Chapitre 28

19 2 0
                                    

LÉANA

     J'ai terminé l'année et commencé la suivante aux urgences. Deux jours de gardes intensives où les patients s'enchainaient et où la salle d'attente ne semblait jamais vouloir désemplir. Un vrai bazar !

     Les soirs de fête l'alcool rend toujours les choses un peu plus vives. Il y a plus d'accidents que ce soit à pied ou au volant d'un véhicule. Il y a aussi plus de bagarres ou simplement des gens en état d'ébriété qui se blessent tout seul. Un jour comme le réveillon du nouvel an ou le quatorze juillet nous tient plus occupé que n'importe quel autre jour de l'année. Mais tous nos patients ne sont pas systématiquement alcoolisés.

    Le motard que les pompiers nous ont emmené et qui a occupé le box trois une partie de la nuit n'avait pas une goutte d'alcool dans le sang, les gendarmes s'en sont assurés. Ce qui est un fait assez exceptionnel une nuit comme celle là, à presque trois heures du matin. Si lui était parfaitement sobre il n'en était pas de même pour les quatre jeunes qui lui étaient rentrés dedans non seulement sous l'emprise de l'alcool mais aussi de stupéfiants. Ces abrutis ont choisis de boire, de fumer de l'herbe et de conduire. Un combo souvent mortel mais heureusement pas cette fois-ci.

     Pour eux les choses ont littéralement dérapées et ils ont emboutis la moto de ce jeune homme qui patientait simplement à un feu rouge. Sa moto avait pris cher d'après ses lamentations mais moi je m'inquiétait pour sa jambe droite. Celle-ci s'était retrouvée coincée sous son deux-roues quand la voiture l'avait poussée sur plusieurs mètres. Dès qu'il nous a été annoncé j'ai pensé à Mathieu, le compagnon de ma mère, qui circule régulièrement en moto, bien que pas trop à cette période de l'année, mais qui a souvent ma mère en passagère arrière. Et surtout j'ai pensé à Raphaël. Selon lui il n'a jamais eu d'accident, à part sur des courses de motocross, mais prudence n'est pas forcément mère de sûreté à priori.

     Mon patient revenait de la radio sur un brancard poussé par Basile quand je surpris cette conversation qui devait me conduire ici le lendemain. Devant ce bâtiment qui servait de garage et à quelques pas de cette maison familiale. J'y ai tout de suite retrouvé certains éléments évoqués par Raphaël. J'étais là où je n'avais pas envisagé aller. J'avais imaginé plusieurs scénarios en prenant ma décision et encore lors du trajet mais pas qu'il n'y aurait personne.

     Déçue, je patiente néanmoins. Je suis venue jusqu'ici alors autant attendre encore un peu. Au chaud dans ma voiture je me remémore les événements qui m'ont poussé à changer d'avis.

     — Ça fait chier, disait le patient à Balise. Cette moto c'est mon bébé et ces connards l'ont bien esquintée.

     — L'assurance prendra les réparations en charge, tenta de le consoler mon brancardier préféré toujours aussi pragmatique.

     — Je sais mais à Lyon j'avais un bon copain qui s'occupait d'elle, ici je ne sais pas à qui la confier.

     — Vous voulez l'emmener chez un concessionnaire ou vous préférez un indépendant parce que je connais un gars vraiment bien.

     Discrètement en m'assurant que la jambe blessée ne faisait pas souffrir le jeune homme, je suivais leur conversation. La morphine avait fait effet, il se plaignait mais pas de sa jambe. Son seul souci c'était sa bécane et il valait mieux que ses pensées soient prises par autre chose avant que les mauvaises nouvelles tombent. Il n'était assurément pas prêt de remonter sur son engin.

     — Je veux quelqu'un de bien, affirma-t-il.

     — Alors vous devriez l'appeler, il s'y connaît vraiment. Et quelque soit la marque il fera son maximum. Je lui confie la mienne quand j'ai un souci et il n'habite qu'à quelques kilomètres.

Mon voisin De NumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant