|Chapitre 2|

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  • Dédié à A toutes les gymnastes
                                    

" Il ne faut pas penser à l'objectif à atteindre, il faut seulement à avancer. C'est ainsi, à force d'avancer qu'on atteint ou qu'on dépasse ses objectifs sans même sans aperçevoir " ... - Bernard Werber


PDV de Chelsea :

Je me réveille encore une fois de plus en sursaut, complétement fourbue . Et comme tout les matins, la nausée me domine, terrassant la moindre partie de mon corps, me mettant plus bas que terre. Tout en rechignant, je me redresse et enfouis ma tête dans mes genoux. Le sol tangue sous mes pieds et ma vision me joue des tours. Ma tête me fait atrocement souffrir et mes doigts sont pris de légers tremblements. Ce fut une éprouvante et dure semaine, sur tout les plans. En seulement cinq jours, j'avais séché plus de cours qu'en 11 ans d'études. Je n'avais pas rendue une seule visite à mon frère, je m'étais seulement contentée de rester dans ce gymnase et de travailler encore et encore. Soucieuse de mon état de santé, je me lève le plus lentement possible et me dirige vers les vestiaires. Je me suis endormie une fois de plus sur le praticable après des heures d'entraînements intensives. Mes muscles sont endoloris et le bas de mon dos est dans un piètre état dû à la mauvaise nuit que j'ai passé. Epuisée, je capte malgré la fatigue mon reflet dans un des miroir : je suis dans un sale état. Mes cheveux chatains sont emmêlés, mes yeux marron-verts sont bouffis et cernés et je suis d'une pâleur à en effrayer plus d'un. Mon regard dérive ensuite vers mon corps, ou du moins vers cette coquille désormais vide qui me sert d'enveloppe corporelle. Je me déshabille progressivement, puis dévisage mon corps a présent nu. 44 kg. Je pèse 44kg. Deux putains de Kg en trop. Je suis censée en peser 42. Pour la grande majorité du monde extérieur, mon poids serait considéré comme insuffisant, mais dans mon univers, il est tout à fait courant. Je dois perdre deux kilos pour atteindre un poid idéal. La simple idée de perdre quelques kilos supplémentaires me paraît anormalement alléchante, mais j'ai peur. Peur pour les jours à venir, pour mon futur, pour mon avenir, pour ma santé, pour moi. Je connais bien les effets et les conséquences de cette maladie psychologique ayant des répercussions physiques qui ronge sa proie de l'intérieur. Bien des gymnastes sont tombées dans ce véritable enfer, bien des personnes en ont souffert et bien des vies ont été gâchées par cette souffrance. Deux kilos Chelsea ... Me dis-je d'une voix encourageante. Ce n'est rien. Tu en es capable. Largement. Maria m'harcèle et me donne toutes sortes de "conseils" pour perdre du poids. Je suis pourtant ces derniers à la lettre, m'acharnant contre moi-même. Une nausée plus forte que les autres s'empare alors de moi, je me retiens au cadre de la porte, me pliant en deux pour éviter de rendre le contenu inexistant de mon estomac sur le sol froid des vestiaires. Je ne me souviens plus à quand remonte le dernier repas digne de ce nom que j'ai pris. Je ne me suis que très peu alimenté ces derniers-jours, fuyant les déjeuners et dîners et évitant les questions que l'on me posait. Anxieuse, je me rue vers les toilettes le plus vite possible puis m'accroupis à côté de la cuvette. C'est le bon moment Chelsea ... Me murmure ma conscience d'une voix glaciale et perfide. Et comme toutes celles tombées dans ce cercle vicieux avant moi, j'enfouis sans réfléchir mes doigts dans ma gorge et les pousse le plus loin possible. Automatiquement, les larmes jaillissent de mes yeux et dévalent mes joues, un sombre gargouillis résonne au fin fond de ma gorge. Mon cerveau me hurle d'arrêter, d'enlever mon index et mon annulaire mais rien n'y fait. Mes doigts semblent déconnectés de mon cerveau, n'obeissant pas aux ordres donnés par ma foutue matière grise. Je m'étouffe, crache, pleure et sanglote mais je ne peux rien faire, je suis spectatrice de mon auto-destruction, mes doigts s'enfoncent toujours plus loin, me coupant peu à peu la respiration, et le désagréable sentiment d'être contrôlée par quelqu'un d'autre m'effleure l'esprit. Soudainement, le contenu de mes entrailles se déverse en un flot nauséabonde dans la cuvette. Une odeur pestilentielle se met à flotter dans l'air me faisant grimacer de dégout. Je m'étale par terre à bout de force. Ma gorge me brûle, mes poumons sont en feux, mes yeux sont irrités et mes lèvres sont sèches. Essouflée mais déterminée, je me redresse et continue mon travail. Encore et encore. Rien ni personne ne pourrait m'arrêter et même avec toute la volonté du monde je n'y parviendrait sûrement pas. A court d'énergie, je sors des toilettes , chancelante, me rince la bouche, et fouille l'armoire à pharmacie qui se trouve dans les vestiaires. Comme je m'y attendais, j'y trouve bien du côton. Je détâche progressivement les morceaux de watt les uns des autres, les passe sous l'eau pour faciliter l'absorption puis en attrape un. Je m'assois sur le sol carrelé, dur et froid. J'inspire bruyamment puis ingurgite le morceau puis petit à petit avale les autres et déglutis difficilement. Pour beaucoup cette méthode pourrait sembler insensée, irrationnelle ou incohérente mais dans mon monde, elle est est courramment utilisée. La watt me remplira l'estomac et me coupera toute sensation de faim ...

W.Y.F.S.D (Tome 1) - En Réécriture /!\Où les histoires vivent. Découvrez maintenant