Partie 9

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Une semaine plus tard, je n'étais pas le moins du monde remise de cette mésaventure. J'avais failli jeter tous mes joggings et tous mes t-shirts troués, ma mère m'avait arrêtée en me demandant ce qui se passait. Elle avait beaucoup ri, tout en me faisant comprendre qu'il y avait pire. Bien évidemment qu'il y avait pire, mais ça m'était arrivé à moi. En plus de ça, je n'avais toujours pas trouvé de cadeaux pour Mico, son anniversaire était pourtant cinq jours plus tard. J'étais trop mauvaise pour ce genre de choses.

A bout de souffle, je m'arrêtai de nager. J'avais compris que pour oublier cette tragédie, il me fallait me dépenser. La nage était excellente pour la santé et me vider de mes forces, c'était donc le parfait sport ! J'occupais donc la piscine de Eva, sans personne pour me déranger.

Fatiguée, je lâchai un instant le bord et faillis couler lorsqu'une main me rattrapa de justesse.

—Eh ben, heureusement que je suis là.

Thibault me souriait chaleureusement. C'était pourtant la première fois qu'on se revoyait depuis sa déclaration.

—Merci, chuchotai-je.

—Qu'est-ce qui ne va pas ? interrogea-t-il.

Je soupirai avant d'essayer de me hisser sur le bord. Etant un flop, j'empruntais les escaliers en attrapant au passage ma serviette. Je n'avais jamais eu aucun problème à me montrer en maillot avant ce jour-là. Les dures lois des amours non partagés.

Je m'assis à côté de lui, trempant mes pieds dans l'eau.

—Je me suis tapée la honte de ma vie, lui répondis-je finalement.

—Ah, toujours bloquée sur lundi dernier ?

Il était le mieux placé pour comprendre mon désarroi, même si j'en faisais peut-être un peu trop.

—Je ne vois pas le problème, Mico t'a déjà vu pleins de fois en maillot, c'est pas bien différent.

—Bien sûr que si ! m'enflammai-je.

Il me lorgna, l'air de me dire « Ah, oui ? » et j'abdiquai presque aussitôt.

—D'accord, objectivement, c'est la même chose. Subjectivement, pas du tout !

—Mico n'est pas de ce genre.

—Qu'est-ce que tu en sais ? répliquai-je.

—En début d'année, il était avec Maya et figure-toi que plus elle se maquillait et faisait d'effort, moins il aimait.

—Oh, vraiment ?

Voilà qui effaçait toute ma rancune envers mon paternel. Thibault savait me parler, c'était indéniable. Tout comme me dévisageait. C'était pour l'éviter que je n'étais pas revenue dans la maison et j'avais insisté auprès de Eva pour ne pas qu'il soit là cette après-midi-là. Il était évident que Thibault ne m'avait pas oubliée, même s'il agissait comme si rien ne s'était passé.

—Tu n'étais pas censé être là.

Il détourna le regard sur le bassin, puis sur la maison.

—Eva me l'a fait répéter tellement de fois que j'ai changé d'avis. Elle a trop insisté pour avoir la maison à elle et je me demandais ce qu'elle préparait.

—La curiosité est un vilain défaut, mon cher.

—Totalement assumé, ma petite, rit-il.

Il redevint sérieux tandis que je ne savais plus comment rebondir.

—J'ai toujours dragué Ga-Eul juste comme ça, parce qu'elle était là et moi aussi. C'est elle qui m'a proposé de jouer le jeu en comprenant. Et... je crois bien qu'elle m'intéresse finalement.

—C'est une super nouvelle ! m'enthousiasmai-je avant de redescendre.

Il n'était pas très certain, c'était presque comme s'il tentait de se convaincre. Est-ce qu'il essayait juste de revenir à avant ?

—Je vous ai toujours vus ensemble vous deux, vous formeriez un couple vraiment top.

—Merci. Je ne sais pas trop pour l'instant, mais j'y réfléchis.

C'était déjà mieux que rien, il allait de l'avant. A mon tour de le faire.

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Il était samedi soir, la veille de l'anniversaire à Mico. Je débarquais chez lui pour l'aider le lendemain matin à tout préparer. Sur son invitation, il avait noté que le thème était « vêtements confortables et troués ». J'hésitais toujours entre croire à la blague et le prendre au sérieux. Dans le doute, j'avais emmené deux tenues différentes.

—Wow, c'est super silencieux.

C'était ce qui me frappa le plus lorsque j'entrai. D'habitude, Ophélia déboulait ou s'animait dans sa chambre. En tout cas, sa famille était vivante et il était rare d'avoir un silence aussi absolu.

—Ophélia est resté chez Aron et mes parents sont partis.

—Ils sont trop cools.

Il rit, amusé que je ne sois toujours pas habitué à cela.

—Tes parents aussi le sont, non ?

De manière bien différente, hélas.

Le lendemain, le réveil sonna tôt. Mico était déjà à la cuisine, préparant le petit-déjeuner. Ah, qu'il était beau à s'agiter partout et à me sourire de si bon matin ! D'autant plus à mon superbe « Joyeux anniversaire » chanté l'esprit embué par le sommeil. Lorsque je m'assis à table, je remarquai le post-it sur le frigidaire.

—« N'oublie pas de manger sainement. » lus-je à voix haute.

—Vieille habitude, commenta-t-il.

—Moi aussi, ma mère me laisse ce genre de message. Enfin, c'est surtout quand elle voit qu'il n'y a pas de vaisselle dans l'évier alors qu'il y aurait dû.

—Jeûner est une très mauvaise idée, tu sais.

—Je ne jeûne pas, je suis simplement prise de la maladie de la flemme.

Il sourit, s'apprêta à me réprimander et je le taclai :

—Je préfère passer un coup de fil, ça dure un quart d'heure et fait tout autant le job !

—Ça, c'est parce que tu n'as pas l'habitude de manger fait maison. Les pros remarquent la différence, vois-tu.

Je ris avant de le presser. Il y avait beaucoup à faire pour préparer l'événement ! Tout en accrochant les banderoles et les ballons, je réfléchissais à quand donner mon cadeau. Avant, pendant ou après ? Le timing devait être parfait, sans quoi je serais déçue qu'il passe rapidement dessus. J'éliminais donc le « pendant ». Hors de question de le relayer mon paquet au même niveau que les autres. Moi, c'était du grand art !

L'arrivée de Eva et Nathan, les renforts, me convainquit de ne pas opter pour l'avant non plus. Je voulais que ce moment soit spécial, donc il ne fallait que lui et moi. C'était ainsi décidé : j'allais devoir patienter la fin de la fête, le soir, pour voir son regard s'illuminer devant tant de création.

Ce fut extrêmement pénible. Il était accaparé partout, et moi je ne parvenais pas à l'approcher. Je ne me souvenais que les fêtes d'anniversaire était aussi prenante pour le principal concerné !

Amitié ambigüeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant