Promesse - Avent 2021

Chapitre 4

Le quatrième jour, Harry se leva d'une humeur tout aussi sombre, lançant des regards noirs à tous ceux qui croisaient son chemin. Ron soupira et maudit Hermione et ses livres. Il se jura que si elle avait commis une erreur, il ne le lui laisserait jamais oublier, histoire de lui faire comprendre qu'elle ne pouvait pas tout régler.

La plupart des Gryffondor avaient noté l'état de Harry, et tous s'écartaient prudemment à son passage, histoire de ne pas risquer une confrontation. Même Colin Crivey, fan ultime du meilleur attrapeur de Quidditch que l'école ait jamais connu se tenait loin de lui, méfiant. Et en l'absence d'appareil photo, il ne risquait pas déclencher accidentellement l'apocalypse.

Au petit déjeuner, la table des Serpentard était également très silencieuse. Plus qu'à son habitude. Et Ron ne fut pas vraiment surpris de découvrir que Drago Malefoy était renfrogné et fusillait tout le monde de son regard argent.

*

Depuis la veille au soir, Harry avait l'impression de suffoquer, comme si un poids pesait sur sa poitrine. Cette gêne le mettait en rage, sans qu'il ne soit capable d'expliquer ce qui l'agaçait exactement. Il pouvait trouver mille et une raisons de se plaindre, mais aucune n'était assez importante pour expliquer son état.
Il lui semblait qu'il n'avait jamais été aussi en colère de sa vie, et il ne savait même pas pourquoi.

Quelque part, cette pensée aurait dû l'inquiéter, mais il n'arrivait pas à réfléchir calmement. Son jugement lui semblait faussé, comme obscurci par cette colère venant de nulle part.

En entrant dans la Grande Salle, il serra les poings, luttant pour ne pas hurler. L'oppression lui semblait physiquement douloureuse et il se laissa tomber à sa place avec un grognement.
Puis, il leva la tête.

Il croisa presque immédiatement le regard de Malefoy. Habituellement c'était suffisant pour lui mettre les nerfs à vifs, et pour avoir envie de le bousculer. Mais cette fois... Cette fois, il eut l'impression de respirer librement pour la première fois depuis de longues heures et il sentit ses muscles se détendre légèrement. Il avait une furieuse envie de s'approcher de lui, de s'installer à ses côtés, de se laisser aller, mais il repensa à Hermione et à sa voix moqueuse et il serra les poings.

Il allait lui montrer qu'il n'était pas incapable d'ignorer le Serpentard. Quand il le lui aurait montré, il exigerait des excuses, puis il irait défier ce foutu blondinet pour se détendre.

Harry fronça les sourcils, perplexe. Habituellement, il se voyait plutôt en train de frapper Malefoy. Pourtant, en pensant à l'approcher, il s'imaginait plutôt plaisanter avec lui, et le toucher... amicalement. Il soupira et secoua la tête, mettant cette idée étrange sur sa nuit peu reposante. Il avait mal dormi, il avait fait des cauchemars dont il avait oublié le sujet. Et puis, il y avait cette colère qui faisait vibrer chacun de ses nerfs, comme s'il allait exploser d'un instant à l'autre. C'était une sensation déplaisante qui l'avait longuement tenu éveillé.

Il secoua la tête pour revenir au présent et avala un verre de jus de citrouille, tout en s'arrangeant pour garder Malefoy dans son champ de vision. Le voir face à lui, inaccessible mais présent, était une façon de se sentir mieux, même s'il ne comprenait pas vraiment pourquoi la présence du Serpentard était indispensable.

Il sentit les regards appuyés de Ron sur lui, mais il fit mine de l'ignorer, décidé à ne pas polémiquer avec son meilleur ami. Il ne prêta pas attention à Hermione, toujours furieux de sa petite démonstration de force, et du foutu sort qu'elle lui avait lancé.

Une fois son repas terminé, Harry soupira, résigné. Il s'était senti mieux le temps du repas, et il n'était pas pressé de quitter la bulle de calme qui était miraculeusement apparue. Comme tout le monde se levait, il suivit le mouvement.

La colère revint progressivement alors qu'il cheminait dans les couloirs. Comme s'il s'éloignait d'une oasis, et qu'il était de plus en plus difficile de se maîtriser. Il ne voyait pas en quoi les moments de repas amélioraient son état mais il avait hâte d'être au déjeuner pour prendre quelques instants de repos bienvenus.

Si ses camarades avaient rapidement compris qu'il était presque hors de contrôle, les professeurs ne s'étaient pas encore rendu compte de son état de rage. Cependant, quelques regards pensifs voire inquiets lui firent penser qu'il serait rapidement convoqué pour s'expliquer.

Juste avant le déjeuner, il marchait dans le couloir, poings serrés, lorsqu'il nota que tous ceux autour de lui se crispaient. Un bref instant, la surprise réussi à percer la colère qui l'aveuglait, puis il repoussa toute question, décidant que ce n'était pas important.

Cependant, lorsqu'il vit Malefoy arriver face à lui, et qu'il se rendit compte qu'il allaient obligatoirement se frôler en se croisant, son coeur se mit à accélérer. Étrangement il se sentit plus calme, et il ralentit discrètement ses pas pour que leur contact dure le plus longtemps possible. Leurs yeux s'accrochèrent et Harry prit une grande inspiration, se sentant soudain mieux, comme lorsqu'il volait.

Il nota distraitement que Malefoy cherchait lui aussi son regard, et que lui aussi semblait se détendre et ralentir.

Ils se croisèrent sans un mot, sans même tourner la tête l'un vers l'autre, comme s'ils étaient... indifférents. Mais Harry avait tendu ses doigts pour effleurer au passage la main de Malefoy. Lorsque leurs peaux étaient entrées en contact, il avait eu un bref sourire, provoqué par une poussée soudaine d'euphorie. Malefoy ne l'avait pas oublié non plus, lui aussi avait cherché le contact...

Rassuré, il avait continué son chemin, sans même penser à se retourner, perdu dans ses pensées, revivant encore et encore le contact de leurs mains. Il décida aussitôt qu'il allait sortit la carte du Maraudeur et prévoir ses trajets de façon à le croiser le plus possible. S'il ne réagissait pas à sa présence, Hermione ne se douterait jamais que c'était volontaire. Elle était intelligente, bien évidemment, mais elle n'était pas rusée à ce point...

Il fut plus calme le reste de l'après midi, rêveur. Il ne se rendit pas compte que Ron l'observait, les sourcils froncés, perplexe. Il ne comprenait pas ce qui s'était soudain produit pour que Harry redevienne presque comme avant, loin du garçon colérique qu'il était devenu depuis quelques jours.
Une partie de lui pensa que finalement ce n'était rien qu'une coïncidence, que le sort n'était pas responsable de toute cette situation. Cependant son instinct le convainquit de rester attentifs quelques jours de plus, au cas où.