Les Incarnations - Nivest, la Terre (tome 1)

Chapitre 7

Cadmus

ou

brochette princière

Aldin fit progressivement ralentir Viggó jusqu'à ce que le cheval prenne un rythme de pas tranquille. Il finit par s'arrêter devant le long pont de pierre qui reliait les deux rives du fleuve Izel brillant sous le soleil matinal. Emrys arrêta Snejinka à côté de Viggó et Aldin sourit à son ami ?

- Prêt à entrer à Jamaariah ? demanda-t-elle avec un grand sourire.

Le prince eut un sourire en coin.

- C'est parti, répondit-il avant de lancer Snejinka au grand galop d'un geste souple du poignet.

Aldin eut un rire léger et Viggó se cabra avec un hennissement digne des livres de fiction qu'elle lisait étant enfant, avant de partir à fond de train. En quelques secondes, elle était de l'autre côté du pont, en territoire jamaarian. Elle se retourna vers Nivestia avec un sourire triste, envoyant mentalement tout son amour aux forêts luxuriantes qu'elle laissait derrière elle, avant de refaire face aux déserts qu'elle distinguait au loin, dans les terres de Jamaar. Elle fit un signe de tête à Emrys et les deux cavaliers repartirent de plus belle.

Cela faisait maintenant presque une semaine depuis qu'Aldin et Emrys avaient quitté Brühinald, et le Village manquait chaque jour à la jeune femme. Elle dormait seule dans une tente trop large, chevauchait Viggó jusqu'à en avoir mal au coccyx, et doutait malgré elle chaque jour de son destin de sauveuse de monde, cette idée prétentieuse la mettant déjà bien mal à l'aise. Elle était tout de même heureuse de faire ce voyage – pour l'instant tranquille, certes, mais Aldin était trop pessimiste pour sincèrement croire qu'il allait longtemps le rester – avec Emrys. Le jeune homme était optimiste, joyeux, toujours gentil et serviable, ne se plaignait jamais... Cela faisait beaucoup de bien à la jeune femme d'avoir près d'elle un ami sur qui elle était certaine de pouvoir compter.

Les deux amis galopèrent sous le soleil pendant plusieurs heures et décidèrent de faire une pause à midi pour déjeuner. Quand le Soleil atteignit son zénith, Emrys et Aldin ralentirent leurs chevaux et montèrent un feu de camp pour le déjeuner.

- Ça y est, on est dans le désert, dit Emrys en foulant la poussière au sol du talon de sa botte.

- Et encore, ce n'est que le Désert de Grès, objecta Aldin attends un peu qu'on soit dans le Désert de Dunes...

Sur ces mots, elle lança deux bouts de silex à son ami pour qu'il allume le feu.

- Eh ! s'effraya-t-il en rattrapant les pierres au vol d'une main plus agile que son cri d'effroi ne l'aurait laissé penser. Ne lance pas ça, c'est très coupant ! Tu pourrais au moins les faire léviter...

- Je ne sais pas les faire léviter, rétorqua la jeune femme avec un rire amer. Tu peux nous allumer le feu ? enchaina-t-elle en vérifiant que son carquois était bien plein, je vais trouver de quoi manger.

Emrys s'accroupit devant le tipi de branchages sans faire de remarque et Aldin s'éloigna vers le Nord en quête de petits animaux comestibles pour son ami et elle. Elle prit tout de même le temps, dans sa chasse, d'observer avec attention le paysage autour d'elle, essentiellement composé de gros cactus et de sortes de colonnes de grès jaune qui semblaient se dresser aléatoirement vers le ciel. Elles étaient plus ou moins hautes, les plus petites ne dépassant pas soixante-quinze centimètres et les plus hautes atteignant facilement trois ou quatre mètres. Elles étaient aussi de largeur variables et Aldin se prit à se demander comment ces colonnes s'étaient formées.