Chapitre 9

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Certains chocs émotionnels sont plus difficiles à assimiler que d'autres.

Après la mort de Louis, je pensais que je ne pourrais jamais être plus triste que je ne l'étais déjà. Je pensais que c'était impossible, parce que l'émotion avait été si intense qu'elle m'avait balayée comme le souffle d'une explosion. Mais, après une explosion, il y a toujours des flammes; des flammes qui consument le peu de choses qui restent. C'est ce qui était en train de m'arriver.

Le temps passait et j'étais en train de me consumer. Bientôt, il ne resterait plus rien de moi. Juste une coquille vide.

Je pensais que rester avec Liam aurait été une bonne idée, ou du moins une bonne façon de nous distraire de tout ce qui nous était arrivé. C'est vrai, nous avions commencé à discuter de sujets simples, légers, banals. Où nous étions allés à l'école. Notre plat préféré.

Mais nous en faisions rapidement le tour, soit parce qu'il n'y avait pas grand chose à dire, soit parce que nous arrivions à cette frontière invisible que nous ne pouvions pas franchir sous peine de nous engager sur un chemin beaucoup plus douloureux. Les moqueries à l'école. La perspective de n'avoir que des bonbons à manger jusqu'à notre mort.

Nous butions contre des murs invisibles, essayions de rebondir, mais pour aller où?

Inévitablement, la conversation se ramenait à nous, coincés ici, à la perte de Carmenn, Louisa, Skylynn, Niall, Louis, ces visages sans nom, et ce garçon à la peau jaune qui avait fini par succomber à son tour. Il était temps d'ailleurs, parce que ses gémissements commençaient à devenir insupportables. Douloureux.

Une heure de plus, et je l'aurais sûrement tué à mains nues.

Ca, je n'osais pas le dire à Liam, même si je savais que la même idée lui avait traversé l'esprit. C'était le genre de choses dont il ne fallait surtout pas parler.

De longs silences s'installaient entre nous. Liam serrait les dents pour ne pas crier de douleur, je serrais les dents pour ne pas montrer que j'étais en train de devenir folle. Et puis l'un d'entre nous recommençait à parler, et nous nous évadions pour une minute ou deux.

C'était mieux que rien, c'était précieux, mais c'était comme un sac dans lequel nous piochions des clefs. Le tas diminuait à vue d'œil, et il arrivait que nous ne trouvions pas de serrures à ces clefs. Alors elles restaient sur le côté, à jamais inutiles. Liam me posa des questions à propos de mes parents, j'en fis de même.

- Peut-être qu'ils sont là, dehors, et qu'ils sont en train de discuter en ce moment. Comme nous, dit Liam.

- Peut-être, répondis-je.

Puis un long silence s'installa entre nous. A ce moment-là, nous pensions exactement la même chose.

Et si l'un d'entre nous ne s'en sortait pas? Et si un seul d'entre nous était sauvé et découvrait que nos parents avaient créé des liens?

Comment expliquer que nous aussi avions créé des liens, mais qu'aucun d'entre nous n'était prêt à sacrifier sa vie pour l'autre? Enfin, peut-être que j'aurais été prête à sacrifier ma vie pour Liam. Mais ce n'était pas pour lui que je l'aurais fait. Je l'aurais fait pour moi. Pour m'éviter de nouvelles souffrances.

Du pur égoïsme. Qui serait passé pour de l'héroïsme, parce qu'on espérait tous ne pas s'être transformés en monstres. Et que nous voulions à tout prix un héros.

Jem, qui était notre pilier le plus solide et le plus fragile à la fois.

Zayn, qui avait une humeur en dents de scie.

Trapped. (One Direction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant