Chapitre 10

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-Ok, doucement mon beau, doucement, chuchota Astrid pour calmer le Vipère. Regarde, je rapporte à manger.

Le dragon vert remarqua le sanglier qu'elle trainait derrière elle et lui adressa un dernier regard méfiant avant de pencher doucement la tête vers celle de Tempête et de pousser délicatement sa joue du museau. Tempête remua, sans pour autant se réveiller. Au contraire, la dragonne se blottit un peu plus contre le flanc de son compagnon qui décida de laisser tomber l'idée de la réveiller et au lieu de cela, déplia une aile protectrice au-dessus d'elle.

Astrid en fut intérieurement attendrie. Si on lui avait dit que les dragons étaient si extraordinaires plus tôt, jamais elle n'aurait ne serait-ce que commencer à s'entraîner pour en tuer un. Mais les Vikings ignoraient tous de ces animaux merveilleux et semaient la mort et la destruction parmi ces êtres. Astrid était persuadée que si Stoick voyait la scène à laquelle elle assistait maintenant, il changerait immédiatement d'avis sur les dragons. La jeune Viking soupira en se disant que de toute manière, jamais Stoick ne pourrait être témoin d'une telle démonstration d'amour venant d'un dragon. Sa vie entière tournait autour de leur massacre et il ignorait le reste.

Astrid s'éloigna un peu pour rassurer le Vipère vert, se disant du même coup qu'il lui faudrait un nom. Elle ne pouvait pas continuer à l'appeler « le Vipère Vert » ou « le compagnon de Tempête » toute sa vie. Elle y réfléchirait plus tard. Pour l'instant, elle devait s'occuper de sa proie.

Elle s'assit sur le sol et, à l'aide de sa hache (elle regretta d'ailleurs de ne pas avoir de couteau. Cela aurait été bien plus pratique), elle dépeça lentement le sanglier. Coupant les morceaux qu'elle comptait conserver, elle enveloppa ceux-ci dans la peau du sanglier. La partie qu'elle prévoyait de manger (une grande partie, compte tenu qu'elle avait deux dragons avec elle), elle la mit de côté avant de partir à la recherche de bois pour faire un feu. Très vite, des flammes flambaient et elle avait tant bien que mal réussi à fabriquer un système pour faire cuire la viande, qui tenait avec un équilibre plus que précaire. Il s'agissait d'un morceau de bois qu'elle avait planté en travers de la viande, avant de le poser sur deux autres branches à la forme plus ou moins fourchue, qu'elle avait planté dans le sol comme elle avait pu.

Elle se dit que c'était un peu pitoyable mais c'était le mieux qu'elle puisse faire aujourd'hui et maintenant. Pendant toute la durée de son petit manège, le Vipère ne l'avait quitté des yeux, étudiant ses moindres faits et gestes avec attention, une lueur de curiosité dans le regard. Pour l'instant, il n'attaquait pas cette étrange Viking blonde car sa chère Tempête, comme elle avait dit qu'elle se nommait à présent (nom qui lui allait d'ailleurs très bien selon lui), lui avait demandé de ne pas lui faire de mal. Mais à présent, il était de plus en plus intrigué par la blonde et s'étonnait de voir qu'elle n'avait pas l'air de vouloir les attaquer. Tous les Vikings qu'il avait rencontré auparavant avait voulu le tuer mais elle était la première qui semblait ne lui vouloir aucun mal. Il avait envie d'en savoir plus mais pour l'instant, Tempête dormait et il devait la protéger, qui que soit l'agresseur.

Quand l'odeur de la viande grillée vint chatouiller les narines sensibles de Tempête, celle-ci sembla se rappeler de sa faim dans son sommeil et se réveilla lentement. Voyant qu'elle avait ouvert les yeux, le Vipère s'écarta et elle se releva, étirant ses ailes engourdies.

-Salut ma belle, l'accueillit Astrid en souriant quand elle vit sa dragonne se réveiller. Bien dormi ?

La dragonne répondit d'un grognement enjoué et adressa un ronronnement à son compagnon, comme un remerciement d'avoir veillé sur elle.

-J'espère que vous avez faim, fit Astrid en se relevant à son tour. Et que vous aimez le sanglier.

Tempête s'approcha, malgré le grondement du Vipère, réticent à la voir s'approcher ainsi d'une Viking, armée qui plus est. Mais Astrid se contenta d'accueillir Tempête avec une caresse sur le museau et lui donna sa part de viande, que la dragonne avala d'un coup.

Astrid attrapa la part qu'elle avait préparé pour le second Vipère et hésita un instant. Elle n'était pas une excellente cuisinière mais Tempête semblait avoir apprécié le repas. Elle espérait qu'avec ce morceau de viande qu'elle offrait au dragon, il serait moins réticent à l'idée de lui accorder sa confiance.

Elle avait besoin de cette confiance. Elle était sûre et certaine à présent que Tempête ne partirait pas d'ici. Elle était même sûre que la dragonne vivait même ici avant d'être capturée par son village après avoir été enrôlée par la Mort Rouge et qu'elle n'avait fait que rentrer chez elle. Non, Tempête ne partirait pas. Ce qui signifiait qu'Astrid allait devoir se construire une nouvelle vie ici-même. Et pour cela, pour pouvoir espérer survivre, elle devait être sûre qu'elle serait en sécurité là où elle était. Ce qui ne serait pas totalement le cas si ce dragon ne lui accordait pas sa confiance. De plus, elle se dit que si lui n'arrivait pas à lui faire confiance malgré l'amitié qu'elle partageait avec Tempête, les autres dragons seraient encore plus réticents à l'accepter et beaucoup plus enclins à la tuer. Elle avait certes encore beaucoup de progrès à faire avec les dragons, beaucoup de choses à apprendre, mais elle avait réussi à dresser Tempête et elle se disait que si elle n'arrivait pas à dresser ce Vipère, elle n'arriverait pas à dresser aucun autre dragon.

-Ecoute, commença-t-elle en faisant un pas vers le dragon, qui lui recula en grondant. Je ne vais pas te faire de mal. Je ne suis pas votre ennemie. Tu dois me croire, je ne veux que ton amitié.

Elle parlait d'une voix qu'elle espérait apaisante pour le dragon.

De son côté, le Vipère n'arrivait pas à se décider. Elle était une Viking, elle était dangereuse. Il avait vu tant des siens se faire massacrer par ces hommes, des images qui resteraient gravées dans sa mémoire pour l'éternité. Il revoyait le sang, le feu, la bataille, le carnage, la destruction. Partout où ils allaient, les Vikings semaient la mort. Le souvenir du métal dans sa chair était encore vif, malgré le fait que la blessure soit cicatrisée depuis plusieurs années maintenant. Mais le long trait blanc sous son aile droite, cette longue cicatrice que les écailles ne recouvraient plus et qui laissait sa peau sans défense lui rappelait trop souvent que la barbarie des Vikings n'avait aucune limite.

Mais d'un autre côté, il y avait Tempête, qui avait enduré mille souffrances là où elle était emprisonnée autrefois, qui avait tout de même accordé sa confiance à la Viking. Tempête était loin d'être bête et inconsciente, il le savait mieux que personne. Si elle avait décidé de faire la paix avec cette blonde, c'était qu'il y avait une excellente raison derrière. Et depuis qu'elle était là, cette Viking n'avait rien fait pour l'attaquer, elle avait même ramené le repas. Repas qui sentait délicieusement bon pour lui qui n'avait pas manger depuis le matin. Il voyait bien qu'un lien d'amitié puissant s'était formé entre Tempête et la Viking qu'elle avait appelé Astrid. Et il ne pouvait tout simplement pas ignorer ça. Mais la cicatrice...

Alors qu'il réfléchissait, plongé dans ses réflexions, Astrid avait tendu la main devant elle, détourant le regard et tentant le tout pour le tout. Elle avait besoin de la confiance du dragon pour survivre alors il fallait qu'elle essaye. Et s'il décidait de l'attaquer plutôt que de la lui accorder... alors elle n'aurait plus besoin de survivre du tout.

Le Vipère eut un petit mouvement de recul dû à la surprise quand il vit la main d'Astrid devant lui. Il hésita. Mais Tempête l'encouragea d'un grondement joyeux et il prit sa décision. Cette Viking n'avait rien fait pour le provoquer. Elle avait posé son arme pour s'approcher de lui. Tempête semblait lui faire confiance avec sa vie. Elle parlait doucement, comme pour ne pas lui faire peur. En tendant la main et détournant les yeux ainsi, elle s'était postée en position de vulnérabilité, chose qu'un Viking n'aurait jamais au grand jamais fait. Elle méritait qu'il lui fasse confiance. Sans plus hésiter, il s'approcha et appuya son museau contre la paume tendue de la blonde, avec un ronronnement assuré. La Viking rouvrit les yeux, ses prunelles pétillant de joie. Le dragon s'écarta après quelques instants et d'un mouvement rapide et fluide, happa sa part de viande, l'avalant d'un coup, déclenchant le rire d'Astrid.

Dragonniers - AstridOù les histoires vivent. Découvrez maintenant