ᴍᴇꜱ ᴘᴀꜱ résonnent dans le silence profond qui règne dans le hall. Les talons de mes sandales claquent contre le marbre blanc. C'est vide, je ne sais pas pourquoi ça me surprend encore. Un hochement de tête pour le gardien dans sa loge, qui me répond d'un sourire en tous points semblable à celui de la veille, et à celui du jour encore avant, puis je m'engouffre dans l'ascenseur immaculé.
La cabine de verre gravit les étages de ma tour dorée sans effort, glissant dans l'espace avec le seul bruit de mes pensées pour l'accompagner. Et puis, la sonnerie caractéristique quand la cabine atteint l'ultime étage. Les portes s'ouvrent sur le penthouse que j'appelle ma maison. Rien de moins que l'excellence pour mes géniteurs.
Un majestueux bouquet de fleurs, savamment assemblées pour donner un effet sauvage, trône sur le guéridon en bois exotique offert à mes parents par quelque prestigieux ami. Ce n'est pas suffisant pour détourner l'attention d'un éventuel nouvel arrivant, dont le regard serait immédiatement attiré par les vitres qui occupent tout le mur en face de l'ascenseur. Une vue imprenable sur le sommet de la ville de New York, qu'aucun bouquet de fleurs ne peut éclipser.
Je marque un temps d'arrêt, mon regard vide survolant l'appartement. Un design épuré, une décoration subtile, un ensemble à l'harmonie si parfaite que je me sens comme une intruse dans ce décor. C'est ce que c'est; un décor, dans lequel jouer la vie parfaite de la famille parfaite. Excepté qu'il n'y a personne à part moi dans cette scène. En l'absence de public, l'idée de la famille idéale est remisée au placard, et je suis de nouveau seule, les bras ballants dans cet appartement trop grand pour moi.
Des fois j'ai envie de crier, juste pour faire taire le silence assourdissant.
Bien loin me paraît la paix ressentie alors que je planais encore sur mon pic d'adrénaline. Dans la quiétude de ce foyer qui n'en est pas un, tous les démons que je fuyais me rattrapent.
Léon m'a déposée quelques minutes plus tôt au pied de mon immeuble. À ce moment là, le silence entre nous est devenu épais, collant, insupportable. Je savais que je ne pouvais pas partir en laissant les non-dits nous embourber dans la rancune, pas quand il allait partir pour emporter avec lui le souvenir amer de notre dernière rencontre. Et lui aussi en avait conscience, parce qu'il a été celui à effectuer le premier geste.
— Viens là, a-t-il murmuré.
Malgré les bruits de klaxon qui servent de bande-son quotidienne aux rues new-yorkaises, il a ouvert un bras pour m'inviter. Ç'a été un câlin maladroit, inconfortable le levier de vitesses entre nous, mon cou tordu dans un angle inconfortable, et je n'ai pas perdu mon temps pour m'écarter.
— Prends soin de toi Adria.
Une boule d'émotion inattendue a gonflé dans ma gorge, peut-être à cause de l'intensité de son regard. Je sais précisément ce qu'il entend par ces mots, le sens que notre vécu commun leur donne. Et, peut-être à cause du poids de ses mots, ou à cause des souvenirs dont je pouvais lire le reflet dans ses yeux, mon regard n'a pu soutenir le sien.
— Ah, je sais que je vais te manquer!
Je lui fais un clin d'œil exagéré, et il rit même si le son n'est pas aussi naturel qu'il le devrait.
— Si tu le dis. On sait tous que c'est toi qui va pleurer mon absence.
Ma réponse est coupée par un klaxon particulièrement agressif. Léon se tourne pour faire un signe agacé au conducteur impatient derrière sa voiture, puis se tourne de nouveau vers moi, qui suis sortie entre temps.
L'ombre qui passe dans son regard reste gravée dans ma mémoire.
— Je suis sérieux Adria. Ne fais pas de conneries.
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ADRENALINA
Teen FictionQᴜ'ᴇꜱᴛ ᴄᴇ Qᴜᴇ ʟ'ÉᴛᴇʀɴɪᴛÉ ? ᴜɴᴇ ᴍɪɴᴜᴛᴇ ᴇxᴄᴇꜱꜱɪᴠᴇᴍᴇɴᴛ ɪɴᴛᴇɴꜱᴇ. Une minute à la fois, c'est ainsi qu'Adria prend la vie pour parvenir à la supporter. Étouffée dans une existence sur laquelle elle n'a plus aucune emprise, elle n'est mue que par une néce...