Chapitre Dix-Huit

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Christina rentra en trombe dans le dortoir et se jeta littéralement sur moi.

- Christina, que se passe-t-il? m'enquis-je alors que je m'apprêtais à m'en aller prendre ma douche.

Nous étions le soir et demain matin aurait lieu notre deuxième passage dans le paysage des peurs. Le dernier avant le test final.

- C'est Al, souffla-t-elle alors.

Nous nous rendîmes en direction de l'infirmerie, Christina n'avait rien voulu m'expliquer de la situation. Arrivé à sa porte, Anna s'y trouvait déjà, les yeux rougis par les larmes.

- Anna, soufflais-je. Que se passe-t-il? m'inquiétais-je en espérant que rien de grave n'était arrivé.

Elle nous attira au bout du couloir, comme pour éviter qu'on entende notre discussion.

- Il va bien? insistais-je, impatiente d'avoir ne serait-ce qu'une info.

Elle passa le bout de ses doigts sous ses yeux, comme pour effacer les dernières traces de maquillage qui auraient put subsister après une crise de larme.

- Il dort, me rassura-t-elle. Il a été blessé à la tête mais, Dieu merci, rien de grave.

- Que s'est-il passé? insistais-je.

Christina était anormalement silencieuse, surtout au vu de son statut de transfert Sincère. Elle était surement déjà au courant.

- Al... a fait une mauvaise chute dans la fosse, murmura Anna, sa voix se brisant à la fin. 

Sous le choc, je me laissais appuyer sur le mur. 

- On l'a ...poussé? soufflais-je, me souvenant alors que quelque heures plus tôt lui même avait voulu me jeter dans la fosse.

Anna détourna son regard et tordit ses mains l'une contre l'autre.Elle murmura quelques excuses et s'en alla, me laissant seul avec Christina. Je vit Anna pénétrer dans la chambre de repos où devait se reposer Al en ce moment même et refermer doucement la porte derrière elle.

- Mais qui l'a poussé? insistais-je alors, espérant que Christina me réponde.

Christina releva ses yeux vers moi, les fermants quelques instants comme pour peser les pour et le contre et les rouvris alors, plongeant ses yeux bruns dans les miens.

- On ne l'a pas poussé, Tris.

Je fronçais des sourcils, incertaines de bien comprendre.

- Tris. Il s'est jeté lui même dans la fosse. Il a tenté de se suicider.


Haletante, les joues baignés de larme, je parcourais les couloirs vide des quartiers, suivant un chemin dont les souvenirs m'étaient encore vagues. J'arrivais alors devant la porte que je cherchais depuis je ne sais plus combien de temps et frapper à sa porte du mieux que je pus, toute force m'ayant quitté. Je n'arrivais pas à éteindre mes sanglots, le sommeil m'avait été introuvable. 

"Tout est de ta faute", me murmurait sans cesse cette voix dans ma tête. "Tout est de ta faute".

Je ne sais pas combien de temps s'était écoulé depuis que j'avais frappée à sa porte, mais il finit par l'ouvrir, le visage ensommeillé.

- Tris?

Je priais alors pour qu'il ne pose aucune question. Aucune. Je savais juste que j'avais besoin de cette présence et qu'il était le seul à pouvoir me l'apporter. Il m'inspecta quelques instant, comme pour analyser la situation et m'ouvrit le passage après s'être assuré que le couloir était bien vide.

- Entre, m'intima-t-il dans la pénombre environnante.

J'éteignis le réveil. Il était 5h30. Je ne devais pas trop m'attarder, dès 6h certains Audacieux étaient déjà debout. Je passais mes mains sur mes tempes, une migraine s'éveillant déjà. Les souvenirs de la veille et de comment j'étais arrivé au dortoir de Quatre me revinrent en tête et je m'en morfondais. Quatre m'avait veillé une partie de la nuit alors que mes sanglots n'avait pas réussis à se tarir. Il m'avait certifié que rien n'avait été de ma faute, qu'Al s'était laissé sombré dans la culpabilité. Que son classement et sa peur de devenir Sans-Faction avait dut l'aider à en venir à l'idée que le suicide était la meilleure solution. Je n'avais pas le souvenir de m'être endormie. Je sentis les draps se mouvoir près de moi et un bras en émerger . J'observais alors, interloqué, sa main tâter le matelas puis suivre son parcours sur mon corps. J'ouvris la bouche, bouche bée, ne pouvant sortir un mot. La main se figea sur ma cuisse et j'observais Quatre bondir de sous les draps. Il cligna plusieurs fois des yeux, surement ébloui par la lumière de l'aube.

- Bon...matin, balbutiais-je alors en le fixant, sans vraiment le voir, encore interloquée par la situation.

Je le vis passer ses mains sur son visage, grommeler quelque chose d'incompréhensible avant de sortir du lit. Je m'attardais quelques instants sur le lit, observant Quatre qui restait debout, au milieu de la pièce, encore dans les vapes.  Comme la fois précédente, il n'avait pas l'air au mieux de sa forme. Cela me confirmait bien qu'il n'était pas du matin... enfin, il est vrai qu'en plus de cela je l'avais réveillé au beau milieu de la nuit. 

Je me décidais aussi à sortir du lit. Je ramassais mon gilet que j'avais posé cette nuit sur sa tête de lit et l'enfilait. Je me postais en face de Quatre qui avait toujours son visage dans les mains, au milieu de la pièce, encore très peu réveillé.

- Quatre...? murmurais-je incertaine de le sortir de son moment d'éveil.

Il parut tilter, se frotta les yeux et plongea ses yeux bleu endormis dans les miens. 

- Hey, me salua-t-il enfin de sa voix rauque et endormie.

- Hey, lui retournais-je avec un léger sourire penaud. Je vais y aller, je crois.

Il fronça les sourcils et se massa l'arcade sourcilière, comme pour remettre ses pensées en ordre puis un éclair de compréhension traversa ses yeux. Il acquiescement et passa son regard sur moi, puis sur la porte de sa chambre.

- Fais attention, m'intimida-t-il.

- Ne t'en fais pas...Et...heu, bafouillai-je misérablement. Je voulais m'excuser pour le dérangement...

Il pinça des lèvres et son froncement de sourcil ré-apparu derechef. Un sourire amusé apparu sur ses lèvres, qu'il cacha bien vite de sa main, l'air de se retenir de rire de vive voix.

- Hein...? m'étonnais-je de sa réaction, le fixant incrédule.

- Toujours à excuser pour rien, une vrai petite Altruiste, me lança-t-il dans un sourire retenue avant de me tourner le dos et d'ouvrir son armoire à vêtement.

"Une vrai petite Altruiste!" résonna une voix dans ma tête, tel un souvenir oublié.

Je clignais des yeux, reprenant mes esprits et levais mes yeux au ciel.

- Merci alors, lui murmurais-je sincèrement alors qu'il retournais son regard vers moi.

- Allez, files! me lança-t-il gentiment en ignorant mon remerciement, levant les yeux au ciel.

Je ris légèrement et m'en allait donc. Cette fois je ne m'attardais pas. Je me précipitais en direction de mon dortoir et profitais du fait de n'avoir croisé personne pour me glisser sous les draps, comme si je ne les avais jamais quitté. Vingt minutes plus tard je les entendis émerger, j'en fis donc de même. Lorsque je croisais le regard de Christina, elle leva un sourcil, le regard plein de sous entendu. Un regard que je sentit mal. Un regard qui voulait dire qu'elle savait.

Et j'espérais que ce n'était pas ce à quoi je pensais.



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