« Remets en cause toutes tes croyances et demain une nouvelle vie s'ouvrira à toi.»
Cyrille KellerJe dois partir. Avant que l'autre ne se souvienne qu'il avait en tête une autre proie et qu'il avertisse ses copains. Je bouge, doucement, et recule dans la forêt, toujours couchée au sol. Je ne peux rester là et assister à ce lugubre spectacle. J'entends les bruits que provoquent les griffes des predateurs contre les écailles de l'autre, j'entends la peau qui se déchire et les bruits de mastications. Alors je recule encore, et encore jusqu'à atteindre le couvert des arbres. Là, je me relève lentement, et recule encore. Ce n'est peut-être pas une bonne idée de finir dans la forêt, mais je n'ai pas réellement le choix. C'est soit ça, soit les reptiles qui en équilibre sur leur victime continuent de la déchiqueter. Et à choisir, je préfère les lugubres ténèbres des Bois, malgré les bruits inquiétants qui en proviennent. Et ce n'est qu'au bout de quelques mètres que je finis enfin par tourner le dos à la plage, afin d'avancer plus rapidement.
D'énormes racines sortent du sol, s'enroulant sur elles-mêmes avant de replonger dans la terre sombre. La végétation est haute, brouillant la visibilité. Les rayons du soleil ne parviennent presque pas à percer l'épais feuillages des arbres, ne procurant que très peu de lumière à l'endroit. Je peine à avancer correctement, trébuchant souvent et me rattrapant de justesse à un tronc ou un rocher. Je ne sais pas où je vais. Ici, je n'ai aucun sens de l'orientation. Je suis complètement perdue. Pourtant, je ne cesse de marcher, ramassant quelques baies se trouvant sur mon chemin pour les manger au grès de mes pas, ayant laissé mon panier là-bas. Et plus le temps passe, plus la forêt s'assombrit. Je ne sais pas depuis combien de temps je marche, mais sûrement le soleil commence-t-il à se coucher. La nuit m'a paru longue, très longue et la journée, bien trop courte à mon goût. Et je sais que bientôt je vais devoir trouver un nouvel endroit pour dresser un campement de fortune afin de passer la nuit.
Je me demande si je suis la seule ici. Si je suis perdu dans une contrée désolée de vie humaine, ou bien si quelque part, une ville existe. J'ai l'impression d'être dans un foutue film à la manière de Jurassic Park. Mais aucune clôture, aucune caméra cachée dans les arbres ne me rassure sur le fait de ne pas être seule. Je désespère. Je vais mourir ici, oubliée. Sans avoir pu dire au revoir au seul être partageant ma vie. Je m'appuie contre un tronc d'arbre et ferme les yeux quelques instants. La bouille grise de mon chat se dessine sous mes paupières. Ses grands yeux verts, quelque peu ahuri. Il me manque. Il était ma seule compagnie et mon seul amour, et sans le vouloir, je l'avais lâchement abandonné, lui qui me donnait toute l'affection qu'on pouvait rêver.
Dans la vie, de par mon caractère hautain, narcissique et narquoise, j'étais seule. Bien trop associable pour m'ouvrir aux autres, bien trop conne pour voir que les gens pouvaient être intéressant. Et voilà qu'aujourd'hui je me mets à prier pour trouver ne serait-ce qu'une seule trace d'humanité. Un homme, une femme. Quelqu'un me confortant dans l'idée de ne pas être seule. Je soupire et ouvre les yeux pour me remettre en marche. J'ai mal. Tous mes muscles me tiraillent. Ils chauffent et tirent. Il faut que je trouve un endroit où me poser, et vite.
Enfin, je débouche sur une rivière. L'eau, limpide s'écoule d'une petite colline, formant une légère cascade qui s'écrase sur les rochers pour terminer en un petit lac. Je m'en approche, j'ai soif. Je me baisse pour en boire quelques gorgées. L'eau est fraiche et calme l'irritation de ma gorge. Quelques poissons, de diverses couleurs frôlent la surface, provoquant quelques ondulations qui s'effacent tout aussi rapidement. Ils sont de toutes tailles et de toutes formes. Leurs couleurs sont diverses, mais surtout uniques. Les voir m'apaise légèrement et je monte sur un petit monticule de terre, pour laisser mes pieds en effleurer la surface. La fraicheur me fait du bien et l'eau chasse la boue séchée et le sang qui avait commencé à craqueler sur les plaies recouvrant la plante de mes pieds. Marcher pieds-nus n'était pas la meilleure solution. Mais pour l'instant, aucun autre choix ne s'offre à moi. Les poissons continuent leurs dansent sous mes yeux. Ils ne semblent pas avoir peur. Cela signifie-t-il que de leurs vies, jamais n'ont-ils vues d'humains ? Me prouvant ainsi que je suis réellement livrée à moi-même et la solitude ?

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Expiation.
Adventure« C'est notre dernière chance de prouver que l'humanité peut être sauvée, notre dernière chance de racheter nos fautes et nos péchés. Et notre dernière chance ce passe ici, sur l'Arche, sur l'île de l'expiation. Cette île aussi dangereuse que attira...