When Burns The Blood (WSTD #2)

Chapitre 18

Ce fut Meltem qui le remarqua en première, forçant ses compagnons à accepter que ce n'était pas simplement un jeu de la montagne mais bel et bien une boucle. Une boucle qu'ils devaient déjà avoir parcourue une dizaine de fois avant de réaliser leur erreur. Plutôt que d'affronter le problème, ils décidèrent de s'arrêter pour quelques heures, le temps de se reposer pour recouvrer un esprit acéré capable de les faire quitter ce piège.

Aryeh avait plus que jamais conscience qu'ils ne tiendraient plus longtemps à ce rythme. Il le voyait dans le visage creusé de ses compagnons, dans leur pâleur, dans les tremblements de leurs mains, dans la lueur fiévreuse de leurs yeux.

Au vu des regards que Meltem tournaient vers lui, elle savait qu'il avait choisi la mauvaise fourche. Son silence à ce sujet ne pouvait dire qu'une chose : elle avait conscience que c'était le seul choix viable.

Lixian vint s'asseoir à côté de lui, le visage fermé. Lui aussi devait avoir deviné pour la bifurcation. Comme s'il avait lu dans ses pensées, il dit :

- Tu aurais dû nous prévenir que tu changeais l'itinéraire. Et tu n'aurais pas dû prendre autant de risques.

- Je savais bien que tu t'inquiétais pour moi, éluda-t-il avec un sourire en coin.

- Est-ce une raison pour prendre des risques insensés ?

- Allons, Lixian. Nous savons tous les deux que si j'avais réellement été si proche de la chute que ça, tu m'aurais sauvé. Pas un seul instant n'ai-je douté de ta capacité à me garder en vie si jamais mon plan ne fonctionnait pas.

Lixian parut se renfermer encore plus. Aryeh fronça les sourcils en l'observant. Quelque chose dans ce qu'il avait dit lui avait déplu. Il étouffa un soupir. Ça ne ressemblait pas à son ami de se montrer aussi susceptible. Pas que quiconque dans leur groupe agisse encore normalement, à ce stade de leur voyage.

Aryeh lui donna un coup d'épaule avec un sourire.

- Je te l'ai déjà dit, toi et moi, on va devenir invincibles. Entre ta magie et mon épée, plus personne ne pourra nous résister, pas même la mort. Il faut juste que j'arrête de la titiller.

- Comme si tu pouvais t'empêcher de te mettre en danger, répliqua sèchement Lixian.

- Touché, grimaça Aryeh. Je fais de mon mieux, pourtant. Juré !

Lixian roula des yeux et se terra dans le silence. Aryeh n'insista pas, sentant qu'il était hors d'atteinte et que rien de ce qu'il pourrait dire ne l'atteindrait. Aussi se contenta-t-il de poser sa tête contre son épaule en mâchonnant ce qu'il restait de la viande de chamois sèche, à la limite de l'indigeste.

- Je n'aurais cru dire ça mais je rêve d'une bonne soupe d'asperges, soupira-t-il. De carottes rôties. Je crois que je ne me plaindrais même plus devant des navets.

- Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour un bol de la salade de choux de ma mère, ajouta Naos. Et je déteste le chou, peu importe sa couleur ou sa forme.

- Pour moi, ce sont les pois, dit Meltem. Mais je mangerais tout le stock si ça voulait dire que je pouvais sortir d'ici.

Le silence qui suivit fut plus lourd que tous ceux qu'ils avaient déjà vécus. Le dégoût et la faim se disputaient leur attention, leurs corps. Aryeh ne pouvait qu'espérer qu'ils arrivent rapidement chez les Montagnards. Au point où ils en étaient, peu importait leur réaction. Ils pourraient les malmener, les chasser de leur territoire, les menacer... Du moment qu'ils retrouvaient le monde extérieur, tout serait préférable à l'horreur d'être bloqués sous terre, sans lumière, avec de la viande à moitié rassie pour seule nourriture.