Chapitre 4

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Nous nous arrêtâmes devant une petite maison rongée par les ombres de la nuit.

Des grands arbres dénudés étaient postés devant ses portes tels d'étranges gardiens, des soldats solitaires ayant pour mission de protéger une maison aux briques sombres. Grands, majestueux, ils élançaient leurs branches vers le ciel étoilé, lançant ainsi des ombres effrayantes aux alentours, comme si une multitude de mains grandes et perverses sortaient des tréfonds de l'obscurité croissante.

La maison, quant à elle, n'avait pas grand-chose d'extraordinaire, rien d'hors du commun. Ses fenêtres trop petites reflétaient les lueurs dansantes de nos lanternes tandis que, silencieuse, endormie, elle nous observait avancer en sautillant vers sa porte. Trois coups secs, brefs furent donnés par le majordome puis elle s'ouvrit, dans un grincement effroyable et inquiétant, sur un hall sombre pauvrement décoré. Un tapis d'une couleur brune bien fade s'étendait jusqu'à un vieil escalier sentant le bois pourri, des murs dénudés de tout portrait, tableau, simplement décorés par un papier-peint dont les couleurs et motifs s'étaient effacés depuis longtemps. Une petite bougie éclairait quand à elle seule toute l'entrée, tandis que des bruits de pas s'approchèrent et qu'une petite voix lança :

-C'est pas trop tôt ! Vous avez mit une journée pour venir !

En sursautant, le majordome leva des yeux inquiets vers une femme, une magnifique femme aux cheveux clairs, bleutés, ayant des reflets argentés et dont les yeux d'un bleu limpide se plissèrent, malicieux. Elle sourit, et son visage s'éclaira avant de s'élancer et de se diriger vers nous à grandes enjambées. Ou plutôt vers le majordome, qui, à l'approche de cette silhouette pauvrement vêtue recula et me lança un regard effrayé, inquiet, peut-être même terrorisé.

-Oh Gray, vous m'avez tellement manqué ! Pourquoi diable partez-vous aussi souvent dans des voyages solitaires, loin de moi ?

Il déglutit, ferma les yeux et baissa la tête, résigné par l'attente longue et inconfortable d'un baiser, d'une embrassade.

Puis une autre voix retentit, sévère :

-Jubia ! Laisse ce pauvre Gray tranquille ! Et toi Gray, arrête d'avoir peur de Jubia, c'est ridicule !

Je reculais rapidement, effrayée, impressionnée par cette voix dure, grave, sévère, admirable qui retentit dans la petite maison. Essoufflée, manquant d'air, je fixais, incrédule, une grande silhouette descendre les escaliers majestueusement, telle une reine qui rejoint ses sujets. Des longs cheveux écarlates, flamboyants dans les lueurs de la bougie, retenus par un ruban noir; c'est la première chose que je vus, estomaquée, le cœur battant, le souffle coupé. Puis ce fut des yeux violets qui nous regardaient en se plissant, nous jugeant d'une façon étrange, presque bienveillante.

En effet, la femme qui descendaient les escaliers lentement, doucement, avait quelque chose de noble, de digne dans ses traits, dans son regard, dans sa manière de marcher, la tête haute. Elle me rappelait ces femmes que je voyais lors des bals et des fêtes, ces femmes qui se promenaient en regardant les autres de haut, en les jugeant, en se moquant, en les larguant.

Elle me rappelait ma mère, forte et belle, disparue, engloutie par la mer.

-Erza, je te jure, j'ai rien fait, c'est elle qui m'a sauté dessus !, cria Gray le majordome d'une voix paniquée, essoufflée, désemparée.

-Oh Gray, je sais bien que vous m'aimez, alors arrêtez de m'ignorer, je vous en supplie, rétorqua Jubia en serrant le pauvre homme dans ses bras d'une manière affectueuse que je n'avais jamais vue auparavant.

Elle rougissait de plaisir et gardait ses yeux fermés, tandis que son sourire s'agrandissait encore.

Un soupir résonna dans la petite entrée, tandis qu'Erza descendait finissait de descendre les escaliers, le regard ennuyé mais souriant, l'air heureuse de revoir ses amis, sa famille.

Embrasse-moi princesseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant