Chapitre 24

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Dans la chambre, j'attrape mon portable qui n'a quasiment plus de batterie. J'ai plusieurs appels en absence de Matt et un sms.

Matt: Sofia. Je me fais du souci, tu ne réponds pas à mes appels. J'espère que ça va. Rappelle-moi. Bisous.

Je n'ai pas envie de lui répondre, mais je ne veux pas qu'il choppe un ulcère à cause de moi. Matt est très protecteur avec moi. Il est un peu mon Dimitri de L.A., les sentiments amoureux en moins.

Moi: Je t'appelle demain, bisous.

Encore sous les effets des anti-douleurs, j'arrive à me déshabiller sans hurler. Je ne garde que mon t-shirt qui témoigne du carnage et ma culotte. Je remets mon attelle et me glisse sous la couverture. Izu me rejoint rapidement. Il se couche sur ma poitrine et je le caresse doucement. D'habitude les ronronnements de mon chat m'apaise, mais là, la douleur de mon cœur est si forte. Il faut aussi que je me prépare à ma discussion avec Matt demain. Je le connais, rien au son de ma voix, il va savoir que quelque chose ne va pas. J'entends des bruits de pas et fais semblant de dormir. Je sais que c'est Dimitri, mais je n'aurai pas la force de parler sans m'effondrer à nouveau. Je le sens qui se couche près de moi.

Dimitri: Je sais très bien que tu ne dors pas mon amour. Si tu n'as pas envie de parler, je le comprends, mais je suis là. Je serais toujours là dorénavant.

Je tends doucement ma main sous la couette et attrape la sienne pour entrelacer nos doigts. Dimitri se redresse un peu et dépose un doux baiser sur mes lèvres. Quelques minutes après, j'ai beau avoir les yeux fermés et chercher le sommeil, il me fuit.

Moi: Dim, mon cœur, tu dors?

Dimitri: Non mon amour.

Moi: Tu penses que je dois faire quoi? Pour mon père...

Dimitri: Je sais pas. Ce que je sais, c'est que si on sait qu'il est mort et l'état de faiblesse dans lequel on est tous les deux, c'est mort. On sera des cibles faciles. Et puis à part Vlad et Youri, je ne sais en qui je peux avoir confiance...

Moi: J'en reviens pas qu'autant d'hommes aient pu trahir mon père... De ce que j'ai pu entrevoir, il les traitait avec respect. J'ai toujours pensé que dans la mafia, on se serrait les coudes au sein de la famille.

Dimitri: Ton père était un excellent chef. Et oui, il traitait tout le monde avec respect, enfin sauf...

Moi: Ses ennemis.

Dimitri: Oui.

Moi: De quel part de marché parlait Boris?

Dimitri: Nous avons passé un contrat avec un important revendeur qui avant se fournissait auprès de la famille Kozar.

Moi: Revendeur de quoi?

Dimitri: Sofia...

Moi: Je veux savoir pourquoi mon père est mort et on a failli y rester.

Dimitri: D'arme. Des armes. La famille Antonov ne fait que dans le trafic d'armes. Ton père ne voulait pas entendre parler de la drogue ou de la prostitution. Ton père était un mafieux respecté, mais tout le monde savait qu'il avait le sens de l'honneur et un cœur. Contrairement à certain.

Moi: Mouais... je... je ne sais pas quoi faire. Quoi penser... Dim, je suis complètement perdue. J'ai perdu la seule famille qui me restait. J'ai tué deux hommes. Je ne pourrais plus me regarder dans le miroir. Je ne sais pas si je pourrais reprendre ma vie...

Je ferme les yeux et doucement je récite le serment d'Hippocrate. Celui qu'on fait avant d'avoir le droit d'exercer la médecine.

"Au moment d'être admise à exercer la médecine, je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l'honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J'interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l'humanité. J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n'exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences. Je donnerai mes soins à l'indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire. Admise dans l'intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçue à l'intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs. Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Je préserverai l'indépendance nécessaire à l'accomplissement de ma mission. Je n'entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés. J'apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu'à leurs familles dans l'adversité. Que les hommes et mes confrères m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonorée et méprisée si j'y manque."

Dimitri: C'est quoi ça?

Moi: Le serment d'Hippocrate. En prenant deux vies délibérément, j'ai trahi ce serment. Je ne suis plus digne d'être médecin.

Dimitri: C'était de la légitime défense mon amour.

Moi: Peut être, mais quand j'ai frappé cet homme avec le couteau, je savais très bien qu'en le touchant à la carotide, ça lui serait fatal. Et quand j'ai tiré su Stan, j'ai visé le poumon, sachant aussi très bien que ça le tuerai... Il y a sept ans, avant que mon père ne me force entre guillemets à partir à L.A. pour faire ma médecine, je me demandais si j'étais faite pour ça. Je me disais qu'avec mon Cv et ce que j'avais subi, j'avais plus la vie d'une mafieuse. Je savais que mon père allait me venger et donc tuer des gens et je ne m'en étais pas soucié. Et là, c'est moi qui ai tué des gens. Je me pensais différente, mais je me demande si c'est vraiment le cas...

Dimitri: Sofia, tu es une personne formidable. Oui, tu es différente. Si tu ne les avais pas tués, on serait peut-être mort à l'heure qu'il est. Et puis tu te sens coupable, ça montre à quel point tu es une fille bien. Eux n'aurait pas eu de scrupules à nous mettre une balle dans la tête. Je veux que tu arrêtes de culpabiliser.

Moi: Je ne sais pas si j'y arriverai un jour, et quoi qu'il en soit, il va me falloir du temps...

Dimitri: C'est normal.

Moi: Et toi?

Dimitri: Moi quoi?

Moi: Les gens que tu as tués, est-ce que tu y repenses?

Dimitri: Ca me hante tous les jours... Mais à la mort de mon père, quelque chose s'est brisé en moi. C'est comme si plus rien ne comptait... Ça ne m'empêche pas d'avoir des regrets.

Moi: Et c'est toujours brisé?

Dimitri: Oui et non. Il reste un vide, mais ton retour a réparé plein de chose en moi. Je vais te donner mon avis pour ton père. Je pense que dans un premier temps, on ne devrait rien dire. Le temps qu'on se remette physiquement et mentalement. Le temps qu'on décide si notre vie est ici en Russie ou à Los Angels. Le temps que tu vois si tu te sens de reprendre ta vie. Tu avais prévu de ne pas rentrer avant un mois. Donne-toi ce délai de réflexion.

Moi: Tu as peut-être raison. De toute façon si je rentre dans cet état à L.A. Matt va me faire une attaque.

Dimitri: Matt...

Moi: Tu n'as pas être jaloux de lui, je t'assure. Je l'ai rencontré à mon arrivée à L.A. Il a deux ans de plus que moi. Il était en troisième année. C'était lors de la soirée de bienvenue pour les premières années. Notre bizutage a consisté à prendre un bain de minuit dans l'océan. Moi et Carla, on a été les deux premières à se lancer. C'est comme ça qu'on a fait connaissance. Il s'est toujours montré très gentil avec moi. Il a toujours été là quand ça n'allait pas. Un vrai clown, il a toujours trouvé les mots pour me remonter le moral.

Je sens la main de Dimitri se serrer sur la mienne. Le fait que je vante les qualités de Matt semble l'agacer, mais tout ce que je dis est vrai. Matt a été là pour moi alors que lui ne l'était pas.

Moi: Pour autant, il ne s'est jamais rien passé entre nous. Comme je te l'ai dit, on s'est embrassé deux ou trois fois. Pour des jeux idiots ou alors parce que j'étais triste. J'ai même essayé de lui sauter dessus une fois...

Dimitri: sérieux Sofia! j'ai pas envie d'entendre ça!

Il lâche ma main et se tourne sur le flanc gauche me présentant son dos.

Moi: Avant de t'énerver, écoute la fin! La dernière fois, c'était à mon anni. Tu venais, enfin notre échange m'avait, bref. Je l'ai embrassé et quand j'ai voulu aller plus loin, il m'a repoussé. Il m'a dit qu'il m'adorait et qu'il me trouvait très belle, mais qu'il ne voulait pas être un pansement. Qu'on pourrait peut-être tenter un truc ensemble à condition que je sois sûre de mes sentiments. Tu vois, sans même te connaitre, il respectait notre lien. C'est vraiment un mec bien. Je l'adore, sincèrement, mais c'est de toi que je suis amoureuse. Il n'y a toujours eu que toi.

Je pose ma tête dans son dos et embrasse sa nuque. Je le sens qui frémit à mon baiser. Il se remet sur le dos et caresse ma joue.

Dimitri: Ok, j'avoue, ça a l'air d'être un mec bien. Mais je dois aussi avouer que ça me fais chier que tu te sois trouvé un "moi" de remplaçant.

Moi: ce n'est pas un "toi" de remplaçant. C'est mon meilleur ami et toi, tu es mon petit ami.

Doucement, je me blottis contre lui et nous endormons.

le poids d'un nomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant