☽ 𝑺𝒖𝒓 la presqu'île d'Atielle, une région de l'Oheïana, Kiara s'apprête à clore ses années à la Base, l'école militaire par laquelle tous les jeunes doivent passer. Son but : intégrer l'armée. D'abord, pour échapper à la vie de pêcheuse qui l'att...
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Le test. La dernière étape. L'épreuve finale pour quiconque souhaite poursuivre dans l'armée. Le dernier examen qui clôt de manière définitive nos années à la Base. Ce sont des années d'entraînement militaire, mais surtout de violence, de sueur et de coups. Ce n'est pas un endroit très joli, je n'y ai pas été très heureuse. Mais je m'y suis incontestablement endurcie. Parallèlement, la Base constitue également notre école, nous apprenons l'histoire, la lecture, l'anatomie lupine... La Base, c'est un passage obligatoire pour tous les gamins d'Atielle : on y entre à onze ans et on en sort neuf ans plus tard, à vingt ans. Toutefois, la procédure est un peu différente pour les orphelins, qui arrivent à sept ans : ils gagnent ainsi quatre ans d'avance sur les autres. Ce système est plutôt bien fait : ces quatre années supplémentaires servent à mettre au point notre technique, et le fait qu'elle ait été acquise très tôt permet aux orphelins de mieux réussir par la suite. Il y a ainsi la possibilité de connaître une ascension sociale.
Moi, je n'ai jamais perdu mon avance. Je me suis tuée à la tâche, j'ai travaillé, répété, persévéré, pour m'élever parmi les meilleurs. Car le plus souvent, les filles restent sur le banc de touche, dépassées par des hommes aux muscles saillants et à la carrure impressionnante. Et après, c'est une vie consacrée à la pêche - l'activité principale de notre région - qui les attend. Les gens d'Atielle sont des pêcheurs, et c'est ce qui fait notre renommée. Mais pour moi, la pêche n'a jamais été une option. Je veux partir, aller voir ailleurs, explorer les autres contrées de l'Oheïana. Je rêve d'aventure et d'émancipation, loin d'Alek, pour commencer une nouvelle vie, une vie qui m'appartiendrait. Alors au test, je brillerai. Avec un peu de chance, je rejoindrai un jour les rares divisions envoyées dans le reste de l'Oheïana. Pourquoi pas en Alkìne, une région réputée pour être la plus prospère depuis le Cataclysme. Et puis surtout, les Perdus y sont cantonnés bien en dehors, une véritable prouesse que seuls la presque-île d'Atielle et la région d'Alkìne ont réussi.
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Je termine ma tresse qui repose désormais entre mes omoplates, ajuste mon débardeur et m'assure que mon pantalon en tissu est suffisamment ample pour que je ne sois pas entravée dans mes mouvements. J'affronterai mon premier adversaire dans une heure. D'ici-là, j'ai tout mon temps pour me préparer mentalement dans la petite pièce qui me sert de chambre depuis treize ans. Cette pièce m'a véritablement vue grandir de l'enfant à la femme que je suis aujourd'hui. Elle me sert de refuge, de lieu de réconfort, mais je n'éprouve aucune tristesse à la quitter aujourd'hui. J'ai tout rangé, et absolument rien ne traîne. Mon lit est dépourvu de draps, mon bureau de papiers et de livres, le carrelage est immaculé, et toute ma décoration a rejoint un carton dans un coin de la pièce, prêt à être jeté. A l'intérieur se trouvent tous mes petits flacons remplis de sable, des hameçons, ma canne à pêche. Des tas de souvenirs que je juge préférable de faire disparaître. Ma vie à la Base est désormais derrière moi.
Mes yeux marron-vert s'arrêtent longuement sur ma canne à pêche, objet qui renferme le plus de souvenirs. En même temps, elle me suit depuis toujours. Combien de poissons ai-je pêché avec ? Et comment ferai-je demain, sans elle ?
