XV

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*J*

Je réalise que je me suis précipité pour rien. Les lumières n'étaient pas allumées. Et aucune tasse de café dans le lavabo. La chambre vide, le lit fait. Jordan s'est levé tôt ? Nous nous sommes couchés ensemble la nuit dernière. Dans un froid continue qui dure depuis l'épisode de la viande. Certes...

Je me précipite sous la douche, et lance mes vêtements dans une machine. Je ne sais pas. Et si je respirais le côté ouest ? Si Jordan le sentait ?

Au bout d'une heure, une fois habillée je me lance pour prendre un café. Et le son du moteur que j'entends à l'extérieur. C'est lui.

-       Jordan ?

-       Salut.

Il pose un sac de sport sur le canapé avant de retirer sa veste. Il ne porte pas d'ensemble cravate. On dirait presque qu'il a parcouru la nature. De cette odeur de terre humide qui émane de ses chaussures.

-       Tu es allez au golf ?

Je prononce bien sûr cette phrase au moment où il se détourne du porte-manteaux. Ce tee-shirt...

-       Jordan.

-       Quoi ?

Il lève les mains, agacé, puis me contourne. Finalement, il réquisitionne mon café. Moi, je crois tomber des nues...

-       Tu es allez tirer.

La dernière fois que je l'ai vu avec ce tee-shirt remonte à bien longtemps. De couleur beige, avec son initiale « Z » tracé près d'une tête de cerf. Il disait que ça lui faisait du bien. Que c'était une façon d'évacuer le stress, par quelque chose d'encore plus stressant. Mais à part le rendre fou, qu'est-ce que ça peut lui apporter ? Il connait mon avis sur les armes, et sait bien que je n'aime pas cette influence sur les gens. Sur lui, surtout.

-       Je n'y suis pas retourné depuis des mois, j'en avais besoin.

Il fixe l'extérieur, appuyé sur le lavabo. Évidemment cette façon de me tourner le dos, comme si je l'empêchais de respirer ne m'atteint plus. Il cherche à me punir à cause de cette histoire de contraception. Surtout parce qu'il souffre de ce que j'ai fait. Et oui, je m'en veux...

Ne pas avoir été honnête dès le début était une erreur. Une partie de moi pensait vraiment qu'il avait dit ça sur le coup de l'émotion, puis qu'il oublierait, aussitôt prit par son hôtel.

J'ai merdé, et après tout ça...

Ce qu'il s'est passé avec Harry ce matin. Il me serait d'un éternel enchantement qu'on ne m'en rajoute pas. À commencer par mon mari, par exemple. C'est à moi de stopper ces tensions, puisque je les ai provoqués.

-       Tu as sans doute eu raison.

J'entends sa surprise, il tourne la tête, sans vraiment me regarder. Mais ce mouvement m'encourage à poursuivre.

-       Je préfère savoir que tu évacue la colère en tirant dans le vide plutôt qu'en frappant sur un jeune.

Évidemment que j'en parlerais. C'est ce qui provoque ce silence embarrassant. Je refuse de le laisser là-dessus. Ce n'était pas la meilleure chose à faire. Frapper ton employé, comme si simplement lui dire qu'il est viré ne suffisait pas. Cette violence qu'il a toujours eue, pour le coup. J'ai l'impression de voir son père. 

À quelques jours de notre mariage, cette dispute que j'ai surprise entre eux. Où je l'ai vu cogner les épaules de Jordan au fur et à mesure de ses mots. Comme si chaque reproche devait aussi lui faire mal physiquement. Je ne l'ai jamais vu faire au-delà mais... j'ai toujours su que c'était déjà arrivé. Et dans ces cas de figure, tout dépend de comment vous grandissez avec ça. En ne voulant pas le reproduire, ou si, même en vous battant malgré tout.

Lacrimosa H.S (mâture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant