Partie 3

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Sans surprise, Amandine m'avait devancée et occupait Mico le temps que je finisse de rassembler mes affaires. Mico et moi ne serions pas retournés chez moi, si je n'avais pas oublié ma rédaction d'anglais. C'était le sujet du cours de ce soir-là, impossible donc de la laisser tomber.

—Pourquoi vous ne restez pas travailler ici ? s'enquit ma belle-mère, Carole.

Je m'effrayai une seconde de la voir sur le palier, avant de froncer les sourcils. Qu'est-ce qu'elle me faisait soudainement ? Cela faisait trois jours que je m'éclipsais jusqu'à vingt heures chez Mico. Sa remarque, elle aurait pu la faire avant.

—On ne dérange personne chez lui et il préfère de toute manière.

« Une certaine sangsue ne peut pas le suivre là-bas », terminai-je mentalement. Ma charmante belle-mère me sourit et je sentis le coup foireux. La connaissant, dans trois minutes, elle me suivrait. Cela ne manqua pas. Lorsque je descendis, elle fit mine d'apparaître par hasard trente secondes plus tard. Mico la salua poliment, mais je compris à son regard sur moi que lui aussi sentait l'entourloupe.

—Je vous vois discuter depuis un moment. Tu veux entrer ?

Ah, l'innocence de la proposition ! Elle obtiendrait que nous restions et pourrait même l'inviter à dîner ensuite. Il serait si impoli de le laisser rentrer le ventre vide alors qu'il aidait sa belle-fille.

—On doit travailler, Mia et moi, mais merci.

Son sourire était si chaleureux que je me dis que l'excuse l'arrangeait véritablement. Mon véto sur la rousse en était-il la cause ?

—Je comprends. C'est gentil de l'aider.

—Je m'en sors, moi, assura fièrement Amandine.

Ses pupilles vertes ne quittaient étrangement pas mon professeur particulier, pas une seconde. Elle m'exaspérait d'autant plus.

—Heureusement, Mico ne pourrait pas se couper en deux ! me moquai-je.

Le beau regard d'Amandine s'assombrit. Elle mordit sa lèvre pour ne pas m'insulter. Je l'avais prévenue que je ne l'aiderais en rien avec Mico, sans lui avouer que j'étais une rivale. Elle serait capable de le clamer à mon nouvel amoureux, je n'avais pas besoin de cela pour mettre de l'ordre dans mes pensées.

—Je reviens pour le dîner, annonçai-je avant de partir avec Mico.

Celui-ci posa une main sur mon épaule à peine quelques pas effectués.

—Pff, elles m'horripilent toutes les deux.

—Allez, allez. Je suis de ton côté, moi.

—Le jour où tu acceptes sa proposition, je t'étripe, le prévins-je.

—Reçu cinq sur cinq !

Nous arrivâmes chez lui et commençâmes à travailler sans plus attendre. Je préférais bosser les matières littéraires avec lui, parce qu'il n'avait pas besoin de se pencher vers moi. J'étais donc plus concentrée et efficace.

Pour commencer, il lut intégralement ma dissertation, puis la reposa devant moi et se mit à me questionner. « Pourquoi ai-je mis un -s ? » « Pourquoi ai-je utilisé ce temps ? ». Pourquoi, encore et encore.

—Parce que ça sonne bien ?

C'était la... trentième fois que je le lui disais. Il commençait à s'exaspérer que je m'entête sur ce point. Je fonctionnais cependant à l'oreille, ne connaissant pas vraiment les règles. Il s'évertuait à me les rappeler lorsqu'il soulignait mes erreurs.

—Tu ne m'écoutes plus, murmura-t-il.

Son souffle m'atteignit et je sus qu'il avait commis l'erreur de tous les jours : s'approcher plus près de moi. Je déglutis avant de me tourner vers lui, les joues gonflées.

—Tu ne m'auras pas comme ça, me prévint-il.

Je repris une attitude normale, bien qu'il me déstabilisait. C'était incroyable, car il parvenait à n'être qu'à quelques centimètres de ma personne sans faillir. Je commençais à avoir chaud, moi.

—Oh, salut, les petits !

Je sursautai tandis que mon voisin riait.

—Vous révisez beaucoup trop ! remarqua Ophélia en avançant dans la pièce.

Elle débarquait avec un excellent timing, je dois dire !

—Tu rentres déjà de la fac ? lui retourna son frère.

Moi aussi j'étais perplexe, elle n'arrivait jamais avant 19h30.

Un rire la prit, puis elle désigna la montre accrochée au mur.

—Déjà 19h45 ? soufflai-je.

C'était le pouvoir de Mico : le temps passait extrêmement vite en sa présence, qu'importe ce que nous faisions.

—Ne sois pas trop déçue, Mia, plaisanta la plus âgée.

Elle me fit sa bouille toute mignonne et j'eus envie de lui tirer les joues. Ophélia avait beau avoir trois ans de plus que nous, elle irradiait de mignonnerie. Elle restait perspicace et taquine envers son frangin bien-aimé.

—Rien n'est prêt, mais tu veux rester dîner ? me proposa l'étudiante. Je suis sûre que Mico se surpasserait pour toi, finit-elle avec un clin d'œil.

—Ce serait un plaisir, mais...

J'avais très envie de rester ici. Ophélia était la sœur que je n'avais pas, tout le contraire d'Amandine. Et les parents de Mico m'adoraient depuis toujours, à l'opposé de ma belle-mère donc.

—Mauvaise idée, acheva mon voisin. Je ne pourrais pas me défiler si madame parfaite souhaite me retourner la pareille.

Je soupirai, entièrement d'accord avec lui.

—Désolée de te décevoir, Ophélia.

—Tu n'as qu'à être officiellement invitée à dîner.

Elle avait toujours réponse à tout !

—Vendredi soir, par exemple. Je finis la fac tôt, vous les cours et vous n'allez quand même pas encore bosser, si ?

—Je comptais attaquer la physique, m'avançai-je.

—Ah !

Cela sonnait davantage comme une menace de sa bouche.

—Mais on peut le faire avant que t'arrives, rebondit Mico.

—J'aime mieux ça !

Je secouai la tête, amusée.

—Je compte sur toi pour être là, Mia !

—Sans faute, puis vous connaissez mon adresse.

—Oh, grand Mico, raccompagne cette charmante damoiselle à présent.

Celui-ci s'exécuta tandis que la sœur m'adressait un clin d'œil.

—Tu penses que c'est vraiment une bonne idée ? m'inquiétai-je. Carole pourrait en profiter.

—C'est Ophélia qui t'a invitée, parce que tu es son amie.

—Le meilleur, vraiment !

Amitié ambigüeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant