Les feux de la mort

7

     Quelques heures plus tard, Chiller passait la porte de l'entrepôt. Enfin, "passait" pour faire court, puisqu'en réalité il avait commencé par l'entrebailler, jeté un coup d'oeil prudent à l'intérieur, et, voyant que seule Lux s'y trouvait en train de jouer sur une borne d'arcade, il s'était décidé à la passer.

- Hey Chill ! lui lança la jeune fille avec enthousiasme. T'en as encore mis du temps, je pensais que t'aurais voulu te débarrasser de ça le plus rapidement possible !

      Elle se mit à rire, les yeux toujours rivés sur l'écran de la borne. Cependant, ne recevant aucune réponse de la part de son camarade pourtant adepte de la répartie, elle se contraint à laisser passer un game over. Lux s'aperçut alors de la mine soucieuse du jeune homme et l'adopta à son tour.

- Hum Chill ? Me dit pas que t'as pas tenu ta promesse ?

      Pas de réponse. Son interlocuteur continuait de scruter les environs, réfléchissant à un plan d'attaque.

- Moi je m'en fiche hein, poursuivait Lux, c'est pas comme si c'était étonnant venant de toi. Mais bon, y'en a d'autres qui vont peut-être moins bien le prendre...

- Tu es seule ?

      La jeune fille eut un mouvement de surprise. Chiller ne la regardait toujours pas, et s'efforçait de garder une pose décontractée.

- Euh oui oui. Dans le salon du moins.

- Synth est là ?

- Oui aussi, il est dans la...

- Cool.

      Sans tergiverser davantage, Chiller se dirigea vers l'escalier. A mi-chemin, il eut une pointe de culpabilité et se retourna pour murmurer un "merci" amical, ce qui parut satisfaire Lux.

      A vrai dire, s'il était aussi pressé, c'est que malgré ses efforts, il n'avait aucune foutre idée de comment aborder le sujet avec les autres. Ce n'est pas qu'il craignait les réactions de ses camarades, non, des conneries il en avait déjà faites et avait appris à passer outre. Mais une connerie comme celle-là, c'était une première, même pour lui - même de toute l'histoire des Pass'âmes il lui semblait, mais il n'était pas sûr. De ce fait, Chiller avait simplement besoin de se poser sur la situation, sans reproches ni jugements pour le parasiter. Et comme à chaque fois que Chiller avait besoin de se poser suite à une connerie, il allait voir Synth.

      Le jeune homme entra dans la serre, tout en essayant de réguler sa température, et appela:

- Synth ?

      Seul le bruissement des arbres lui répondit. Il réessaya:

- Synthesis ?

      Nouveau silence. Affairé à chercher son ami dans la masse de feuillage, Chiller trébucha sur une racine et manqua de mettre le feu à un arbre. Il n'était pas censé rentrer comme bon lui semblait dans la serre, pour des raisons évidentes de sûreté. Il partageait cette contrainte avec Burnett d'ailleurs, mais contrairement à ce dernier, Chiller n'en avait pas grand chose à faire des précautions. Ainsi il se rendait assez souvent à cet endroit, avec pour seule mesure de faire attention à ses flammes. La serre était un endroit qui l'apaisait dès le premier pas à l'intérieur, et il appréciait la compagnie des plantes, du glouglou des fontaines, et bien sûr, de Synth. Pourtant aujourd'hui, celui-ci ne se présentait pas, comme s'il avait senti les tracas de Chiller, et s'amusait à le tirailler.

- Allez Synth je sais qu't'es là ! J'ai juste besoin de, euh... parler ?

      Synth, lui, n'était jamais totalement serein lorsque son flamboyant ami venait lui rendre visite. Néanmoins, il trouvait toujours agréable de l'avoir à ses côtés lorsqu'il jardinait, et ne rechignait jamais à lui prodiguer les conseils dont il avait besoin. Et c'est justement ce que Chiller venait chercher aujourd'hui, des conseils, mais las d'appeler, il s'affala sur une balancelle qui se trouvait là.