Neige
Une silhouette floue se déplaçait le long du trottoir qui semblait noir à cette heure. Capuche rabattue, corps quasiment caché pas des vêtements larges, il fallait doubler de concentration pour entrevoir au milieu des flocons de neige qui tombaient, cette personne à la démarche pleine de désespoir qui longeait la route, tête baissée, sans sembler avoir de destination précise.
Elle faisait penser à une âme naviguant à l'aveuglette lentement, comme si cela faisait des années qu'elle vagabondait de la sorte. Une âme noire, certes, mais pas noire de méchancetés, de vices ou autre horreurs, non elle était d'un noir qui la rongeait de l'intérieur qui grandissait petit à petit jusqu'à totalement la submerger une fois devenue trop faible pour résister. Ce noir se répandait en se nourrissant de solitude, du mal-être que cela engendre, des pensées sombres, des questionnements, de la tristesse.
Ce fléau qu'est la solitude, cette impression, ce sentiment qu'il n'y a personne. Personne même au milieu de la foule, personne même autour de nous, personne dans notre coeur, personne nulle part.
Nous sommes seuls dans nos esprits, à pouvoir nous comprendre, à pouvoir s'entendre, à pouvoir vivre, et surtout à pouvoir aimer.
Il n'y a personne avec qui échanger du bonheur, avec qui chérir et être chéri est possible. La proportion d'amour entre celui à donner et celui reçu est bien trop inégal pour ne pas créer un déséquilibre : la solitude. Cette forme d'incompréhension et de détresse. « Pourquoi personne n'est comme moi ? Pour quoi personne ne me comprends ? Pourquoi personne ne m'aime ? » Avant de parfois même dériver sur une haine envers soi. « Pourquoi ne suis-je pas comme tout le monde ? Pourquoi est-ce si dur de m'aimer ? Pourquoi est ce si dur d'aimer ? Pourquoi je ne pense pas comme tout le monde ? Pourquoi suis-je comme ça ? »
Pourquoi, pourquoi, pourquoi... Ces questionnements incessants sans réponses ne font qu'augmenter le désarroi et agrandir la solitude, créants un cercle vicieux dont les conséquences nous rongent de l'intérieur jusqu'à s'assombrir autant que cette âme noire dans la neige blanche.
