VI - Brasier

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La chemise souillée de sang avait fini sa course sur le sol.

Après avoir longuement hésité, Hannah avait entrepris de dénuder le corps meurtri de Thomas Shelby. Tout d'abord armée d'une compresse et d'une cuve d'eau fraiche, elle avait commencé par panser ses blessures les plus inquiétantes. Heureusement, ce n'étaient que des plaies superficielles, et Hannah s'en trouva rassérénée. Qui avait bien pu lui faire cela ? Et pourquoi ? Qu'aurait-elle fait, si son patron avait été sérieusement touché ?

Était-il encore en danger ? 

Ses pensées se bousculaient de manière incontrôlable, dans un chaos magnifique et brutal.

- Qui vous a fait ça, Monsieur Shelby ?

- ...

- Jamais je... comment ont-ils pu... si je savais qui vous a fait ça, je jure que...

Hannah déblatérait sans pouvoir s'arrêter, même si elle savait que Thomas ne l'entendait pas, perdu dans un abîme de confusion et de douleur. Pourtant, elle aurait voulu lui dire combien elle s'inquiétait pour lui. Combien elle aurait voulu le protéger - bien que cela n'était pas l'affaire d'une femme, selon la bienséance. Oui, elle aurait aimé avoir la force, les armes pour le protéger, tout comme lui la protégeait de la misère et de la pauvreté. C'était grâce à lui qu'elle pouvait subvenir aux besoins de sa famille, et elle comprit qu'elle lui en était immensément reconnaissante.

Mais pas seulement. Non, il y avait autre chose. Le cœur battant, Hannah le contemplait, offert, dans une complète et sublime fragilité.

Bientôt, ses doigts parcoururent sa peau. Rugueuse et ferme, elle lui fit penser à celles des abatteurs de la mine de charbon de sa ville natale. Ses propres mains remontèrent vers son cou, effleurèrent la courbe de sa nuque, comme dans un rêve.

Perdue dans ses pensées, elle se fit la réflexion que rien ni personne ne pourrait l'empêcher de l'embrasser, ici et maintenant, sur une impulsion absurde et exaltée.

- Humm...

Thomas avait émis ce qui ressemblait à un grognement sourd. Il grimaça, encore groggy, et bascula légèrement sur le côté pour se tenir les côtes. Il réalisa alors, en se touchant, qu'il était à demi nu. Il ouvrit les yeux, surpris.

- Je... Qui m'a ?

- Pardonnez-moi, Monsieur Shelby, je ne voulais pas vous mettre dans l'embarras ! s'empressa de se justifier Hannah, paniquée.

- C'est vous... toi... Hannah, murmura-t-il d'une voix hachée.

Son regard s'accrocha au sien. Le bleu de ses yeux, hypnotisant, allait lui faire perdre la raison. Elle voulait s'y noyer, immédiatement, et sans retenue.

- Thomas...

Le sang dans ses veines ne fit qu'un tour. Sur une impulsion, elle s'empara de ses lèvres. Le goût du sang y était encore présent, métallique. Ses mains coururent le long de sa nuque, caressèrent son crâne rasé, puis les mèches de ses cheveux. Sa bouche contre la sienne, un ballet moite et brûlant commença entre leurs deux langues enfiévrées.

Elle n'avait plus aucune maîtrise sur la situation.

Que faisait-elle ?...

Thomas, que cet assaut avait parfaitement éveillé, l'avait empoignée fermement par les hanches, et elle sentit ses doigts parcourir sa peau, la toucher. Il répondait à son baiser avec autant de surprise que d'avidité.

- Mhh... Hannah...

A bout de souffle, Thomas se perdit dans son cou, la dévorant de baisers. Il l'embrassait lentement, en prenant son temps. Comme s'il avait attendu cet instant pendant de longues années, et voulait le savourer au maximum.

- Tu n'as rien d'une femme ordinaire... Sais-tu que ce ne sont pas des manières, de se jeter ainsi sur son employeur, à demi-conscient de surcroît ?

- J'avoue que ce n'est pas dans mes habitudes, mais en cet instant, je dois dire que je me moque bien des convenances, Monsieur Shelby...


Black Stallion || PEAKY BLINDERSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant