vous venez avant que je change d'avis. » Il nous menace.

Pourquoi Jeon Woong se laisse capturer sans se défendre ? On dirait que son emprisonnement fait partie de son plan. Je doute, cependant qu'il aille jusqu'à cette limite pour tuer le général chinois.

Nous retournons vers la frontière. Je laisse les hommes sur place et je pars seul prévenir Woojin de la situation. A mon arrivée, je descends de ma monture et court pour me rendre à l'intérieur des quartiers royaux. Je me fais annoncer, et le roi me reçoit Il congédie son épouse. Je la salue et retrouve mes esprits pour faire un point à mon cousin. Je lui raconte, le combat et l'inégalité des moyens. Puis, je lui fais part de la stratégie de Jeon Woong.

« - Il n'a donc pas eu d'autre choix que de recourir à ce dernier plan ! » Il constate.

Je l'observe abasourdi par sa réaction. Ils ont mis au point ce plan ensemble au cas où il n'y aurait pas d'autres alternatives. Je n'en reviens pas

« - Jeon Woong peut l'endurer. Nous n'avons pas d'autres choix, il faut s'infiltrer à l'intérieur de leur forteresse pour réussir à atteindre leur chef. » ll m'explique.

« - Mais, il risque sa vie ! Ils vont le torturer ! Comment peut-il se sacrifier à ce point pour le royaume ? » Je m'étonne.

« - C'est le devoir d'un guerrier ! » Ajoute le roi.

« - Je trouve cette stratégie cruelle ! » Je m'indigne.

« - L'infiltration chez l'ennemi, c'est son idée ! C'est le rôle du plus haut gradé de l'armée ! » Il poursuit.

Désabusé, je décide de rentrer dans ma chambre pour réfléchir à tout ceci.

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WOOJIN :

Je comprends le raisonnement de Daehwi. J'ai eu le même quand mon général m'a informé de son plan B. Mais, j'ai confiance en sa décision. S'il agit ainsi, c'est qu'il est déterminé à y arriver. La torture ne l'arrêtera pas. Mais, j'aimerais tout de même que cette guerre soit terminée et que mes amis soient à nouveau près de moi sains et saufs. L'impact de sa victoire aura pour effet double de récupérer Koguryo et d'empêcher les ennemis de s'emparer de notre royaume. Ils sont dans une phase de conquête et si personne ne les stoppe, nous allons devoir les servir, ou peut-être même qu'ils nous tueront. C'est ce raisonnement qui m'a permis d'accepter le sacrifice de mon bon ami.

Ce qui ne m'empêche pas d'être très inquiet pour lui. J'ai vu la colère à mon encontre dans les yeux de Daehwi, je ressens la même chose envers moi-même. Il est trop tard pour faire marche arrière, Jeon Woong est déjà leur prisonnier. Cependant, et j'en fais le serment, si la situation de mon général dégénère, j'interviendrais personnellement dans cette guerre contre les chinois.

Le calme est revenu dans mes quartiers. Ma reine est sortie avec sa servante. Je profite de ce moment de détente pour réfléchir à une opération de sauvetage. Jeon Woong m'a demandé trois semaines pour résoudre seul ce conflit. A l'issue de ces trois semaines, s'il n'est pas revenu, je ferais le nécessaire pour les chasser moi-même de nos terres, et celles dont nous devons hériter. Ma tête est douloureuse, je dois résoudre tellement de problème. Le rôle de roi est très prenant et fatiguant. Yon Soo entre de sa promenade. Je la serre dans mes bras sans plus attendre. J'ai besoin d'elle. Notre relation s'est améliorée, nous sommes un véritable couple désormais. Je culpabilise. Comment puis-je être heureux alors que mon ami se sacrifie pour nous ? J'ai l'impression que je vais m'écrouler de fatigue. J'aimerais dormir. Mon épouse m'aide à m'allonger, et je ferme mes yeux. Je veux tout oublier, les peines, les guerres, les désirs de conquêtes dans les bras de la femme que j'aime. J'ai trop de pression à évacuer.........

Croire en l'amour / Jeon Woong tome 2 Saga AB6IXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant