Chapitre 6 - Lucas

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Dormir ? Après avoir subi cette visite Carolesque ? Mission impossible...

Il est pas né celui qui réussira à m'empêcher d'avoir le fin mot de cette histoire. Personne n'échappe à internet de nos jours. Il y a forcément quelque chose sur Antoine qui traîne sur la toile. Reste à trouver comment y parvenir. Je connais même pas son nom de famille.

Linkedin, Viadeo ... Rien et pas moins de 29 homonymes travaillant pour cette société.

Facebook... Aucun Antoine dans les Amis de Carole !
Grrrr... Je sèche... Si seulement j'en connaissais plus sur lui. Oh je sais !

Je suis machiavélique ! Après avoir parcouru les photos de Carole, je tombe enfin sur ce que je cherchais. Un album entier consacré à cette période "Miss Fender & Gibson"pour le magazine de Rock Indé. Par chance le frère d'Antoine a pris le soin de protéger ses photos d'un Filigrane à son Nom. Paul Riccardi. Toujours pas de compte Facebook au nom d'Antoine Riccardi mais je ne m'avoue pas vaincue pour autant. En fouillant dans les centaines de contacts de son frère je finit par atterrir sur le profil d'une sublime femme répondant au doux nom de Clémentine Riccardi. Sa femme, j'en suis persuadée.

Je sursaute et accompagne mon geste d'un cri suraigu à briser les tympans. Chifoumi vient de passer nonchalamment sur mon clavier comme si de rien n'était. mon cœur bat à tout rompre prise en flagrant délit de curiosité abusive. Ma conscience serait-elle revenue de vacances?

Pour la partie qui va suivre j'avoue ne pas être fière de ce que j'ai fait.

En recoupant les informations trouvées sur Facebook et l'annuaire des pages blanches j'ai obtenu facilement l'adresse de Madame Riccardi. Et pire encore... On est lundi matin et je suis devant chez elle, prête à toquer à la porte. Se faire porter pâle pour aller voir la femme d'un collègue qui ne me connaît même pas, je suis vraiment tarée. Trois petits coups bref... La porte s'ouvre sur cette magnifique femme brune au teint méditerranéen.

– Bonjour?
– Bonjour. Vous êtes Madame Riccardi je suppose?
– Oui bien sûr, c'est pourquoi?
– Je suis une collègue de votre mari. Je voudrais pas vous paraître intrusive mais je m'inquiète beaucoup pour lui ces derniers temps. Antoine est devenu distant et presque muet au travail.
– Vous dites que vous êtes?
– Laurène.
– Ça ne me dit rien pourtant mais bon bref, entrez donc prendre un café si vous en avez le temps. Vous devez aussi savoir qu'il ne vit plus ici depuis ma demande de divorce.
– Alors c'est surement ce qui le rend si triste et renfermé ces derniers temps j'imagine.
– Comment? Je ne sais pas pour quel raison vous êtes venue me voir mais je vais vous demandez de bien vouloir partir maintenant. Si vous connaissiez vraiment Antoine vous seriez au courant de la vraie raison pour laquelle il n'est plus que l'ombre de lui-même.
– Mais je...
– Sortez de chez moi !

Pas d'autre choix que de lui avouer toute la vérité sur la vrai raison de ma venue. Au cours de mon récit, je vois son visage se crisper d'incompréhension pour passer à la surprise lorsque je lui parle de mes filatures. C'est à ce moment précis que tout bascule. Fronçant les yeux elle m'arrête subitement pour me demander des détails sur ce fameux café non consommé et ce biscuit systématiquement dévoré. J'ai déjà eu affaire à des personnes en souffrance dans ma vie mais jamais comme celle à laquelle j'assiste en cet instant. A ses yeux rougis se mêlent aussitôt des torrents de larmes. Cette femme si charismatique s'écroule littéralement dans mes bras en pleurant. je ne sais pas encore pourquoi mais cette douleur me touche aussi pendant que je l'accompagne à l'intérieur de chez elle.

Tout est dans les détails... Après avoir repris un peu ses esprits, Clémentine Riccardi finit par me donner les raisons d'un tel état de peine. Comme m'en avait vaguement parlé Carole, Antoine n'est pas que marié à cette belle Italienne. Un enfant est né de cette belle union il y a bientôt 7 ans. Lucas. Sa femme me décrit alors un papounet dingue de son "Pirate" comme il aimait le surnommer affectueusement jusqu'à la découverte de la maladie de son fils. Ce combat perdu d'avance a eu très vite raison de leur couple mais pour Lucas, Antoine n'a jamais rien laissé transparaître devant lui. Jusqu'au bout, jusqu'à ses derniers instants il était là avec lui. Chaque minute, chaque seconde il ne vivait que pour son pirate. Un pirate qui avait pris pour habitude de toujours laisser ses biscuits baigner sous les rayons du soleil au petit matin. Pour Lucas, c'était comme manger un peu de soleil... Pour devenir plus fort et ne pas partir. Ce gamin aimait la vie et son père a perdu son âme en perdant son fils.

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