12. Miroir de l'âme

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Une douce brise caressa sa peau, lui provoquant un frisson qui lui rappela à quel point il commençait à faire froid en ce tout début d'automne.

Les fines rainures argentées du grillage en face de lui entaillaient la ville et venaient briser en deux ce building à gauche, ou encore cette tour à droite.

Décidément, s'il n'y avait pas eu cette clôture entre eux et l'horizon, la vue aurait définitivement été parfaite.

Outre le paysage, il y avait aussi cette pression qui l'écrasait, Izuku avait l'impression que toute la partie droite de son corps était vulnérable. Rien qu'en y pensant, son esprit se reconnecta soudainement à la réalité et Izuku gratta nerveusement l'accoudoir de son siège avec son ongle.
Combien de temps s'était écoulé depuis qu'ils étaient ici? Une minute ? Trois peut-être ?

Malgré tout, Izuku n'arrivait pas à profiter de cet instant de silence, le stress alourdissait son mal de tête et son cœur pulsait tout proche de ses oreilles.
Au final, il ne savait même pas ce qu'il attendait, ou même s'il attendait quelque chose.

Il ouvrit la bouche, mais tous ses mots aux lettres mélangées moururent au bord de ses lèvres. Parce qu'en plus de ne pas savoir quoi faire et bien, il ne savait pas quoi dire.

Stressé et à la fois impatient, il attarda de nouveau son regard vers l'horizon, s'étonnant de pouvoir contempler le soleil sans avoir à plisser les yeux.

La brise sifflait juste devant lui, glissant le long du grillage, celui qui leur gâchait la vue. Il percevait à peine l'écho de la circulation en contrebas et s'il n'avait pas laissé son esprit se perdre parmi les sons qui l'entouraient, Izuku n'aurait sûrement pas entendu Katsuki soupirer à côté de lui.

Un souffle énervé, pressé, rempli d'appréhension. Impatient peut-être, du moins bien assez pour laisser Izuku s'angoisser encore plus, son index grattant de nouveau son accoudoir.

- Je sais pas comment te le dire.

Izuku se raidit de nouveau sur son fauteuil, ses roues grinçant légèrement sous son mouvement un peu trop brusque alors que Katsuki avait enfin brisé le silence d'une voix creuse.

Me dire quoi ?

Il avait cette question bien projetée dans l'esprit, il était prêt à délier sa langue pour la poser. Mais, alors qu'Izuku tourna la tête pour chercher le regard de son ancien ami, il laissa cette question s'égarer quelque part avec toutes les autres.

Katsuki avait le même regard que lui, perdu face à l'immensité de la ville.

D'un côté, ça lui rappelait étrangement le soir de leur examen au permis provisoire, celui où pour la énième fois, ils s'étaient cognés dessus. Mais d'un autre côté, c'était totalement différent, parce que c'était atrocement calme, atrocement lent.

- Tu te souviens du collège ?

Le cœur d'Izuku rata un battement. Une multitude de questions se construisait soudainement dans sa tête mais le désordre était tel qu'il fut incapable d'en sortir une qui paraissait intelligible ou même sensée.
Avec tout ce qui s'était déroulé depuis leur rentrée en seconde, le reste n'était plus sa priorité. Fut-ce même une priorité un jour.

Pourtant, même si cette période semblait lointaine, simplement l'évoquer l'effrayait, glaçait son esprit tout à l'intérieur d'un mur de déni.

Et aujourd'hui, alors qu'Izuku était quelque part sur le toit d'un hôpital un samedi soir, tout s'effondrait de nouveau sur ses épaules, brisant le mur.

Ça lui semblait remonter à tellement loin, pourtant s'il s'attardait sur la chose, c'était il y a seulement un peu plus d'un an. Maintenant c'était tellement différent, et il n'était pas sûr de vouloir discuter de ça.

Deux lits, une télé et un rideauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant