12. Une séparation qui fait mal.

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Kirua dormait d'un sommeil plutôt léger, normalement la moindre menace le faisait bondir de son lit. C'était une de ses anciennes habitudes d'assassin. On ne pouvait jamais dormir que d'un œil, au cas où quelqu'un chercherait à se venger. Alors la personne qui réussit à le surprendre dans son sommeil, devait être une pro. Il n'eut le temps que d'ouvrir les yeux pour se rendre compte qu'on posait un chiffon de chloroforme sur son nez et sa bouche. Il tenta de se débattre, mais on le maintenait fort. Kirua boucha son nez, mais le chloroforme lui monta quand même à la tête. Il se sentit partir dans une somnolence tout en se maudissant intérieurement. Il se sentit emporté, sans voir ce qui arrivait à Gon, et il fut jeté sans ménagement à l'intérieur d'une camionnette. La seule chose dont il était sûr c'était qu'il était seul, qu'il n'était pas avec son ami.

– N...

Non. Voilà ce qu'il tentait de dire.

Non ne m'emmenez pas. Ne faites pas ça. Pas parce qu'il avait peur pour lui, mais parce qu'il avait peur pour Gon. Si on les séparait, la malédiction de Gon prendrait effet.

– N....

Bon sang pourquoi était-ce si dur de parler ? Personne ne faisait attention à lui et la camionnette démarra. Kirua fit pousser ses ongles, comme s'il sortait les griffes et se les enfonça dans la chair, pour tenter de se réveiller. Le sang commença à s'écouler, et la douleur le rendait moins engourdi, mais il n'était pas encore capable de bouger.

Il sentit le moment où il s'éloigna trop de Gon. C'était comme une déchirure, comme si une ficelle était accrochée à leurs cœurs et qu'elle tirait trop fort sur celui de Kirua. Il ressentit une douleur atroce lui remonter dans la poitrine, ce qui l'aida à se réveiller et à bouger, mais juste pour se plier en deux à cause de la souffrance. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait, ou il ne voulait pas le comprendre. Il n'avait pas le temps pour ça. Il fallait qu'il retourne vers Gon.

Kirua se releva tant bien que mal, un poing serré contre sa poitrine comme si ça pouvait contenir la douleur. Il avait la tête qui tourne sans savoir si c'était à cause du chloroforme ou si ça faisait partie du lot de souffrance. Il s'essuya le front, transpirant à grosses gouttes. Il allait devoir sauter de la camionnette. Il ouvrit les portes, remerciant le fait que la remorque était séparée de la cabine par une cloison, le conducteur ne pourrait pas le voir. Kirua attendit et enfin, le véhicule s'arrêta. Un stop, un feu rouge ? Peu importe, Kirua sauta, puis il se mit à courir, ou plutôt à marcher vite, le dos baissé, quasiment plié en deux, la douleur ne voulant pas partir. Elle l'empêchait de respirer convenablement, elle l'empêchait d'avancer normalement, elle le bloquait, mais Kirua était fort, et il savait d'une certaine façon que plus il se rapprochait de Gon et mieux ça irait.

Le conducteur ne dût pas voir qu'il s'était enfui, parce que personne ne le poursuivit, et tant mieux. Kirua savait qu'il n'aurait pas été en état de se battre ni de s'échapper une deuxième fois. Il faisait nuit, il faisait mauvais, il y avait beaucoup de vent et Kirua était pieds nus et dans un simple pyjama, mais il ne sentait pas le froid, seule la souffrance battait jusque dans ses tempes. Il dut s'arrêter plusieurs fois, tenter de retrouver son souffle, tenter d'apaiser le mal qui le grignotait. Malgré la température assez basse, il suait à grosses gouttes.

Quand il arriva enfin devant l'hôtel, il avait l'impression que ça faisait une éternité qu'il marchait et souffrait. La douleur avait commencé à disparaître au fur et à mesure qu'il se rapprochait de Gon. La malédiction devait être à nouveau bloquée. Kirua se rendit alors compte qu'il était gelé, il ne sentait plus ses pieds, et avait le bout des doigts glacé. Il entra dans l'hôtel, prit l'ascenseur jusqu'à leur suite. Il n'avait plus mal du tout, comme s'il n'avait jamais eu mal. C'était ses cheveux mouillés de transpiration qui témoignaient du fait qu'il avait réellement souffert. Kirua ne voulait pas savoir pourquoi s'éloigner de Gon avait été si douloureux, il ne voulait pas réfléchir à ça, il ne voulait pas connecter le point A et B, et il fuyait la seule explication possible.

CaptifOù les histoires vivent. Découvrez maintenant