Il pleut des cordes, le ciel est noir et le vent souffle, a un tel point que les branches des arbres semblent se débattre contre une force invisible et inépuisable dans un bruit feutré.
Je marche d'un pas pressé en me protégeant le visage tant bien que mal des gerbes d'eau. Je devrais être chez moi par ce temps de novembre mais non, j’en ai décidé autrement et je suis maintenant à la recherche d'un endroit où m'abriter.
Je tourne au coin d'une rue et pénètre dans un bâtiment sans me préoccuper de savoir quoi, la seule chose qui m'importe est qu'il y a de la lumière et que la porte est ouverte. Je prends le temps de regarder autour de moi pour repérer les lieux, je viens d'entrer dans un bar. Quelques clients discutent en attendant leur commande tandis que d'autres boivent leur boisson chaude au vue des fumées qui s'échappent des tasses.
Je m'installe dans un coin du bar où se trouve un canapé ainsi qu'une grande table basse. Je suis trempée de la tête au pied. Mon pantalon me colle à la peau, chose dont j’ai horreur, cela laisse une sensation de froid et le frottement du tissu mouillé génère des démangeaisons. Je retire mon manteau et le dépose non loin de moi pour le faire sécher, jurant que je ferai bien de même avec mon pantalon si j’étais chez moi.
- Bonjour mademoiselle, avez vous fait votre choix ?
Je relève la tête et regarde la personne qui venait de me sortir de mes pensées. Une jeune femme se trouve fasse à moi et attend que je lui réponde.
- Je… heu… je vais prendre un chocolat chaud… bafouillé-je.
- Je vous apporte ça. Répond la serveuse en repartant.
Quelques minutes plus tard, elle revient avec un plateau sur lequel était posé une tasse fumante.
- Et voilà. Dit-elle en déposant la tasse devant moi.
Je reste bloquée sur le visage de mon interlocutrice sans vraiment savoir pourquoi.
- Il te faut autre chose ? Demande-t-elle.
- Non, merci ! Réponds-je précipitamment.
- Fais moi signe si tu as besoin. Dit-elle en s'éloignant pour s'occuper d'autres clients.
Je ne comprends pas bien ce qui est en train de se passer. Cette jeune femme ne me connait pas pourtant elle s'est mise à me tutoyer. Peut-être est-elle d'un âge proche du mien et elle l'a remarqué ?
De ma place, je peux apercevoir la serveuse s'activer. Je prends le temps de la détailler. Elle est jolie, un visage fin, des cheveux longs coiffés en un chignon, elle porte un sweat noir légèrement large et un jean. Son visage affiche un air concentré sur ce qu’elle fait.
D’une manière que je ne peux expliquer, elle m’inspire. Je sors alors de mon ordinateur et commence à écrire une nouvelle dont elle est l'héroïne tout en buvant mon chocolat chaud. La nouvelle que j’écris n’est pas très originale, j’essaye simplement de m'imaginer à quoi pourrait ressembler une journée pour elle en tant que barmaid et ce qu’elle pourrait faire quand elle à finit sa journée.
Dans mon imaginaire, elle mène une vie simple, étudiant la musique de manière indépendante et s’adonnant à des activités artistiques telle que le dessin et à l’écriture de chansons aux textes profonds, tout cela avec un léger sourire aux lèvres, un air pensif, une boisson chaude et de la musique en fond. Lorsqu'elle travaille au bar, ses journées sont rythmées par les demandes des clients mais cela ne l'empêche pas de trouver quelques minutes pour griffonner les paroles qui lui viennent en tête sur son carnet.
Je finis ma nouvelle, je la relis puis l’enregistre. J’en suis plutôt satisfaite malgré sa simplicité. Tout en finissant ma tasse, je reporte mon attention sur l’objet de mon inspiration. Cette jeune femme est vraiment belle.
Mon esprit s'égare dans des scénarios plus farfelus et absurdes les uns que les autres qui n’ont malheureusement aucune portée littéraire intéressante si ce n’est par le fait qu’elle apparaît dedans.
Puis je prend conscience que quand je sortirais de ce bar, la probabilité pour que l’on se revoit est mince, car elle n’est probablement pas la seule serveuse à travailler ici. Si je veux la revoir il faut que je lui demande son numéro ou que je lui laisse le mien… cela me paraît tellement absurde et cliché. De plus, les chances de recevoir une réponse négative ou pas de réponse du tout sont bien plus élevées que de ne pas la revoir en revenant ici.
Arrête de réfléchir Charly ! Au pire tu risques quoi ? Qu’elle te dise non ? Elle pourrait tout aussi bien accepter ! Tente ta chance ! Qui ne tente rien n’a rien comme on dit ! Mon dieu que cette expression est cliché… presque aussi cliché que la situation actuelle…
Aillant fini de boire ma boisson je récupère ma tasse et me dirige vers le comptoir dans le but de régler ma consommation. Cela fait bien une heure et demie voir deux heures que je suis ici.
- Tout s’est bien passé ? me demande-t-elle.
- Oui super, merci… je… t’ai ramené ma tasse… dis-je bêtement.
- Merci, c’est gentil ! ça te fera 3 euros s’il te plait !
Je règle donc l’addition. Je range mon portefeuille. Je la regarde. J’hésite.
Ce n’est qu’une question, de quoi as-tu peur ? Cette question te brûle les lèvres alors pose la bon sang !
- Il te fallait autre chose ? me demande-t-elle, me faisant sortir de mes pensées.
- Non non c’est bon merci ! réponds-je précipitamment.
Mais je suis débile ou quoi ?
Pour éviter de me ridiculiser davantage je me dirige vers la sortie et me retourne une dernière fois :
- A une prochaine fois ! lancé-je avant de sortir.
- A une prochaine ! me répond-t-elle.
Je sors définitivement de l’établissement, jurant face à ma lâcheté. La pluie s'est arrêtée de tomber mais le ciel reste couvert et très sombre, il ne faut pas que je traîne.
Avant de reprendre ma route, direction l'arrêt de bus, je m'autorise un dernier regard sur cette jeune femme derrière le comptoir.

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ℍ𝕚𝕤𝕥𝕠𝕚𝕣𝕖 𝕕'𝕦𝕟 𝕤𝕠𝕚𝕣, 𝕕'𝕦𝕟𝕖 𝕟𝕦𝕚𝕥, 𝕕'𝕦𝕟𝕖 𝕚𝕟𝕤𝕠𝕞𝕟𝕚𝕖
Cerita PendekCes petites histoires germent dans mon esprit tard dans la nuit. Afin de trouver le sommeil et d'écourter mes insomnies, je les écris car mon esprit tordue sait pertinemment que je dormirai pas temps qu'elles ne seront pas concrétiser. Aucun début...