He Loved Sunflowers

Chapitre 2

Si Mingi paraît toujours heureux, quoiqu'il arrive, avec son immense sourire, son rire contagieux et sa joie de vivre un poil envahissante, il y a des choses qui l'énervent, des choses qu'il déteste, des choses qui sont capables de lui retirer son bonheur, comme la pluie, la foule, le bruit, les couleurs ternes, le béton et les mardis.

Si tous les autres semblent normaux, ou peuvent être expliqué par sa vie et ses passions, les mardis ont besoin d'une petite remise dans le contexte. Pour le jeune fleuriste, les mardis ont toujours été le pire jour de la semaine. L'excitation de retrouver ses amis à l'école à disparu, la fatigue du week-end retombe d'un coup et la fin de la semaine est bien trop loin pour que ce soit motivant. C'est aussi la journée la plus longue et la plus ennuyante, celle qui possède les pires cours. Et même aujourd'hui, alors qu'il est entré dans le monde du travail, ces mardis sont pratiquement devenu un enfer. C'est le jour où il a le moins de clients, les gens étant occupé au travail, à l'école ou bien à dormir, trop fatigués. Alors il passe ses journées accoudé derrière son comptoir, à attendre, à regarder le peu de gens passer devant la vitrine et à créer des bouquets et des compositions originales, histoire de s'occuper autrement qu'en faisant ses comptes.

Il travaille justement sur une nouvelle création, quelque chose qui lui est venu soudainement, comme tombé du ciel, une inspiration colorée de jaune et de mauve. Il y mêle des fleurs Callas d'une délicate teinte dorée, des Statices, pleines de petites fleurs violettes, ainsi que des feuilles d'Oranger du Mexique d'un joli jaune. Au moment où il s'apprête à ajouter sa touche finale, la touche finale de cette composition qu'il aime déjà, la porte de la boutique s'ouvre, faisant doucement sonner la clochette. Il relève la tête, souriant grandement avant de se figer, fixant le jeune homme qui vient d'entrer. Il a les cheveux courts, d'un blond presque blanc, une veste noire customisée un peu grande pour lui et un regard... Un regard comme Mingi n'en avait jamais vu auparavant. Un regard rêveur mais curieux, un regard dans lequel il veut se perdre. Un regard qui lui fait un peu penser au sien, comme le reflet de son âme.

Le jeune homme ne s'approche pas de lui, se promenant lentement, observant chaque fleur, chaque bouquet, chaque composition, comme si c'était la première fois qu'il voyait tant de fleurs, tant de couleurs, comme si cela l'éblouissait. La langue de Mingi se délie enfin, les mots parvenant finalement jusqu'à ses lèvres.

- Est-ce que vous avez besoin de quelque chose ?

Le jeune homme lève les yeux vers lui, comme surpris qu'il lui adresse la parole, comme si il n'était pas habitué à ce que ce soit normal, alors que c'est son travail, pourtant. Accompagner le client, lui expliquer, l'aider à trouver ce qu'il cherche, ce dont il a besoin, les fleurs et les couleurs qui raisonnent en lui. Il le regarde, encore quelques secondes, ou quelques minutes. Ils ne savent pas, c'est comme si le temps s'arretait soudainement, comme si le monde ne tournait plus, comme si ils n'etaient plus dans cette boutique mais au milieu de vraies fleurs, comme un film.

- Non, c'est gentil mais je ne suis pas pressé, vous pouvez continuer ce que vous faisiez.

Mingi hoche la tête, se détachant de ce regard envoûtant et regarde sa composition, comme si il la voyait pour la première fois, puis son regard glisse sur sa touche finale, celle qu'il n'a pas encore eu le temps de mettre, celle qu'il va ajouter dans un instant. En l'attrapant, il l'observe. C'est une fleur large, d'un jaune soleil et orangé au centre brun. Un tournesol. Une fleur à laquelle il n'avait jamais prêté un réel intérêt auparavant, mais qui paraît soudainement plus belle que jamais.

- Elle est belle votre composition.

Une fleur qui, sans que personne ne le sache, vient à l'instant de changer sa vie et celle de cet inconnu.