12. Soirée et révélations

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Mes sœurs partent vers 20h, et je suis fier de moi, je n'ai pas craqué, et ma sœur n'a pas pu me cerner. C'est une victoire, en un sens. Je nettoie l'appartement, Juvia est redevenue la petite fille timide, elle me regarde avec de grands yeux, j'ai l'impression que la venue de mes sœurs a eu encore plus d'impact sur elle que sur moi. Ce qui ne devrait pas être le cas, puisque j'ai veillé à ce qu'elle ne se retrouve jamais seule avec une de mes sœurs pendant tout ce temps. On ne sait jamais ce qu'elles auraient pu lui dire.

-Tout va bien ?

Elle me regarde comme si elle ne savait pas quoi répondre.

-Oui. Je suis juste un peu triste. Tu sais, le contre-coup.

Non, je ne vois pas trop de quoi elle parle. Le contre-coup de quoi ?

-Ah bon ?

-Oui. Je viens de rompre avec Lyon, et c'est vraiment quelqu'un de gentil, je me sens mal pour lui, j'ai été si froide tout à l'heure, je ne me suis même pas reconnue quand je lui ai parlé.

-Tu t'en veux ? Tu regrettes d'avoir rompu avec lui ?

Elle lève la tête et me fixe, comme si toutes les réponses se trouvaient dans ses yeux.

-Non, je ne suis plus amoureuse de lui. Je le referrai, si c'était à refaire. Mais c'est la première fois que je romps avec un garçon, donc c'est la première fois que je me retrouve à ressentir ce sentiment de.. de délivrance, en quelque sorte. Je ne sais pas.

Je la regarde, je comprends un peu ce qu'elle ressent, mais je pense que c'est différent pour elle et pour moi, que nous n'avons pas la même conception de ce qu'est la rupture.

-Je vois. Ça va aller, j'en suis sûr. Ce n'est qu'une passade, tu iras mieux demain.

J'essaie de la rassurer, mais je ne suis pas sûr que ça marche à 100%.

-Je l'espère.

Elle me sourit faiblement et je m'éloigne vers la cuisine, mais elle me retient par le bras.

-Gray... il y a autre chose qui me tracasse...

Sa voix est si basse, si je n'avais pas été à côté d'elle, je ne l'aurais sans doute pas entendue.

-Quoi ?

-Qui est-ce ?

-Qui ?

-Cette fille. Celle qui t'a poussée à détester Lyon.

Je fronce les sourcils, pourquoi elle me parle de ça ?

-Juvia...

-S'il te plaît. C'est quand il a parlé d'elle que tu l'a frappé. C'est pour elle que tu t'es battu, pas pour moi.

Elle me supplie du regard, je ne sais pas si c'est une bonne idée de lui parler de ça, du moins pas maintenant.

-C'est que...

-Gray. Si tu ne m'expliques pas ce qui te hante, je ne pourrais pas m'engager avec toi, on ne pourra pas avancer ensemble, et je n'ai pas envie de stagner à ce point, pas après tout ça. Alors parles-moi d'elle, s'il te plaît.

-Eh bien... très bien. C'était il y a quelques années, au collège. J'avais une copine, Elisa, dont j'étais fou amoureux.

-Quand moi je...

-Ouais.

-Tu ne me l'a jamais dit... si j'avais su...

-Oui, c'est vrai. J'aurais dû te le dire. Mais je ne voulais pas que ça se sache. Dans ma famille, je suis le seul...hum... hétéro on va dire. Dans la plupart des familles, c'est dur d'avoir un enfant gay, mais dans la mienne, c'est plutôt le contraire. Alors comme je ne voulais pas qu'on me prenne la tête, alors je n'ai rien dit à personne. Mais Lyon l'a su, il nous a vu au parc une fois, et il connaissait ma position. Etrangement, il n'a rien dit, et je ne me suis pas méfié. Je ne l'ait pas vu venir, je ne me suis douté de rien.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Je la regarde, elle est si gentille avec moi, il y a une lueur de compréhension et de tristesse dans son regard, et je me sens de plus en plus mal de faire ce que je fais. Intelligente comme elle est, elle va comprendre qu'elle n'est que l'objet de ma vengeance envers Lyon, il faut vraiment que je choisisse bien mes mots.

-C'est deux mois plus tard que les choses ont changées. Elisa s'éloignait de plus en plus de moi, et je ne comprenais pas pourquoi. J'étais toujours là pour elle, j'étais très attentionné, alors je ne voyais pas où j'aurais pu faire quelque chose de mal.

-Elle ne voulait plus être avec toi ?

Sa voix trahit ce qu'elle pense, comme si à ses yeux, ne pas vouloir être avec moi était un crime. Ouais, son amour pour moi ne va pas forcément être une bonne chose, ma culpabilité augmente. Mais je suis dedans jusqu'au cou, donc je en peux plus reculer.

-Non, mais elle ne me l'a pas dit franchement, mais elle me le faisait bien comprendre. Elle annulait nos rendez-vous ou me posait des lapins, elle trouvait toujours un prétexte pour ne pas venir me voir, mais je ne me suis douté de rien. J'étais tellement amoureux d'elle que je pensais qu'elle ne pouvait pas venir me voir parce qu'elle avait de vrais soucis, de vrais empêchements, mais je me suis fait avoir.

-Tu devais être fou d'elle pour ne rien voir à ce point.

-Oui, c'est peu dire. Sauf qu'un soir, son message était très bizarre, et c'est là que ça a fait « tilt » dans ma tête. Je me suis vraiment dit qu'il se passait quelque chose. Alors j'ai fait la chose la plus conne mais la plus intelligente à la fois : je suis allé chez elle, puisqu'elle ne répondait ni au message ni aux appels. Mais je n'aurais pas dû.

-Elle était avec...

-Ouais. Ouais, ils étaient ensemble, et cette image reste gravée dans ma mémoire depuis. Si tu savais ce que j'ai vu. Surprendre sa copine embrasser un autre gars, c'est limite plus supportable que ce que j'ai vu.

-Qu'est-ce que tu as vu ? Pourquoi ça te met dans cet état-là ?

-Je savais qu'elle ne répondrait pas si je toquais, alors je suis allé à sa fenêtre, vu que sa chambre était au rez- de-chaussée. Il était avec elle et ils...

-Ils couchaient ensemble ?

-Oui. J'étais tellement mal que je n'ai pas pu bouger, sur le moment. C'est là qu'elle m'a vu, que son regard a croisé le mien. Elle m'a fixé, pour bien me montrer qu'elle prenait plus de plaisir avec lui qu'avec moi.

-Mon Dieu...

Ses yeux se remplissent de larmes, encore une fois pour moi.

-C'est pour ça que vous ne vous pouvez plus vous supportez ?

Je hoche la tête, je ne veux plus en parler, même si vider mon sac m'a fait du bien. Alors je la prend dans mes bras et la serre contre moi. Elle me rassure, et je songe une nouvelle fois à tout abandonner, mais je suis parti trop loin pour ça. Pourtant, l'idée de la faire souffrir me serre le cœur. alors je décide de profiter du temps qu'il nous reste, et l'embrasse. Ce qui est sûrement mon programme pour cette nuit. L'embrasser, elle, et oublier le reste.

She's MineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant