𝟎𝟑. Say What Again

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Le lendemain, bien avant l'aube, Sasuke quitta la froideur solitaire de son appartement morne pour les rues glaciales dans lesquelles soufflait un tétanisant vent de marbre frappant la silhouette du jeune homme dès l'instant où il déboula dans l'avenue. La bise le malmenait, impactant avec rudesse la peau découverte de son visage terne, allant même jusqu'à faire perler une larme au coin de ses yeux d'encre, et envoyant valser les pans de son long manteau au tissu rêche qui ne le protégeait guère réellement des inhumaines températures flottant dans l'atmosphère de ce mois de décembre.

S'engouffrant rapidement dans sa voiture qui se voyait recouverte d'une conséquente couche de givre, Sasuke alluma le contact et laissa le moteur tourner un certain moment, le temps pour le véhicule d'être à nouveau fonctionnel, alors qu'il songeait à ses plans de la journée. S'il s'était levé aussi tôt, c'était dans le but de pouvoir découvrir de ce que tramait Itachi ; le jeune homme s'était alors mis en tête de suivre son aîné, et s'était levé aux aurores pour cela. En effet, son frère étant déjà quelqu'un de matinal, le fait qu'une mystérieuse affaire soit en cours pousserait sans aucun doute ce dernier à quitter son logis à une heure où le commun des mortels était encore emmitouflés dans la douce chaleur de leurs draps épais.

Prenant la direction du quartier du Queens où le plus âgé louait un petit appartement, Sasuke arriva à destination pour le moins rapidement, c'est à dire en une vingtaine de minutes seulement, trajet qui se voyait être deux fois plus long en temps normal en raison de la circulation ; il fallait dire qu'il n'y avait pas grand monde à cinq heures du matin. Il gara son véhicule à proximité de la porte menant au hall de l'immeuble dans lequel logeait son aîné et patienta, dans le froid de l'hiver, le tumulte de ses interrogations et le silence de la nuit. 

Afin de se créer un semblant de compagnie, le jeune homme plongea instinctivement une main dans la poche de son manteau afin d'en tirer un paquet de cigarette et son briquet puis, une fois le bâtonnet de nicotine pincé entre ses lèvres froides, il vint l'embraser et en inspira une première bouffée salvatrice qui s'aventura aussitôt jusqu'au cœur de sa trachée. Laissant l'émanation toxique voguer un certain temps en lui, le brun finit par l'exhaler dans l'habitacle du véhicule, le tout sans lâcher ne serait-ce une seule seconde la porte du hall des yeux, son frère pouvant surgir à tout instant, et disparaître aussi rapidement qu'il était apparu dans l'encre nocturne.

Comme il s'en doutait, signifiant que son idée de se lever à une heure aussi avancée de la journée - pour ne pas dire une heure aussi tardive de la nuit - n'était pas vaine, il aperçut Itachi quitter l'immeuble dans lequel il résidait, une demi-heure environ après son arrivée. L'aîné gagna rapidement son véhicule et s'engagea aussitôt sur l'avenue, laissant derrière lui un épais nuage de fumée recraché par sa Chevrolet qui, visiblement, n'appréciait guère d'être mise en marche à une heure aussi matinale, dans un froid aussi glacial. Laissant la brume toxique se dissiper une poignée de secondes durant, Sasuke s'empressa à son tour de rejoindre le bitume verglacé, faisant crisser les pneus contre la neige qui venait tout juste de chuter des cieux endormis, et entama sa traque avec précaution ; Itachi se trouvant être quelqu'un d'extrêmement prudent et attentif, le jeune brun était on ne peut mieux placé pour le savoir, le cadet pouvait se faire repérer très rapidement s'il n'y prêtait guère attention. Gardant donc une certaine distance, Sasuke progressa avec précaution dans les couloirs de bétons quadrillant la ville de New York de leur immensité algide et roula ainsi, une dizaine de minutes durant. Au fil des quartiers défilant au travers de son pare-brise, sur lequel subsistait une fine pellicule de givre fermement agrippé à la paroi translucide, il assista à la passation de relais entre la vie nocturne et l'aube accueillant les travailleurs matinaux : les sombres affaires qui ne se tramait que dans l'anonymat de la nuit se devait de laisser place aux personnes n'ignorant pas l'heure à laquelle le commun des mortel quittait les bras de Morphée.

Cosa Nostra | 𝐍𝐀𝐑𝐔𝐓𝐎 𝐔𝐀Où les histoires vivent. Découvrez maintenant