|Chapitre 3|

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  • Dédié à Pour toutes les gymnastes ....
                                    

"Le sport consiste à déléguer au corps quelques unes des vertus les plus fortes de l'âme"

PDV de Chelsea :

Je cours maintenant depuis une bonne dizaine de minutes. Je cours, je cours aussi vite que je le peut, je cours de toutes mes forces. Je ressasse sans cesse les mots de Kévin dans ma tête. Je suis brisée. Swann n'était pas ma meilleure amie, loin de là, mais c'était une des seules personnes ici qui m'appréciait pour ce que j'étais. Une des seules personnes qui me comprenait et qui me soutenait dans les moments difficiles. Le coeur au bord des lèvres, la respiration entrecoupée de sanglots, la gorge irritée, je ne m'arrête qu'une fois arrivée aux toilettes. J'en ai besoin. Maintenant. Je dois le faire. Je dois m'y réfugier. M'auto-détruire. Me faire souffrir. C'est une des seules méthodes qui confirme que contrairement à elle, je suis bien vivante. Elle est morte Chelsea ... Un certain vide occupe mon coeur. Je viens de perdre un être qui m'était cher. Mais je ne peux pas me permettre de couler. Je dois contrôler mes émotions, ne pas les laisser me dominer. Ma carrière passe avant tout. Avant mes proches, avant ma santé, avant moi ... J'ai besoin d'oublier ... Elle me manquera bien sûr mais ... Je ne peux pas penser à elle. Je ne me sens pas bien, mes nausées sont de plus en plus violentes et mes maux de tête sont de plus en plus forts, je m'accroupis le plus vite possible auprès de la cuvette et reste là quelques secondes suspendue au dessus des toilettes, hésitante ... Je sais bien que le fait de me faire vomir n'est pas une bonne chose mais ... c'est devenue en quelque sorte une obligation. FAUX. Tu aimes ça ... Je ne devrais pas hésiter. Voilà une raison supplémentaire. Je dois me punir. Je suis accro. Une fois de plus, j'enfouie mes doigts dans ma gorge et les pousse le plus loin possible, automatiquement, je m'étouffe. Je veux arrêter. Mais j'en ai besoin. Je dois me punir, me répéte-je inlassablement. Je souffre mais je continue. J'ai mal à la gorge, mal au ventre, mal à la gorge, mal au coeur. Mes yeux me brûlent, mon cerveau est en ébullition. La douleur s'évapore petit à petit laissant place au fur et à mesure à une terreur pure, une peure panique. Je pleure, je suis épouvantée, horrifiée. Qu'importe, je dois me punir, je suis coupable. Coupable d'être encore vie lorsque Swann ne l'est plus, coupable de ne pas m'être rendue compte du mal qui rongeait ma seule amie. Comment n'avais-je pas pu voir sa maigreur !? Comment n'avais-je pas vu voir sa douleur !? Je m'en veux ... Enormément. Elle était mon amie. J'étais la sienne. J'étais censée la protéger, la soutenir, la sauver comme elle l'avait fait avec moi. Pourquoi n'avais-je pas réussie à sauver Swann ? Pourquoi ne m'en étais-je pas rendue compte ? Tu le sais Chelsea, ne joue pas les martyres ... VRAI. Sans le vouloir, au fin fond de mon âme, je connais la réponse. J'étais bien trop aveuglée par mes propres problèmes, bien trop aveuglée par ma perte de poid pour remarquer la sienne. D'aprés Kévin, tout le monde avait remarqué la maigreur affligeante de Swann. Même sa coach. Encore une entraîneuse semblable à Maria... Prête à tout pour la victoire de son élève. Swann ne me parlait jamais de sa relation avec sa coach. Je m'étais toujours dis qu'elle entretenais le même tpe de relation que les autres gymnastes avec leurs entraîneurs. Mais je me trompais. Comme d'habitude. Je ne suis pas une personne digne de confiance. Je n'ai même pas pu la protéger comme il le fallait. Est-ce que cela va m'arriver à moi aussi ? Et voilà que tu repenses à ta petite personne ... S'exclame cette foutue conscience. Je suis égoiste. Mais j'ai peur. Je ne veux pas mourir comme elle. Pas maintenant. Comment peux-tu penser à toi dans cette situation ? Hurle la petite voix d'une voix horrifiée. Je hausse les épaules en l'ignorant. Non. Ca ne m'arrivera pas. Je ne suis pas aussi maigre qu'elle l'était. Je suis bien plus grosse. Je ne suis donc pas en danger. Mais comment ai-je pu passer à côté de cela ? Tout le monde le savait ... Excepté moi ... Tout le monde sauf moi. Je me relève difficilement, les yeux bouffis, les lèvres gonflées, je sors des vestiaires et retourne dans le hall : les cours sont biens évidemment annulés. Les yeux emplis de larmes, je secoue la tête, la gorge nouée, je suis emplie de culpabilité. Je ne suis pas les autres dans les jardins de l'établissement mais me dirige vers ma chambre. J'entre dans cette derniète telle une furie, secouée de sanglots, j'attrape mon sac de sport, l'air las, et file au gymnase. Contrairement à d'habitude, ce dernier est désert. Je ne prends donc pas la peine de me rendre jusqu'aux vestiaires et me change dans les gradins. J'enfile mon short, ma brassière de sport, mes genouillères et mes demies-pointes. J'allume le poste de musique et lance une playlist au hasard. Je n'arrête pas de pleurer. Les larmes ne se tarissent jamais. J'entame cinq tours de praticable puis m'échauffe. Essouflée, je retourne auprès de mon sac et sors ma gourde. Je bois aussi vite que je peux, pressée de commencer. Mes jambes me démangent, l'envie de me démener est plus forte que tout. Je ne peux pas parler, je ne peux pas hurler ma souffrance ni ma colère. Mais je peux danser. Une fois prête, je me dirige vers le praticable, l'esprit torturé. A la minute où mon pied se pose sur la moquette, mes problème s'évanouissent, je rentre la tête haute, le buste bombé, sur demies-pointes, les épaules basse. J'en suis capable.

W.Y.F.S.D (Tome 1) - En Réécriture /!\Où les histoires vivent. Découvrez maintenant