CHAPITRE 8

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Point de vue de MJ

― Tu vas bien ? s'inquiète Ned, m'extirpant de ma rêverie. T'es bizarre. 

Il est assis par terre quelques mètres plus loin, son ordinateur ouvert sur les genoux. Il a arrêté de taper frénétiquement sur le clavier pour me regarder, les sourcils froncés. Probablement que je paraissaient distraite et perdue dans ces pensées qui me poursuivent chaque heure et même la nuit depuis quelques jours. 

― Je suis juste un peu préoccupée, rien de grave. 

Rien de grave, vraiment ? Je pense que se faire effacer la mémoire par un sorcier peut rentrer dans la catégorie des problèmes "graves". Mon  esprit est en boucle dessus depuis que Peter me l'a avoué, au point de me donner la migraine quand j'y réfléchi trop. Si ces souvenirs ont existé, j'ai forcement dû en garder une trace, quelle qu'elle soit. Une impression, une sensation de déjà vu. 

La science affirme bien que rien ne peut véritablement se perdre, mais ne fait que se transformer. La magie obéit-elle au mêmes règles ? Je refuse que ces moments aient simplement disparues. Je refuse de ne pas m'en rappeler. Je refuse d'avoir vécu une histoire avec quelqu'un et de l'avoir oublié. 

― Tu... tu veux en parler ? me propose Ned. 

Je ne peux m'empêcher de rire tant ce type de propositions ne lui ressemble pas. Pourtant, extérioriser ce qui m'angoisse me ferait indéniablement du bien. Mais pour en parler à qui ? Ned est mon unique ami et confident, et également la seul personne qui puisse connaître l'identité secrète de Spider-Man. Sauf que ce n'est pas mon rôle de lui dévoiler, c'est celui de Peter. Je me retrouve alors piéger avec mes pensées, tiraillé avec des sentiment contradictoires. Fuir et faire comme si tout ce bordèle n'avait jamais existé ou m'y confronter directement pour trouver une solution concrète. 

― Je préfère garder ça pour moi, je mens en détournant le regard de Ned. 

― Tant mieux, j'aurais pas pu t'aider de toute façon. J'ai juste dit la même chose que ce que les gens disent dans les film. Tu sais quand quelqu'un va pas bien... 

Il a un petit rire mi-gêné, mi-soulagé. Il reporte son attention sur l'écran de  son ordinateur. 

En d'autres circonstances, j'aurais répliqué avec une insulte amicale pour me moquer gentiment de lui. Seulement, je lutte pour ne pas cracher cette vérité qui me dérange. Mon franc parler me demande de déployer tellement d'efforts que je pèse chacun des mots qui franchit la frontière de mes lèvres. Tenir ma langue n'est pas dans mes habitudes, encore moins face à Ned, le seul vrai ami que je n'ai jamais eu. 

Peut-être pas vraiment, Peter ne m'a pas dit si nous avions été amis avant d'être en couple. Je ne sais pas à quel point c'était sincère et véritable entre, voilà quand même la preuve indéniable que je suis capable de me lier sentimentalement à quelqu'un malgré les difficultés que je rencontre quand il s'agit des relations. En supposant que ce qu'il m'est raconté ne soit pas un mensonge qui avait pour but de profiter de moi. 

Je souffle un grand coup pour relâcher la tension accumulée. Je me prends beaucoup trop la tête, je vais encore avoir une migraine. 

Je replonge mon nez dans mes manuels et feuilles étalés en désordre sur le sol, devant moi. J'ai un contrôle important cet après-midi et ce n'est me laissant perturber par un garçon que je vais le réussir. J'ouvre un manuel en approchant la feuille de cours correspondant à la page. Je relis attentivement ce qui est noté dessus en le comparant avec le manuel, me focalisant sur les mots que j'ai surligné de jaune, vérifiant ce que je connais déjà. J'enchaîne page après page, définition après définitions sans que Peter ne quitte réellement mes pensées. Il demeure dans un coin de ma tête comme fantôme qui ne veut pas me déranger, juste rester là.  

― Et d'ailleurs, commence Ned, t'as des nouvelles de Peter ? Est-ce que c'est vraiment Spider-Man ? 

Sa question me prend de court. Je marmonne quelque mots incompréhensibles en cherchant une excuse. Je m'apprête finalement à lui répondre que je n'ai pas recontacter Peter quand la sonnerie du lycée retentit et recouvre ma panique. Je jette un coup d'œil à mon montre. Les cours ne vont pas tarder à reprendre. 

― On devrait y aller, dis-je et évitant ainsi de donner une explication à Ned. 

Je rassemble mes affaires en un tas de papier désordonné et les fourre telles quelles dans mon sac. Ned fait de même avec son ordinateur. Pressée, je me relève en balançant mon sac sur mon dos. Même si le toit du lycée est probablement mon lieu préféré, je n'y traîne pas plus pour regagner au plus vite les couloirs bruyants et que Ned passe à un autre sujet que celui Peter Parker.  

J'ouvre la porte pour prendre les escaliers, Ned sur les talons. Mon regard est alors irrésistiblement attiré par l'horizon où les buildings de New-York crèvent le ciel de leur hauteur. Je m'autorise un dernier instant à observer à la ville. Spider-Man voltige-t-il actuellement entre les tours de béton ? Je me perds à l'imaginer dans son costume rouge et bleu sauvant des vies parce que tel est ce que ses pouvoirs le contraignent à faire. Parce qu'il ne peut se soustraire à son devoir de héros. 

Ned s'impatiente derrière moi. À contre contrecœur, j'abandonne le toit, sa vue et le calme qu'il m'apporte. Je descend l'escalier par petits pas rapides, marche par marche. J'atteins vite les couloirs où les élèves se bousculent et parle fort chacun se hâtant de rejoindre leur salle de cours. Ned un peu plus lent, arrive après.

 ― C'était plus tranquille sur le toit, remarque-t-il en venant pour se tenir à côté de moi. 

Un élève avec les bars chargés de livres le bouscule accidentellement mais repart sans même s'excuser. J'ai alors l'envie impulsive de remonter et retrouver la sérénité du toit où personne ne me pouvait me déranger. Juste moi, les pensées qui me hantent et la vue de New-York. Comme un refuge qui me procurent un confort inexplicable. Je ne veux pas de ces couloirs bondés qui ne font que renforcer le manque de Peter entre ses murs. 

Spider-Man : My HomeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant