1- 'ongokxvin

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'ongokxvin, naître en na'vi. Ici, sur Pandora, les Na'vi disent qu'on naît deux fois. La deuxième naissance c'est quand on a gagné sa place dans le peuple, pour toujours. J'ai l'horrible sentiment qu'il me manque la première naissance, celle où tu vois tes parents pour la première fois, puis en attendant la deuxième ils t'éduquent, te font grandir, t'apprennent la chasse, là pêche, à nager, à courir dans les arbres. Il me manque tout ça. Le vide que je ressens est comme celui d'un arbre à qui on a coupé les racines et vidé le tronc mais qui pourtant, garde une écorce dure et de belles feuilles vertes. Au printemps fleuri, en été donne ses fruits, en automne perd ses feuilles et en hiver gèle. De l'extérieur tout paraît normal, un arbre ordinaire qui a un cycle classique valable pour presque tous les arbres. Mais si vous ouvrez le tronc, doucement, avec prudence et douceur pour éviter que l'arbre creux ne s'écroule, vous trouverez sûrement à l'intérieur, du vide certe, mais aussi de la pourriture.

- Neyite, murmura une voix à l'entrée de ma cabane.

Une cabane où j'étais seule. Tout le monde vivait avec sa famille, c'est une tradition à laquelle je ne peux appartenir. Je n'y vois aucun inconvénient, toute la journée je suis entouré de la tribu, j'ai une amie en particulière qui se nomme Tsireya, c'est la fille du Olo'eyktan (chef) et grâce à elle j'ai toujours pu m'intégrer plus ou moins dans leur groupe même si je vois très bien le mépris de Aonung et ses amis envers moi.

- Neyite viens, siffla Tsireya dont j'ai reconnu la voix.

Je sortis doucement de la cabane sans faire aucun bruit. La nuit était sombre signe d'un orage proche. Je ne sais pas où va nous mener cette escapade nocturne et j'ai un peu peur, pas pour moi évidemment, mais pour Tsireya. Ça ne lui ressemble pas de vouloir tenter ce style d'aventure avec son frère et les amis de celui-ci. Ma confiance en eux est presque inexistante, depuis toujours il me joue des farces qui ne me font pas beaucoup rire mais qui, malgré tout, m'ont endurcis. Je ne l'ai jamais dit à Tsireya car j'ai besoin d'un allié dans la tribu et si elle apprend ce qu'il c'est passé, la possibilité qu'elle m'abandonne est assez élevée. Même si je refuse de me l'avouer, être encore abandonner me briserait.

Ma seule famille ici est Eywa, la divinité des Na'vi. Ils croient en un réseau d'énergie immense qui relie chaque être vivant et qui leur permet de communiquer entre eux. On dit toujours que toute énergie n'est que prêtée et qu'un jour, il faut la rendre. Eywa vit littéralement dans la nature et la nature vit grâce à Eywa. Je la sens toujours prêt de moi comme si elle s'accrocher à me rassurer, à me donner du courage et me faire avancer.

- Salut la violette ! me dit Aonung dans l'oreille.

Je sortis brusquement de mes pensées, réveillé par cet horrible surnom. Comme si je n'étais pas assez différente avec ma maladie et mes mains à cinq doigts tout les deux signes d'une appartenance au sang de démon et ma forme physique du peuple de la forêt, ma peau est violette avec des traits verts. Les enfants du peuple me regardent toujours de travers, effrayés parfois. Les mamans m'éloignent de leurs petits de peur que je sois contagieuse, et moi dès qu'ils me regardent je brûle sous leur jugement.

Je lui souris pour lui montrer que ça ne m'atteint pas car c'est vrai, après toutes ces années, son regard sur moi ne veut plus rien dire, il en a trop fait. De fois je me demande si en réalité il le pense vraiment, si je le dégoûte vraiment.

- Bon vous êtes prêt ! Lança Kawng

Son prénom signifie mauvais ou encore maléfique alors je ne lui ai jamais fait confiance. Pour les autres, je me suis déjà laissée convaincre et c'était une grave erreur, évidemment, mais j'étais trop bête et naïve pour le voir.

Tout le groupe se mit à pénétrer dans la forêt. Je reste vers le fond afin d'observer un peu plus au calme là beauté de notre nature, le travail de Eywa. Sous nos pieds, les plantes fluoresçaient, au-dessus de nos têtes les branches des arbres bruissaient après le passage d'oiseaux nocturnes ou d'autres animaux de la forêt. Une forte envie de quitter le groupe pour aller courir dans les arbres me prit. C'est comme un instinct pour moi, dès que mes pieds touchent l'herbe je ne pense plus qu'à ça. Grimper dans les arbres, sauter de branche en branche, monter tout en haut de la montagne. Il y a peu de nature verte ici, alors dès que j'en vois j'ai envie d'en profiter. C'est dans mon sang, ça se voit sur mon physique. C'est en moi et sur moi, cette envie primaire me colle à la peau mais je me résigne en me rappelant que je devais absolument protéger Tsireya.

TsaheyluOù les histoires vivent. Découvrez maintenant