Chapitre 20

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    Seokjin est venu prendre notre commande, visiblement épuisé. Nous n'avons rien commandé pour ne pas alourdir encore plus leur travail, mais il a insisté pour nous ramener des boissons et une assiette de beignets à la pomme. Voilà comment nous nous retrouvons à dévorer les beignets, nous affrontant dans une bataille de regards sans merci. Celui qui perd paye l'addition.

    — Tu as un tanga dans ton sac, murmure Sehun dans l'unique but de me déconcentrer.

    — C'est toi qui l'as acheté. Je peux en déduire que tu as des fantasmes, Sehunie ? ricané-je.

    Ses joues rougissent, et il serre les dents pour ne pas détourner le regard. Je sais que le blond ne nous fera jamais payer l'addition, mais c'est plutôt drôle de taquiner mon meilleur ami et de le voir aussi mal à l'aise. Depuis qu'on vient tous les deux, Seokjin ne nous a jamais fait payer quoi que ce soit, et je suis certain que lorsque mon meilleur ami venait seul, il ne payait pas non plus. Mais loin de moi l'idée de profiter du serveur, bien au contraire. Je m'arrange toujours pour lui donner un coup de main en échange, comme la dernière fois où je suis resté la journée entière.

    Je me suis rendu compte que je finis toujours avec eux, quand je ne vais pas bien. La première fois, ils m'ont accueilli dans leur appartement sans rien demander en retour, alors que j'étais complètement ivre : ils m'ont nourri, soigné, et m'ont couvert d'amour. Même mes propres parents n'ont jamais agi de la sorte avec moi. En même temps, ils n'ont jamais été présents pour moi.

    — Je suis sûr que Namjoon serait ravi de te voir porter un simple tanga.

    — Tu es vraiment obsédé par ce tanga, t'aurais dû t'en acheter un aussi. À moins que tu ne veuilles que je te le prête ?

    Un silence lourd se pose sur notre table, alors que je me force à ne pas cligner des yeux, et continue de le fixer avec cet air insupportable qu'il déteste. Il y a bien une chose qu'il n'aime vraiment pas de moi, c'est cette moue à la fois hautaine et moqueuse que j'arbore pour l'embêter. Il fait toujours mine de ne pas me voir quand je la fais ou se cache les yeux avec ses mains. Là, ce n'est pas vraiment possible. Nous sursautons tous les deux quand une voix que je connais bien nous interrompt :

    — J'aimerais savoir pourquoi vous parlez de tanga ?

    Je me liquéfie en voyant Namjoon juste à côté de nous, les bras croisés sur son torse, faisant ressortir ses biceps bien gonflés. Quelques mèches roses retombent sur son front, et ses lèvres pulpeuses sont étirées en un sourire moqueur. Une flamme danse dans ses prunelles, et je fonds une seconde fois en constatant qu'il est diablement sexy, même en plein pique de commandes.

    — J'ai acheté à Yoongi un tanga, fait Sehun avec malice. Pour qu'il fasse plaisir à quelqu'un.

    Je lui envoie mon regard le plus noir, dans l'espoir qu'il s'arrête là, mais il n'a visiblement rien à foutre de ma bouille de chaton mécontent. Non, plus que ça. Énervée, même. Mon visage me brûle, et je me contente de regarder le bord de la table en bois, bien décidé à ne plus donner de l'attention aux deux jeunes hommes qui complotent contre moi.

    — Ah oui ? Et à qui ?

    Mes sourcils se haussent dans un mouvement surpris quand je décèle de la jalousie dans sa voix. Du coin de l'œil, je le vois ayant perdu son sourire, et désormais agacé. Malgré moi, cela me fait plaisir, qu'il soit jaloux. Bon, c'est de lui-même après tout, mais cela me fait quand même plaisir. Il est jaloux rien qu'à l'idée de m'imaginer avec une autre personne.

    — À ton avis ? rétorque mon meilleur ami, comme si c'était évident.

    C'est au tour du serveur de rosir, et quand je redresse la tête, je remarque une lueur jusque là inconnue dans ses iris. Il me détaille discrètement, pas vraiment discrètement en fait, et son imagination doit faire le reste. Il se mordille légèrement la lèvre, et j'ai chaud en le voyant agir de cette façon. Bon sang, j'ai envie qu'il me saute dessus.

    Je n'étais pas censé avouer ça.

    Moi non plus, je ne peux pas m'empêcher de m'imaginer ce qui pourrait se passer entre nous. Il a, en temps normal, une sacrée aura de dominance, alors je n'ose même pas penser à ce qu'elle doit être dans un moment comme celui auquel je viens de créer dans mon esprit.

    Nos regards se croisent, et je sais que nous sommes sur la même longueur d'onde, tous les deux. Il passe sa langue sur ses lèvres, me donnant encore plus chaud, et se rapproche de moi imperceptiblement, comme s'il allait m'embrasser devant tout le monde, et plus si affinités.

    — Vous me faîtes peur, tous les deux, commente Sehun en fourrant un beignet dans sa bouche.

    Notre bulle éclate soudainement, et j'écarquille les yeux en me rendant compte de mon comportement. Je balbutie et m'enterre honteusement dans mon siège, tandis que mon meilleur ami se fout clairement de ma tronche, ne prenant même pas la peine d'être discret.

    — Ça me plairait bien, murmure Namjoon avant de reprendre son service, avec un dernier regard profond dans ma direction.

    J'ai envie de me cacher sous la table quand le noiraud se met à tousser de surprise, s'étranglant avec le beignet. Wow. Est-ce qu'il vient vraiment de dire ce qu'il vient de dire ou ce n'est qu'une invention de mon faible esprit ?

    — Oh. Putain, lâche Sehun. Mec, fonce. Je veux dire, vraiment, fonce. C'était déjà hyper chaud entre vous, mais là... je m'en remets pas.

    Je lance un coup d'œil dans la direction du serveur, qui agit comme si rien ne s'était passé. Mais curieux, je lance un regard un peu plus bas et constate une petite bosse, presque invisible, mais quand même là. Et bon sang, moi aussi j'ai mal.

    — C'est quand même la deuxième fois qu'il bande sur toi. C'est un signe, annote-t-il comme s'il était un commentateur.

    — Tu n'es pas obligé de dire ça aussi fort ! grogné-je.

    Je lui frappe le tibia avec le pied, et il couine de douleur. Il m'envoie son regard le plus noir, qui n'est pas très crédible à cause du sourire naissant qui lui mange le visage. Il a fait exprès de me foutre dans cette situation, ce traître ! Je lui balancerais bien son maudit tanga à la figure.

    — Quand Jin va apprendre ça... ricane-t-il.

    — Je t'interdis de lui dire quoi que ce soit ! C'est déjà assez gênant comme ça.

    — Il est aussi friand que moi de ce genre de choses !

    Je bougonne, et finis par attraper un livre, l'ignorant totalement. Il tente d'attirer mon attention mais finit par abandonner, me voyant trop pris, ou faisant semblant d'être trop pris, par la lecture des Fleurs du mal de Baudelaire, entièrement traduit en coréen.

effet papillon | namgiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant