8 - ADRIAN

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Mercredi 29 juin 2011

14 h 45

ADRIAN

Après le dîner d'hier soir, je n'étais pas d'humeur à prolonger notre soirée, et Alicia l'a très bien compris. J'avais besoin de rester seul et dans ces moments-là je ne suis pas de très bonne compagnie. Même grand-mère est allée se coucher sans dire un mot. Le douloureux souvenir de mon père est encore bien présent pour elle aussi, continuant à la tourmenter malgré les cinq ans qui nous séparent de sa tragique disparition. Alicia est alors rentrée chez elle en me promettant qu'elle me rejoindrait le lendemain en début d'après-midi. Elle ne devrait plus tarder, à présent. Je suis si heureux de l'emmener en mer pour une balade en bateau. Des années que je n'avais pas navigué. Mais voilà, je suis tendu comme un arc ! À croire que c'est la première fois que j'ai rendez-vous avec une femme. En sera-t-il toujours ainsi entre nous ? Aura-t-elle toujours cette emprise passionnelle sur moi ?

Je jette une dernière fois un œil aux commandes. Cela fait des années que ce bateau n'a pas navigué. Bien que l'entretien soit régulièrement effectué, je préfère vérifier que tout est en ordre. Le bruit d'un moteur attire mon attention. Impatient, je guette l'entrée du manoir et aperçois enfin sa voiture se garer dans l'allée. Alicia sort et me sourit tout en agitant la main. Je la salue à mon tour, heureux comme pas deux.

— Bonjour, Lieutenant ! dit-elle en me rejoignant sur la jetée.

— Bonjour, Alicia...

Elle s'avance vers moi, un chapeau de paille blanc sur la tête et vêtue d'une petite robe d'été vert anis qui lui va à ravir, mettant ses magnifiques yeux en valeur. Je crois que je ne me lasserai jamais de contempler cette jeune femme qui est entrée dans ma vie comme une bombe. Combien de chances y avait-il que je la rencontre dans une simple station-service et, par-dessus tout, qu'elle soit l'infirmière de ma grand-mère ? Non, je dois me rendre à l'évidence que ce n'est pas le fruit du hasard, mais l'œuvre du destin, comme s'obstine à me le faire croire sa charmante patiente.

— Comment va votre pouce, Lieutenant ? demande-t-elle avec bienveillance.

— Il n'est pas très beau à voir, mais je vais déjà mieux, réponds-je en haussant les épaules. Merci de vous en soucier. Prête ?

Elle acquiesce d'un signe de tête et attrape la main que je lui tends afin de l'aider à monter à bord. Je la dévore des yeux, sans savoir si j'ai l'autorisation de l'embrasser, mais vu la distance que Mademoiselle au mauvais caractère a encore imposé entre nous, je crains que la réponse soit non.

—Merci, dit-elle en allant s'installer sur la banquette en cuir blanc.

Alicia admire l'horizon, sans dire un mot. Son sourire me conforte dans l'idée qu'elle est heureuse d'être là avec moi. Peut-être est-elle simplement intimidée ?

Je démarre le bateau et nous prenons le large. Je navigue à vue en me laissant porter sans but précis. Je veux simplement me retrouver seul avec elle et profiter de chaque instant, comme si c'était le dernier. Cela a toujours été ma philosophie de vie et, aujourd'hui, elle résume parfaitement ce que je ressens. Je repars dans quelques semaines et j'ignore de quoi demain sera fait, alors je vais tenter de me faire une place au fond de son cœur, en espérant qu'elle voudra bien de moi...

Je ralentis quelques minutes plus tard et coupe le moteur afin de profiter de la vue époustouflante que nous offre l'océan en ce jour d'été. Seul le bruit des vagues qui s'élancent sur la coque rythme ce calme absolu. Tout est si paisible ici, si serein... L'air marin, associé à l'odeur légère et agréable du sel, est si purifiant, si vivifiant qu'il m'aide à relâcher toutes les tensions accumulées depuis mon retour à Southport.

ADRIAN U.S. ARMYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant