Chapitre 35

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    Maman Kim habite dans un petit appartement, au premier étage d'un grand immeuble, dans une banlieue calme. Nous sommes partis, Namjoon et moi, du café il y a à peine une heure. Bien entendu, nous avons fait un crochet par la supérette pour faire les courses pour sa mère. Le rose se gare sur un grand parking à moitié vide.

    Main dans la main, nous nous dirigeons vers l'entrée de l'immeuble. Je mentirais si je disais que je n'étais pas angoissé. J'ai vraiment peur qu'elle ne m'aime pas. Qu'elle me rejette. Nous empruntons les escaliers, étant donné qu'elle habite à l'étage du dessus, et Namjoon sonne. Une vieille femme vient nous ouvrir ; elle ressemble comme deux gouttes d'eau à son fils. Plutôt petite, de longs cheveux noirs attachés en une queue-de-cheval basse, et les mêmes traits du visage que le serveur. Elle l'accueille avec un grand sourire, et nous sommes obligés de lâcher nos mains. Avec un petit coup au cœur, je regarde madame Kim enlacer son fils avec tendresse.

    Moi aussi j'aurais aimé avec une mère comme ça. Je ne sais même pas pourquoi ma mère m'a gardé ; elle est mannequin, après tout, et l'arrivée d'un enfant modifie le corps humain. Et puis, elle a dû arrêter de travailler pour s'occuper de moi, pas vrai ? À moins qu'elle ne m'ait confié à quelqu'un... Est-ce que mes parents se sont-il réellement occupés de moi, quand j'étais petit ?

    — Tu dois être Yoongi ?

    Je sursaute, et vire au rouge quand je remarque que les deux Kim me fixent. Namjoon arbore une moue amusée, et il serre mes doigts ; il a sûrement repris ma main entre temps.

    — Oui c'est ça, réponds-je avec un sourire.

    Sans que je m'y attende, maman Kim me prend à son tour dans ses bras. Si au début je me fige, pas à l'aise du tout, je finis par me laisser aller. L'étreinte d'une maman... qui peut la refuser ? Est-ce que ma mère m'a pris une fois dans ses bras ? Et mon père ?

    Je réponds à son étreinte, mordant ma lèvre pour ne pas éclater en sanglots. Elle se détache un peu, et pose ses mains sur mes épaules. Son air tendre fait fondre mon cœur comme neige au soleil.

    — Je suis tellement contente de te rencontrer, Namjoon me parle de toi depuis des semaines ! rit-elle.

    Je lance un regard moqueur à mon amant, et c'est cette fois-ci lui qui rougit. Il détourne le regard, un peu mal à l'aise, tandis que sa mère continue de rire aux éclats. Nous finissons par entrer dans l'appartement. Bien qu'il soit petit, il est élégamment décoré, le tout avec simplicité. Les meubles ne sont pas d'un grand luxe, mais elle semble s'en ficher éperdument. Après tout, l'argent ne fait pas le bonheur. J'en suis bien la preuve.

    Nous allons dans la cuisine pour déballer les courses.

    — Laisse faire Joonie, mon petit Yoongi ! Tu es l'invité, aujourd'hui ! Donc, pas touche !

    Je ricane, et maman Kim m'emmène dans le salon. Nous nous installons dans les canapés, tandis qu'elle nous sert du thé au citron. Je la remercie chaleureusement, et elle agite la main dans ma direction, pour me dire que c'est bien inutile de la remercier. Qu'elle fait ça parce qu'elle en a envie.

    — Madame Kim... commencé-je.

    — Tu peux m'appeler Haneul, enfin ! s'exclame-t-elle.

    Le coloré vient s'asseoir près de nous, et pose sur la table une assiettes de biscuits secs. Il enroule un bras autour de ses hanches, et embrasse tendrement ma tempe. Je rougis, et un sourire fleurit sur mes lèvres.

    — J'allais vous demander si ça ne vous dérangeait pas que Namjoon sorte avec un homme, mais... ricané-je.

    Namjoon ne se comporterait jamais de cette manière si sa mère ne cautionnait pas son penchant pour les hommes. Haneul sourit franchement, tout en prenant une gorgée de thé.

    — Non, ça ne me dérange pas du tout. Tant qu'il est heureux, c'est le principal.

    — C'est une belle mentalité, Haneul, réponds-je.

    — C'est surtout comme ça que devraient penser les parents ! Quand je pense que certains mettent leurs enfants dehors à cause de broutilles pareilles... ça m'écœure.

    Un chat débarque soudainement de nulle part ; de sous le canapé, en vérité. Il se frotte contre les jambes de Haneul, puis celles de Namjoon, le tout en ronronnant très fort. Il est assez petit, et entièrement noir. En me voyant, il lâche un feulement, mais finit par venir sentir le bout de mes doigts, un peu hésitant. Sans vraiment que j'y comprenne quoi que ce soit, il monte sur mes genoux, et s'y roule en boule. Il pousse même le bouchon plus loin en commençant à se lécher la patte.

    Les chats sont tellement ingrats. Je le regarde lever la patte pour atteindre son ventre, et je ricane en le voyant galérer un peu. Il manque de basculer sur le côté, et je le rattrape avec ma main libre.

    — Alors, qu'est-ce que tu fais dans la vie, Yoongi ? demande maman Kim en me regardant attentivement.

    Aïe, question piège. Comment est-ce qu'elle va réagir quand je lui dirais que je suis encore un lycéen ? D'accord, en dernière année et majeur, mais je reste un lycéen. Je blêmis d'un coup. Namjoon serre ma hanche dans sa main, comme pour me dire de ne pas angoisser.

    — Et bien... je suis lycéen, en fait, avoué-je en mordillant ma lèvre inférieure.

    — Et alors ? Ne sois pas gêné, râle-t-elle. Si mon Namjoon est tombé amoureux de toi, c'est que tu es quelqu'un de bien. Même si tu es plus jeune. L'âge, ce n'est pas important, quand il y a de l'amour. Et entre vous deux, il y a de l'amour.

    Le chat miaule, comme pour répondre à sa maîtresse. Il me donne un coup de museau dans le menton.

    — Il y en a, murmuré-je.

    Le serveur embrasse une nouvelle fois ma tempe, et les questions reprennent. Mes passions, mes hobbies, mes rêves, mes amis... tout y passe. Nous nous trouvons finalement une passion en commun : le piano. Haneul m'oblige presque à s'asseoir devant l'imposant piano droit qu'elle possède, et j'entame un morceau assez facile. Ça fait longtemps que je n'ai pas joué, et je fais quelques fautes, mais les visages des Kim ne se crispent pas. Ils m'écoutent, et leur tête bouge en rythme des notes.

    Une heure s'écoule de cette manière. Parler, jouer du piano, et caresser le chat. Tout en mangeant des biscuits et en buvant du thé, bien sûr. La nuit commence doucement à tomber, et maman Kim étouffe un bâillement. Elle rougit et s'excuse, riant en même temps.

    — On va y aller, maman, dit Namjoon.

    Nous débarrassons, même si elle proteste, et vient le temps des embrassades.

    — Tu reviendras me voir souvent, j'espère, Yoongi ? fait-elle, mes mains dans les siennes.

    — Promis.

    Un sourire fend son visage, et nous sortons de l'appartement. Le jeune homme enroule son bras autour de mes reins, et nous marchons tranquillement vers sa voiture.

    — Ta mère est adorable, murmuré-je en entrelaçant nos doigts. Je l'aime beaucoup.

    — Et elle t'aime beaucoup aussi. Tu vois ? Je t'avais dit qu'il n'y avait aucune raison de stresser, mon ange.

    — J'aurais aimé avoir une mère comme elle, avoué-je.

    — C'est un peu bizarre à dire, mais... c'est aussi un peu ta mère, maintenant.

    Je retiens mes larmes d'émotion. Putain, qu'est-ce que je suis heureux.

effet papillon | namgiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant