23| lâcher prise

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Trop beau – Lomepal


❝ Ils sont un même être en deux êtres différents, là c’est, si je ne me trompe, la définition des amis parfaits. ❞
Émile Zola



— On se disputait souvent elle et moi,  continue Roméo. Mais à chaque fois, je ne lui en voulais pas. C’était comme si j’étais aveuglé par mes sentiments pour elle. Alors, ce soir là, quand j’ai découvert qu’elle me trompait, j’ai été anéanti. Je l’ai vécu comme une double trahison. D’abord, de Nawell, ensuite de Théo.

— C’est horrible, je suis vraiment désolée pour toi… murmure Clara, en posant sa main sur celle du brun.

Les deux amoureux sont assis sur un muret devant le cinéma. Ils sont si bien ensemble, serrés l’un contre l’autre, pour tenter de se réchauffer, avec leurs jambes qui se balancent dans le vide. La mère de Clara a donné la permission de vingt-deux heures trente à sa fille, et le quartier est bien silencieux à cette heure. En conséquence, seules les lumières de la ville, les néons qui éclairent les devantures, apportent aux adolescents un peu de compagnie et de réconfort. Leur séance est terminée depuis un bon quart d’heure déjà, mais Clara ne peut retourner chez elle sans savoir la fin de l’histoire.

Elle sent à quel point la tristesse de Roméo a été profonde après cette rupture, elle sait également que se confier n’est pas un exercice facile, et que le brun a besoin d’elle pour surmonter ces souvenirs douloureux. Elle n’a même pas besoin de lui parler pour le rassurer, un croisement de regards suffit, traduisant l’intégralité de la tendresse et de l’amour qu’elle lui porte.

— En plus de détruire mon cœur, elle l’a consumé jusqu’à la dernière étincelle. J’ai essayé de ne pas me laisser abattre, aussitôt en rentrant j’ai écrit le mail pour le CLCF. Mais quelques jours plus tard, ça a explosé. J’avais envie de tout casser ce qui me rappelait Nawell ou notre couple. J’étais vraiment dans un état minable. Heureusement que ma famille a été là, ils m’ont consolé, m’ont écouté et c’est grâce à eux  que j’ai pu me relever. Partir à Paris m’a sauvé. Nouveau départ, nouvelle vie très loin de chez moi. Personne ne me connaissait, et surtout, rien ne me faisait penser à elle.

Ce dernier mot est lâché sur un ton très froid, sifflant. Roméo s’arrête un instant, reprend son souffle, puis poursuit.

— J’avais constamment cette voix en moi qui me murmurait qu’entre elle et moi, c’était trop beau pour être vrai. Je me voilais la face, je m’accrochais à ce que je ressentais, mais maintenant que j’y repense, c’est évident que rien n’allait finir calmement. Elle était tout pour moi, je ne pouvais m’imaginer sans elle. C’était déjà compliqué et tendu entre nous, mais notre rupture a causé encore plus dégâts. J’étais blessé, j’avais mal.

En disant cela, une larme roule le long de sa joue. Clara l’essuie délicatement avec la pulpe de son pouce, puis embrasse tendrement la pommette de Roméo. Elle aussi a besoin de lui, de son passé, de sa douleur pour aller mieux à son tour et avancer. La blonde sait que partager leurs peines les plus intenses les rapprochent davantage encore. Peut-être que cela finira même par les guérir, pour qu’ils puissent ensemble tourner la page sur ce pan de leur vie respective, qui les fait tant souffrir.  

— Je comprends ce que tu ressentais, Roméo, je l’ai vécu par le passé aussi. Je sais à quel point c’est horrible de se sentir abandonné par quelqu’un en qui ont a placé notre confiance, nos secrets, nos sentiments, notre vie finalement. Trahi, détruit par quelqu’un pour qui on était prêt à tout. Tu as eu la chance que ta famille soit là pour toi.

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