Chapitre 5

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« Une rébellion ? »

La journaliste expliquait au Casamançais une partie du système en marchant dans les quartiers de la capitale occidentale. Ils ne savaient pas où ils se dirigeaient, beaucoup trop concentrés, laissant le vent tout droit venu de l'Atlantique guider leurs pas.

Elle lui parlait d'un ton si bas, si discret, si lent comme si elle lui racontait un secret scellé depuis des générations.

« En effet, une rébellion. »

Sénégal frissonna en entendant à nouveau ce mot. Cela lui rappelait de mauvais souvenirs qu'il aurait voulu enterrer dans le sol le moins fertile du Diéri afin qu'aucun paysan malchanceux ne tombe dessus.

« Pourquoi on voudrait créer une rébellion ? Cria le Diola.

- Moins fort ! Ordonna la femme du même ton bas. Si ces policiers corrompus venaient à nous attraper, j'oserais même pas imaginer la suite. »

Elle regarda les alentours : il n'y avait pas l'air d'avoir des petits curieux qui les écoutaient et encore moins des gendarmes capables d'entraver leur minimum de liberté.

« Je... D'accord. Alors, pourquoi ? Se répéta Sénégal.

- Hé bien... Vous savez monsieur, nul n'a l'idée de qui pourrait troubler l'idéologie coloniale. Ça pourrait être une mère de famille très pensive, un instituteur trop bavard, un jeune politicien suicidaire ou alors, elle l'observa, un pêcheur inconscient.

- Et l'explication courte ? »

Elle regarda dans le coin, pensant à ce qu'elle dirait et comment elle le dirait.

« Lors du dîner, j'ai l'impression que vous, nous nous sommes fait remarquer par le blanc. Et pas de la bonne manière.

- Qui ?

- Qui d'autre ? En plus, cet alcoolique stupide a réussi à nous enfoncer... Ça peut valoir la prison ça !

- Pour avoir partagé notre avis dans un débat ?

- Dans notre contexte, il y a des avis qui sont bons à garder pour soi. Et vous savez le plus drôle ? C'est que cet article "perturbant" s'est vite fait balayer. Le blanc peut soupçonner que je vous ai influencé, ça n'arrange pas les affaires personnellement... »

Il se sentait plutôt mal pour elle. La vie de cette femme devait être si dure, remplie de problèmes et de craintes. C'était bien une raison de ne pas devenir journaliste...

« Qu'est-ce que je peux faire pour vous aider ? »

République soudanaise écarquilla soudainement des yeux à l'entente de cette demande. Elle laissa échapper un petit rire nerveux et se mordit la lèvre.

Elle n'avait pas l'air de réfléchir ardemment et consciencieusement à sa question. Le prenait-elle au sérieux ?

« Quelle âme charitable ! Si la pêche et les ethnies sont liées, vous feriez mieux de vous occuper de vos Lebous. Ces types pourraient vous tuer si vous ne faites rien. Proposa la demoiselle, voulant vite conclure avec lui.

- Et vous ? Insista le pêcheur.

- Moi ? Ne vous en faites pas pour ça ! Je ne vais pas me faire piétiner ! Il se tiendra probablement à carreau tant que Guinée est sur son chemin.

- Et quand elle ne le sera plus ? »

Elle laissa une nouvelle fois un rire sortir de sa bouche et se força à sourire.

« Vous avez... Une imagination terriblement débordante. Ça finira par vous rattraper.

- Ce n'est pas ce qu'on appelle en France : la liberté d'expression ?

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