Trois ans et demi plus tôt...
— Et là, tu as les clés de la 3ème compagnie. Ils ont fermé pour la période des vacances scolaires, mais le commandant d'unité vient régulièrement percevoir le trousseau pour travailler.
Désignant l'enveloppe posée sur l'étagère de l'armoire forte, un bras bronzé à la musculature développée passa sous son nez. La jeune femme fit un bond, manquant de se cogner dans la lourde porte métallique et pivota vers son interlocuteur. Elle émit un petit rire nerveux.
— Vous m'avez fait une de ces peurs !L'homme serra les lèvres, avant de reculer pour lui permettre de se dégager. D'un mouvement rapide, il balaya d'un geste de la main l'ensemble des écrans sur lesquels étaient affichés les plans des bâtiments. Le tout reliait les alarmes à la vidéosurveillance placée à proximité de l'armurerie centralisée et de la soute à munitions.
— Tu connais leur fonctionnement ou tu as besoin que je te montre ? soupira-t-il, cette fois ostensiblement excédé.
Sandrine fronça les sourcils, contrariée par le ton méprisant employé, et marmonna spontanément :
— J'ai l'air si conne ou quoi ?
Le bras toujours tendu, l'adjudant-chef lui décocha alors un sourire qui n'avait rien d'amical.
— Si tu veux désactiver les alarmes intrusion, LOL, je te suggère de taper le code inscrit à côté du boîtier, PTDR !
Puis le sourire sans joie s'éteignit, laissant place à une expression farouche. Le regard vert perçant ne lâcha pas la jeune femme. Mortifiée, Sandrine bafouilla :
— Dé-dé-désolée, je connais déjà ce matériel.Cataloguée dinde stupide et bégayante en deux phrases. Ça, c'est fait !
Un fard lui réchauffa les joues. Depuis qu'elle avait mis les pieds dans le service de permanence, la jeune femme faisait tout de travers. Elle sursautait comme une collégienne, rougissait comme une pucelle, et surtout, venait de se mettre à dos un supérieur en exprimant tout haut ses pensées.
L'univers punit ma niaiserie ! Et maintenant, je fais quoi ?Concentrée sur son monologue intérieur, Sandrine se passa une main sur le visage en signe de désespoir. Il était si impressionnant qu'elle en perdait même ses mots. Tentant de cacher son désarroi sous une couche de professionnalisme, elle reprit d'une voix plus calme, devant l'homme qui la regardait s'agiter avec une certaine perplexité.
— On enchaîne si vous voulez bien ?
— Tu t'y feras, fit-il, soudain radouci.
— Probablement.Elle vit arriver la fin des consignes avec soulagement. Le type était si froid qu'il aurait gelé la banquise en s'asseyant dessus !
Mais qu'est-ce qui m'arrive ? Pourquoi un tel stress ?
En pénétrant dans le local un quart d'heure plus tôt pour prendre la relève, elle avait manqué s'étouffer en croisant le magnifique regard de l'homme qu'elle venait relever. Dix minutes plus tard, elle s'étranglait juste de honte. L'adjudant-chef en question, un géant blond à l'allure énergique l'avait accueillie sans chaleur mais poliment. Puis il avait suffi d'une phrase un peu vive pour qu'il se transforme en givre humain.
Elle soupira en prenant possession des locaux. Un coup d'œil vers le sergent-chef censé lui tenir compagnie lui apprit qu'elle allait enchaîner une journée de monologues intérieurs. Seul le son assourdi du portable qu'il maltraitait en jouant à Candy crush résonnait dans la pièce. La jeune femme soupira de nouveau, puis posa ses affaires dans la chambre qui lui était réservée. Sa tablette à la main, elle finit par s'installer dans un fauteuil près des ordinateurs et attaqua sa lecture.Les mains à plat sur le carrelage pendant que l'eau chaude délassait son dos mâché par le matelas inconfortable de la permanence, Joffrey grogna de mécontentement une nouvelle fois. Il lui restait une petite demi-heure avant de retourner à son poste, or il ne parvenait toujours pas à contrôler les effets de cette rencontre inattendue.
— Qu'est-ce qui m'a pris, bon sang ?
Posant le front contre les carreaux pour en absorber la fraîcheur, il murmura en glissant la main vers son bas-ventre tendu :
— Putain, qu'elle sentait bon.
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Cœur d'homme, âme de soldat 5 : Là où tout a commencé
Romance« Une figurante n'a pas le droit d'afficher des émotions trop complexes. Au mieux, on lui prête une histoire tragique dont on se sert à titre d'exemple. Au pire, sa vie est si terne qu'elle meuble juste l'espace au sein de l'intrigue principale. » S...