Chapitre 5 Une réunion clandestine

52 22 24
                                    

Axel traverse l'avenue Macron et parvient sur la place Von der Layen. Il s'approche de l'Amazon bar. La devanture de la boutique est composée de deux grands écrans transparents. Ils diffusent une cinématique promotionnelle du nouveau jeu des studios Marvelous. Une adaptation du dernier Disney. Il entre dans l'espace commercial et trouve une place non loin de l'employée qui lui adresse un sourire.
- Europa ! s'exclame la jeune femme, sans grande conviction, lui adressant un sourire artificiel et frappant son torse le poing serré. Bienvenue chez Amazon.
- Europa, lui répond Axel, effectuant à son tour, le salut d'usage.
Il se détend, et s'enfonce dans le fauteuil à adaptation de forme. Il se sent comme avachi dans un nuage. Un hologramme apparaît à environ un mètre de lui. Une image en trois dimensions se surexpose. Une charmante jeune femme, semblable en tous points à l'employée sourit en effectuant un geste gracieux de la main droite.
- Bonjour, Monsieur Honneth. En quoi puis-je vous être utile ?
- Un coca et les news de BFM.
- Avec plaisir. Nous vous debiterons la somme de onze euros vingt, acceptez-vous la transaction ?
- Oui.
- Souhaitez-vous arrondir la somme à l'Euro supérieur, afin d'aider la fondation Rohry John Gates ?
- Oui.
Axel parcourt la boutique du regard. Il n'y a quasiment personne. Un présentateur virtuel apparaît. Il est vêtu d'un costume bleu marine et d'une cravate bleu. L'hologramme restitue les couleurs des vêtements avec une fidélité et une résolution telles, qu'on dirait que le personnage virtuel est réellement présent dans la boutique.
- Europa, le décret du chancelier portant sur la question de l'autorité parentale a été ratifié par le parlement européen en première lecture. Une avancée majeure en matière de progrès social.
Axel sourit. Une pièce en or apparaît devant lui. Il vient de gagner un point de crédit social.
- Notre invitée spéciale, Meira White, conseillère spéciale, nous explique ce que cela va changer dans notre quotidien.
Une femme ravissante prend la place du présentateur. Elle semble avoir la trentaine. Elle a de longs cheveux noirs, légèrement frisés et la peau mate.
- Effectivement, c'est une avancée majeure et je pense tardive à laquelle nous assistons. A présent, chaque parent bénéficiera du soutien d'Europa. Nous nous affranchissons d'une législation obsolète qui maintenait toutes les formes de déterminisme social que nous connaissons. A partir du premier janvier, tout sera différent. Tout enfant né au sein de la Federation Communzutzire d'Europa sera avant tout un enfant d'Europa. Il sera à présent possible de soustraire un enfant d'une condition défavorable afin de lui donner toutes les chances d'épanouissement dans une autre cellule familiale ou dans un centre éducatif. Enfin, la loi nous permet de parvenir à un idéal d'égalité.
- Amazon, stoppe les informations, murmure Axel.
Le logo de l'entreprise Samsung apparaît subrepticement puis l'hologramme disparaît. Axel sort une feuille de papier de la poche de sa veste de cuir synthétique et se dirige vers l'employée.
- Vous auriez un stylo s'il-vous-plaît ?
- Oui, bien sûr, répond-elle aimablement, lui tendant immédiatement un stylo portant le logo d'Amazon.
Axel s'en saisit et écrit rapidement Pierre Jovanovic sur la feuille, la lui tendant sitôt qu'il a fini d'écrire. La jeune femme prend le morceau de papier du bout des doigts. Elle jette un œil à gauche, puis à droite. Elle considère ensuite son interlocuteur, lui adressant un regard appuyé. Elle semble le jauger. Elle a abandonné son sourire artificiel. Elle hoche ensuite la tête, déchire le papier et le jette dans une corbeille. Elle fait signe à Axel de la suivre. Il lui emboîte le pas. L'employée ouvre une porte au fond de la salle et emprunte un couloir. Elle ouvre une seconde porte qui donne sur des escaliers. Elle pointe du doigt des escaliers qui descendent vers ce qui ressemble à une cave. Axel descend les marchés, la porte se referme derrière lui. Il porte sa main à son torse et presse légèrement sur sa veste. Il perçoit les formes de son arme à travers le cuir synthétique. Cela le rassure. Il entend plusieurs personnes parler.
- Ces salauds sont allés trop loin, putain, ils vont même nous prendre nos gosses ! Il faut les frapper au cœur, il faut faire sauter le Parlement, ou mieux, la chancellerie ! menace une voix grave.
- Bien sûr, bonne idée ! Tu veux nous faire un remake de l'incendie du Reishtag ? ironise une voix féminine.
Axel inspire une grande gorgée d'air et se décide à descendre les marches restantes. Il parvient à une salle exigue, faiblement éclairée par un petit bandeau LED. Quatre hommes et une femme sont assis autour d'une table de bois usé. Ces derniers s'arrêtent aussitôt de parler et dévisagent Axel, apparemment surpris par son arrivée.
- T'es qui toi ? demande un homme d'environ cinquante ans aux cheveux grisonnants.
- Je suis Hannibal, j'ai été testé et sélectionné par Spartacus.
- Bien, bien, se rasséréne le quincagénaire. Notre Spartacus va bien ?
- Oui, il vous fait dire que l'objectif treize sera atteint dans trois jours.
- Parfait, parfait. Bon, tu sais pourquoi nous sommes là. Je suis Vercingétorix, voici Néo, Jean Moulin et Kahina.
- Enchanté,
- Vercingétorix, attends avant de parler davantage, se méfie Kahina. Ca me paraît étrange que Spartacus ne nous ait pas prévenus que cet inconnu allait débarquer.
La mefiancec se lit dans le regard de la femme. Ses cheveux courts et ses yeux cernés lui confèrent un air grave. Axel songe qu'il est impératif de la convaincre. Il s'apprête à prendre la parole, mais Vercingétorix intervient.
- Il m'a parlé de lui, tente de rassurer le quincagénaire. Spartacus devait être là aujourd'hui, il a certainement dû envoyer ce jeune homme à sa place.
L'homme semble chercher confirmation chez le nouvel arrivé.
- C'est une des raisons pour lesquelles je suis là oui, indique Axel, employant le ton le plus assuré qu'il peut.
- Mouais, tu m'as l'air sacrément balèze, reprend Khaina toujours aussi méfiante. Toi, tu m'as l'air d'être un augmenté.
- Oui, c'est vrai.
Comment nier l'évidence ? Sa musculature est bien trop développée pour être naturelle. On remarque au premier regard que ses bras et ses jambes ont été modifiés. Son corps entier a subi des modifications génétiques. De l'alliage de métal, des fibres de polymère et des composants micro electroniques ont été insérés partout dans son corps, en particulier dans ses bras et ses jambes. Même ses yeux ont été changés.
- Et tu crois qu'on va faire confiance à une machine de l'Empire ?
- Spartacus l'a fait, répond Axel sans se démonter. Tu penses qu'il se serait trompé ?
- Bien, alors je suis pressée d'entendre ton histoire l'augmenté. Comment un produit à plusieurs millions d'euros arrive-t-il à vouloir mordre la main qui l'a fabriqué ?
- Mon histoire ? répète Axel, comme s'il ménage une forme de suspens. Mon père s'est barré avant ma naissance. Ma mère buvait comme un trou et ne s'occupait ni de moi, ni de ma sœur. J'ai très tôt compris que j'étais issu d'un milieu pourri et que ma seule échappatoire, c' était l'école. J'ai eu la bourse au mérite et j'ai intégré une école militaire. J'ai été blessé au combat et on m'a rafistolé.
Axel expose son bras afin d'illustrer son propos. Lorsqu'il serre le poing, il est possible de distinguer le mouvement de plusieurs pièces mécaniques sous sa peau artificielle.
- Je suis ensuite reparti au combat, et j'ai vu à quel point on nous prenait pour de vulgaires objets jetables. Tout cela pour l'intérêt de quelques nantis, de quelques privilégiés. J'ai toujours voulu servir un idéal de justice et de progrès. Je n'ai servi que de chair à canon. Mon meilleur ami est mort sous mes yeux. Pour rien !
Vercingétorix opine de la tête, Khaina a toujours l'air aussi peu convaincue.
Il y a une grande part de vérité dans ce que vient de dire Axel. Il a effectivement été blessé lors d'une mission. En fait, il n'a menti que sur deux points. Il est loin de vouloir s'opposer au système, bien au contraire. Ce qui conduit au deuxième élément au sujet duquel il vient de tromper ses interlocuteurs. Il n'a jamais été militaire. Il est est un agent de police. Sa mission est d'infiltrer un gigantesque réseau terroriste.

Après la finOù les histoires vivent. Découvrez maintenant